Airbus Lead! : Optimiser l’Efficacité Sans Plan Social
Malgré un carnet de commandes historique et des effectifs au plus haut, Airbus traverse une zone de turbulences. L'avionneur européen peine à livrer autant d'appareils qu'espéré. Pour remettre les gaz sans toucher aux emplois, il mise sur Lead!, un plan d'optimisation tous azimuts. Décollage immédiat pour une analyse détaillée de cette stratégie industrielle.
Des livraisons en perte de vitesse malgré des effectifs record
Premier paradoxe : jamais Airbus n'a compté autant de salariés, avec 90 000 personnes dans sa branche aviation commerciale contre 81 000 en 2019. Pourtant, le rythme des livraisons ne suit pas. 735 avions livrés en 2023, loin des 863 de 2019. Depuis janvier, le compte n'y est toujours pas avec seulement 447 appareils sortis des chaînes contre 433 l'an dernier sur la même période.
En cause, un contre-coup social de la pandémie avec un quart des salariés ayant moins de 4 ans d'ancienneté. La perte de savoir-faire se fait sentir. S'ajoutent des tensions chez les grands fournisseurs, Safran, Pratt & Whitney ou encore Spirit, qui peinent à livrer moteurs, sièges et pièces de structures dans les temps.
Lead! : Un plan d'attaque sur tous les fronts
Pour reprendre de l'altitude, Airbus a dévoilé en juillet dernier Lead!, un programme d'amélioration opérationnelle présenté fin septembre aux syndicats. Pas question de dégraisser les effectifs, il s'agit plutôt d'une philosophie avec une batterie de mesures:
- Réduction des coûts : frais de déplacement rabotés de 20%, dépenses d'événementiel compressées
- Simplification de l'organisation : chasse aux doublons, circulation de l'information fluidifiée
- Mobilité interne et formation renforcées pour mettre les compétences face aux besoins
- Priorisation des projets : focus sur ceux qui boostent directement la production
Objectif : atteindre un rythme de 75 A320 produits par mois en 2027, contre 48 actuellement. Du jamais vu dans l'industrie aéronautique.
Des syndicats rassurés mais vigilants
Côté partenaires sociaux, le plan est plutôt bien accueilli. FO, premier syndicat chez Airbus, se dit «rassuré sur l'absence d'impact social majeur». Tout en restant attentif aux conditions de la mobilité interne, pour éviter que les salariés n'y perdent au change avec la nouvelle convention collective de la métallurgie.
La CFTC pointe que Lead! «constitue surtout une philosophie à ce stade» sans mesures ultra concrètes ni calendrier précis. Tout en saluant la volonté de s'appuyer sur les équipes internes pour identifier les leviers d'optimisation.
Que l'on nous demande de nous améliorer, pas de souci. Mais si c'est pour continuer à ne pas recevoir assez de pièces et ne pas pouvoir livrer des avions, cela ne servira à rien.
– Dominique Delbouis, coordinateur FO chez Airbus
La supply chain, maillon faible d'Airbus ?
Car c'est bien là que le bât blesse. Les regards se tournent vers la supply chain. Airbus va devoir s'assurer que ses fournisseurs puissent suivre la cadence infernale qu'il s'impose. Certains se demandent même si l'avionneur n'a pas trop pressurisé ses sous-traitants. «Au vu du contexte actuel et des problèmes de compétitivité, Airbus n'a-t-il pas visé trop haut ?», s'interroge un industriel du secteur.
Le plan Lead! pose les fondations d'une profonde transformation pour Airbus. Le défi s'annonce de taille pour livrer plus avec des ressources contraintes, le tout sans casse sociale. Un nouveau modèle industriel est à inventer pour permettre à l'avionneur européen de reprendre son envol. Décollage prévu en 2027, weather permitting.