Covestro racheté par Adnoc : Le géant de la chimie allemande entre de nouvelles mains
C'est un séisme qui vient de frapper l'industrie chimique européenne. Le groupe pétrolier d'Abou Dhabi, Adnoc, a annoncé le rachat pour la somme colossale de 15,9 milliards d'euros du géant allemand Covestro. Une acquisition record qui illustre les grandes manœuvres des fonds souverains du Golfe Persique en Europe, dans un contexte de transition énergétique mondiale.
Adnoc sort le chéquier pour Covestro
Le coup de tonnerre est venu d'Abou Dhabi ce 1er octobre. La compagnie pétrolière nationale des Émirats Arabes Unis, Adnoc, a annoncé le rachat de Covestro, mastodonte allemand de la chimie et ancien fleuron du groupe Bayer. Le montant de la transaction atteint les 15,9 milliards d'euros, dette comprise, faisant de cette opération la plus importante acquisition jamais réalisée par Adnoc.
Pour mettre la main sur Covestro, Adnoc a accepté de payer 62 euros par action, valorisant l'entreprise à 14,7 milliards d'euros. Le géant pétrolier prévoit également d'injecter 1,2 milliard d'euros supplémentaires dans le capital de Covestro via une augmentation de capital. De quoi donner un nouveau souffle au chimiste allemand, qui a accusé une perte de 72 millions d'euros au premier semestre 2024.
Un symbole fort de la diversification du Golfe
Au-delà du montant record, cette acquisition revêt une forte portée symbolique. Elle illustre en effet la volonté des pays producteurs de pétrole du Golfe Persique de diversifier leurs économies et de réduire leur dépendance aux hydrocarbures, alors que le monde s'engage dans une transition énergétique de grande ampleur.
Pour Adnoc, mettre la main sur Covestro permet d'étendre significativement ses activités pétrochimiques, aux côtés du gaz et des énergies renouvelables. Un virage stratégique amorcé en février dernier avec la prise de participation de 25% dans le groupe pétrolier autrichien OMV.
L'Europe, nouvel eldorado des investisseurs du Golfe
Plus largement, le rachat de Covestro par Adnoc s'inscrit dans une tendance de fond : l'intérêt croissant des investisseurs du Moyen-Orient pour l'Europe. Attirés par des valorisations d'entreprises plus faibles qu'aux États-Unis et une réglementation jugée plus souple, les fonds souverains de la région multiplient les opérations sur le Vieux Continent.
L'Europe a besoin d'investissements et les accueille plus favorablement que les États-Unis. C'est une fenêtre d'opportunité pour les fonds du Golfe.
Un analyste financier
Selon les données de Dealogic, le rachat de Covestro par Adnoc constitue la deuxième plus grosse acquisition du Moyen-Orient en Europe, derrière les 40 milliards de dollars déboursés par le groupe pharmaceutique israélien Teva pour acquérir Allergan en 2015. Mais il pourrait être annonciateur d'une vague bien plus massive.
Un avenir à construire sous pavillon émirati
Pour les 16 500 employés de Covestro, répartis dans une trentaine de pays dont la France, l'heure est à l'incertitude. Le groupe allemand assure cependant avoir obtenu des "concessions importantes" de la part d'Adnoc pour encadrer son futur contrôle.
- Maintien de la gouvernance actuelle de l'entreprise jusqu'en 2028
- Interdiction de revendre, fermer ou réduire significativement les activités
- Protection de la technologie et de la propriété intellectuelle de Covestro
Des garanties que les analystes jugent rassurantes, compte tenu du faible recoupement opérationnel entre les deux groupes. Elles devraient permettre à Covestro de poursuivre ses activités avec une certaine autonomie, tout en bénéficiant du soutien financier de son nouvel actionnaire. Reste à voir comment évolueront les synergies entre la chimie allemande et le pétrole émirati dans les années à venir, sur fond de transition énergétique mondiale.
