Orano : L’Approvisionnement en Uranium Menacé au Niger
Un an après le coup d'État au Niger, le géant français du nucléaire Orano tire la sonnette d'alarme. Son usine et sa mine d'uranium de la Somaïr, exploitées depuis un demi-siècle dans le nord du pays, sont au bord de l'arrêt. En cause : l'impossibilité d'exporter la production, alors que les frontières restent fermées. Une situation critique qui menace directement l'approvisionnement des centrales nucléaires françaises.
L'usine d'Orano au Niger en "grande difficulté"
Malgré une timide reprise en février dernier, l'usine nigérienne d'Orano fonctionne au ralenti et a produit seulement 450 tonnes de concentré d'uranium cette année. Bien loin des 2000 tonnes annuelles en temps normal. La raison ? Les frontières du pays restent closes, bloquant toute exportation et plongeant le site dans une situation financière très délicate.
Si la Cedeao a levé ses sanctions, le Niger maintient ses frontières fermées, ce qui empêche toute commercialisation de la production.
– Un porte-parole d'Orano
700 emplois menacés
Les 700 salariés et autant de sous-traitants de la Somaïr sont directement concernés. Pour maintenir l'activité et payer les salaires jusqu'à présent, Orano a dû vendre des stocks d'uranium entreposés en France, initialement destinés au financement du réaménagement du site en fin de vie. Mais sans solution rapide pour reprendre les exportations, le groupe devra bientôt réduire progressivement l'activité, "pouvant aller jusqu'à l'arrêt" et une mise en sommeil.
Une souveraineté énergétique fragilisée
Au-delà d'Orano, c'est tout l'approvisionnement en uranium de la France qui est fragilisé. Le Niger est le 7ème producteur mondial de ce minerai stratégique et les mines d'Orano y représentaient 1130 tonnes en 2023, sur les 7000 tonnes produites au total par le groupe. Même si ce dernier mise sur une montée en puissance de ses sites au Kazakhstan et au Canada, ainsi que sur de nouveaux projets comme en Mongolie, la perte durable du Niger serait un coup dur. Surtout au moment où le nucléaire français mise sur une relance d'ampleur.
Tensions géopolitiques sur les matières premières
Plus largement, la crise d'Orano illustre les tensions géopolitiques croissantes autour des ressources minières stratégiques comme l'uranium. Le nouveau pouvoir nigérien a fait de la souveraineté sur ces richesses un axe fort et a déjà retiré plusieurs permis miniers à des groupes étrangers. Un nationalisme des matières premières qui pourrait compliquer la donne pour de nombreuses industries dépendantes des importations, à commencer par le nucléaire.
Face à ces incertitudes, la sécurisation et la diversification des approvisionnements en matériaux critiques s'annonce comme un défi majeur des prochaines années. Avec en ligne de mire, la résilience des chaînes de valeur et la souveraineté économique et énergétique des pays consommateurs.