Les puces en diamant d’ODD pour nettoyer Fukushima
Le 11 mars 2011, le monde entier retenait son souffle alors que la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi subissait une défaillance catastrophique de ses systèmes de refroidissement suite au violent séisme et au tsunami dévastateur qui ont frappé le Japon. Plus de dix ans après, le nettoyage de la radioactivité dans la région est toujours en cours. Mais une startup nippone révolutionne aujourd'hui ce processus titanesque grâce à une technologie de pointe : les puces en diamant.
Ookuma Diamond Device, pépite technologique au cœur du sinistre
Fondée en 2021, la jeune pousse Ookuma Diamond Device (ODD) s'est donné pour mission d'aider au démantèlement de la centrale accidentée. Ses deux cofondateurs, les Drs Junichi Kaneko et Hitoshi Umezawa, planchent depuis plus de vingt ans sur les semiconducteurs en diamant au sein des prestigieux instituts AIST et de l'Université de Hokkaido.
Le mois dernier, le gouvernement japonais a entamé des tests pour extraire les débris radioactifs en utilisant des amplificateurs à base de puces diamant fournis par ODD. Une étape cruciale dans le long chemin vers une décontamination complète du site, attendue à l'horizon 2051.
Des propriétés exceptionnelles pour défier les radiations
Le choix du diamant n'est pas un hasard. Ce matériau dit "à large bande interdite" (WBG) présente des caractéristiques nettement supérieures au silicium classique en termes d'efficacité de conversion de puissance et de gestion thermique. Des atouts indispensables pour opérer dans les conditions extrêmes d'une centrale nucléaire sinistrée.
"Les puces en diamant que nous développons sont fondamentalement différentes des semiconducteurs silicium traditionnels de par leurs propriétés matérielles supérieures", explique Yuhei Nagai, Directeur Financier d'ODD.
Yuhei Nagai, CFO d'Ookuma Diamond Device
Constitués uniquement de carbone, les semiconducteurs diamant d'ODD peuvent être fabriqués à partir de méthane, permettant une production 100% japonaise. Un avantage stratégique alors que le marché des WBG comme le nitrure de gallium est largement dominé par la Chine.
27 millions de dollars pour bâtir la première usine au monde
Forte de ces innovations de rupture, ODD vient de boucler une levée de fonds de 4 milliards de yens (environ 27 millions de dollars) pour construire la toute première usine de fabrication de semiconducteurs diamant à Ookuma, ville même de Fukushima. Les travaux débuteront en janvier 2025 pour une mise en service dès l'été 2026.
Si les défis technologiques restent nombreux pour passer du prototype au produit fini, ODD affiche de grandes ambitions. Plus d'une dizaine de clients potentiels à l'international, dans les domaines du nucléaire, de l'aérospatial ou des télécoms, ont déjà manifesté leur intérêt.
Le futur des technologies de puissance passe par le diamant
Au-delà du démantèlement de Fukushima, les perspectives sont immenses pour les puces diamant nouvelle génération. Avec un marché estimé à 10 milliards de dollars d'ici 2032, elles s'imposent comme une alternative crédible pour les applications de puissance du futur comme la 6G, le spatial, la défense ou le nucléaire civil.
Le pari technologique d'ODD pourrait bien faire briller le diamant de mille feux au firmament des semiconducteurs de demain. Une success story japonaise sur fond de fukkou, cette résilience et cet esprit de reconstruction chers au pays du Soleil Levant.