La chute de Byju’s: du sommet à la faillite
C'est une descente aux enfers qui secoue le monde des startups indiennes. Byju's, le fleuron de l'edtech un temps valorisé à 22 milliards de dollars, se retrouve aujourd'hui en procédure d'insolvabilité. Un tribunal indien a en effet initié mardi cette procédure en réponse à une pétition du Conseil de contrôle du cricket en Inde (BCCI), créancier de près de 19 millions de dollars. Un premier glas pour cette licorne autrefois tant adulée.
L'ascension fulgurante de Byju's
Fondée en 2011 par Byju Raveendran, Byju's a connu une croissance météorique dans le sillage de l'essor du marché de l'edtech en Inde. Sa plateforme d'apprentissage en ligne, mêlant vidéos, exercices interactifs et suivi personnalisé, a rapidement séduit étudiants et investisseurs. En juillet 2021, Byju's atteignait une valorisation record de 16,5 milliards de dollars.
L'appétit de la licorne semblait alors sans limite. Multiplication des levées de fonds, acquisitions à tour de bras, Byju Raveendran ne lésinait pas sur les moyens pour asseoir la domination de sa startup. Le parrainage de l'équipe de cricket indienne en 2019, pour près de 55 millions de dollars, en était le symbole éclatant.
Les premiers signes de fêlure
Mais derrière l'histoire dorée, les premiers nuages s'amoncelaient. Dès 2022, Byju's accumule les retards dans la publication de ses résultats financiers. Lorsqu'ils sont dévoilés, c'est la douche froide : les revenus sont plus de 50% inférieurs aux projections.
Les investisseurs commencent à s'inquiéter de la gouvernance de l'entreprise et de la gestion opaque de Byju Raveendran.
- Un investisseur de Byju's
Les départs s'enchaînent au conseil d'administration, de même que la démission fracassante de l'auditeur. En signe de protestation, les investisseurs de premier plan comme Prosus et Peak XV entament une bataille judiciaire pour évincer le fondateur.
L'effondrement de la valorisation
Le coup de grâce intervient début 2023, quand Byju's divise par 1000 sa valorisation pour une levée de fonds en droit préférentiel, la faisant chuter à seulement 25 millions de dollars. BlackRock, investisseur minoritaire, passe dans la foulée la valeur de sa participation à zéro. Le signal est dévastateur.
Acculé, Byju Raveendran tente de négocier un rééchelonnement de la dette de 1,2 milliard de dollars de la société. Peine perdue. Avec la procédure d'insolvabilité, c'est un administrateur intérimaire qui prend désormais les rênes, sonnant la fin de règne du fondateur.
Et maintenant ?
Si Byju's compte faire appel de la décision, l'horizon s'assombrit pour l'ex-pépite. Créanciers, employés et fournisseurs sont invités à déposer leurs réclamations, laissant présager d'âpres négociations. La restructuration s'annonce douloureuse.
Au-delà de Byju's, c'est tout le secteur indien de l'edtech qui vacille sur ses bases. Confronté à un marché post-Covid en berne, à des valorisations en chute libre et à des investisseurs échaudés, le modèle des startups éducatives est plus que jamais remis en question. L'avenir dira si la débâcle de Byju's était une exception ou le symptôme d'un mal plus profond.