Le ralentissement du transport aérien et l’impact écologique
Alors que Ryanair, le géant européen du low-cost, annonce un bénéfice en baisse de 18% au premier semestre 2024, une question se pose : le ralentissement du trafic aérien pourrait-il paradoxalement avoir un impact positif sur l'environnement ? En effet, le secteur de l'aviation est pointé du doigt pour son empreinte carbone importante. Décryptage des enjeux de la décarbonation du transport aérien.
La baisse des prix des billets, un mal pour un bien ?
Le bénéfice de Ryanair a été plombé par une chute de 10% des tarifs aériens au premier semestre. Une tendance qui devrait se poursuivre au troisième trimestre selon le PDG Michael O'Leary. Si c'est une mauvaise nouvelle pour les comptes de la compagnie, cela pourrait paradoxalement être un signal positif d'un point de vue écologique.
En effet, des billets moins chers incitent davantage de passagers à prendre l'avion, gonflant l'empreinte carbone du secteur aérien. A l'inverse, un renchérissement des tarifs pourrait limiter la croissance du trafic et donc les émissions. Même si la corrélation n'est pas toujours évidente, le prix est un levier important pour influencer la demande et les comportements.
Les low-costs, moteurs de la croissance du trafic aérien
L'essor des compagnies low-cost comme Ryanair, easyJet ou Volotea a démocratisé le transport aérien en Europe depuis 20 ans. Avec des tarifs défiant toute concurrence, parfois à quelques euros, elles ont attiré une nouvelle clientèle et fait exploser le nombre de passagers.
Entre 2005 et 2019, le trafic aérien en Europe a bondi de 54%, avec 1,1 milliard de passagers transportés
- Eurostat
Mais cette croissance effrénée a un coût environnemental important. Malgré les progrès technologiques, l'avion reste l'un des modes de transport les plus polluants. Selon l'Ademe, il émet en moyenne 144 g de CO2 par passager et par km, contre 103g pour la voiture et 3,7g pour le train.
Un secteur aérien sous pression pour réduire son empreinte
Face à l'urgence climatique, le transport aérien est de plus en plus montré du doigt. En France, il représente 6,5% des émissions de gaz à effet de serre. Un chiffre en constante augmentation avec la croissance du trafic. Pour inverser la tendance, le secteur s'est engagé à diviser par deux ses émissions nettes de CO2 d'ici 2050 par rapport à 2005.
Pour y parvenir, plusieurs leviers sont actionnés :
- Le renouvellement des flottes avec des appareils plus performants et moins gourmands en carburant
- L'incorporation progressive de carburants durables d'aviation (SAF)
- L'optimisation des routes aériennes et des procédures de vol pour réduire la consommation
- Des mesures de compensation carbone
Mais ces efforts seront-ils suffisants si la demande continue de croître ? C'est tout l'enjeu du débat sur la régulation du trafic aérien. Certains prônent des mesures radicales comme l'interdiction des vols courts, la taxation du kérosène ou des quotas de CO2. D'autres misent sur l'innovation technologique et les changements de comportements.
Vers une aviation plus verte et raisonnée ?
Le ralentissement du transport aérien, provoqué par le choc de la crise sanitaire puis l'inflation, offre paradoxalement une fenêtre d'opportunité pour repenser le modèle de croissance du secteur. Plutôt que de miser sur des volumes toujours plus importants, il s'agit d'évoluer vers une aviation plus qualitative, plus raisonnée et plus verte.
Cela passe par une meilleure prise en compte des externalités environnementales dans le prix des billets, une optimisation du taux de remplissage des avions, la promotion de modes alternatifs sur les courtes distances et une sensibilisation des passagers à l'impact de leurs voyages. Sans renoncer à la liberté de se déplacer, il est possible de voler de façon plus responsable.
La baisse des bénéfices de Ryanair, si elle fait figure de mauvais signal économique à court terme, peut aussi être vue comme le symptôme d'une transition en cours vers une autre forme de mobilité aérienne. Espérons que les acteurs du secteur sauront transformer cette crise en opportunité pour construire un avenir plus durable. L'enjeu n'est autre que notre capacité à continuer à prendre l'air sans épuiser nos ressources terrestres.