La chute de Fisker: une chronologie de la startup automobile en détresse
L'histoire de Fisker, startup automobile spécialisée dans les véhicules électriques, ressemble à un véritable scénario catastrophe. Après des débuts prometteurs et ambitieux, l'entreprise fondée par Henrik Fisker s'est retrouvée en proie à de nombreuses difficultés qui ont fini par avoir raison d'elle. Retour chronologique sur les événements marquants qui ont précipité la chute de cette startup qui faisait pourtant figure de pépite.
Les premiers signes de faiblesse en 2023
Dès le second trimestre 2023, Fisker peine à atteindre ses objectifs de production pour son SUV électrique Ocean. L'entreprise produit seulement un peu plus de 1000 véhicules, loin des 1400 à 1700 initialement prévus. Pour continuer à financer ses opérations, Fisker se résout à vendre des obligations convertibles, espérant ainsi récolter près de 300 millions de dollars.
Mais les problèmes s'accumulent. En décembre, la startup révise largement à la baisse ses prévisions annuelles de production, passant de 40 000 à seulement 10 000 Ocean pour 2023. Un premier aveu d'échec.
Des ventes en berne malgré les efforts
En janvier 2024, Fisker est bien loin de son objectif de livrer 300 SUV par jour dans le monde. L'entreprise peine à écouler entre 100 et 200 véhicules quotidiennement sur son principal marché nord-américain. Certains jours, les ventes tombent même à une ou deux dizaines d'unités seulement.
Le SUV Ocean, un modèle à problèmes
Très vite, les premiers clients font remonter de nombreux problèmes sur leurs Fisker Ocean flambant neufs : pertes de puissance soudaines, défauts du système de freinage, portes impossible à ouvrir de l'intérieur ou encore capot qui s'ouvre inopinément à grande vitesse. Des vices de conception majeurs qui poussent les autorités américaines (NHTSA) à ouvrir plusieurs enquêtes dès janvier et février 2024.
Malgré les dires de Fisker qui assure avoir résolu la majorité des soucis via des mises à jour logicielles, les autorités persistent. Pas moins de quatre investigations seront menées sur les problèmes de l'Ocean, poussant même Fisker à procéder à un rappel massif en juin.
Cash crunch et licenciements
Confronté à des ventes plus que moroses et des coûts qui s'envolent, Fisker annonce en février 2024 un plan de licenciement de 15% de ses effectifs. Henrik Fisker reconnaît que l'entreprise n'aura bientôt plus assez de cash pour tenir 12 mois. Ironie du sort, le dirigeant et son épouse, cofondatrice, se verront contraints de baisser leur salaire à 1$ symbolique quelques mois plus tard pour préserver les maigres liquidités.
En mars, Fisker est au pied du mur. Avec seulement 121 millions de dollars en banque, la startup doit se résoudre à stopper la production de l'Ocean pour six semaines, le temps de trouver de nouveaux investisseurs. Un nouveau plan de licenciement est lancé en mai. Fisker ne compte plus qu'environ 150 employés.
Échec des négociations et dépôt de bilan
La direction tente alors de négocier en urgence un partenariat et une prise de participation d'un grand constructeur, probablement Nissan. Mais les pourparlers capotent fin mars. Dans la foulée, le New York Stock Exchange suspend la cotation de l'action Fisker, désormais penny stock jugée trop spéculative.
N'ayant plus d'autre choix, Fisker se place sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites le 18 juin 2024. L'entreprise espère ainsi trouver un repreneur pour tout ou partie de ses actifs, évalués entre 500 millions et 1 milliard de dollars pour seulement 100 à 500 millions de dettes. Mais la procédure s'annonce d'ores et déjà compliquée.
Que reste-t-il de Fisker ?
Depuis son dépôt de bilan, Fisker a obtenu l'autorisation de brader plusieurs milliers de SUV Ocean à un loueur pour environ 14 000$ pièce. De quoi renflouer un peu les caisses et indemniser certains créanciers, en attendant un éventuel repreneur.
Mais la bataille fait déjà rage sur les restes de Fisker entre son principal prêteur garanti et les autres créanciers qui s'estiment lésés. Si les parties ne parviennent pas rapidement à un accord, la procédure pourrait basculer en liquidation (chapitre 7) et sonner le glas définitif de Fisker.
Reste une question en suspens : comment une entreprise si prometteuse a-t-elle pu en arriver là si vite ? Certaines sources évoquent l'hubris et les luttes de pouvoir en interne, d'autres pointent l'incapacité de Fisker à mettre en place des processus solides. Une chose est sûre : la gouvernance défaillante et les problèmes de qualité de l'Ocean auront eu raison des rêves de grandeur d'Henrik Fisker.