Atos cède Worldgrid à Alten : un coup de pouce stratégique pour le nucléaire français

Le secteur nucléaire français est en ébullition. Le géant informatique tricolore Atos vient d'annoncer la cession de sa filiale dédiée au nucléaire, Worldgrid, à l'ingénieriste Alten pour une valeur de 270 millions d'euros. Une transaction qui s'inscrit dans la vaste restructuration engagée par Atos pour réduire sa lourde dette, mais qui pourrait aussi rebattre les cartes dans la filière hexagonale.

Worldgrid, un maillon clé du nucléaire français

Si le nom de Worldgrid est peu connu du grand public, cette pépite est un acteur incontournable du nucléaire tricolore et même mondial. La filiale d'Atos développe en effet des systèmes de contrôle-commande cruciaux pour la sûreté et l'exploitation des centrales. Ses solutions équipent près de 15% du parc nucléaire de la planète.

Worldgrid compte parmi ses principaux clients les poids lourds français du secteur comme EDF ou Framatome. Avec un chiffre d'affaires de 170 millions d'euros en 2023 et 1100 salariés, c'est un maillon stratégique de la chaîne de valeur nucléaire nationale.

Une cession pour éponger les dettes d'Atos

Si Atos a décidé de se séparer de ce joyau, c'est avant tout pour renflouer ses caisses. Le géant informatique croule en effet sous une dette abyssale, qui a atteint un pic de 4,8 milliards d'euros. Dans ce contexte, la cession de Worldgrid doit lui apporter un ballon d'oxygène bienvenu.

Worldgrid sera cédé pour une valeur d'entreprise de 270 millions d'euros.

– Atos

Cette opération s'inscrit dans le vaste plan de restructuration annoncé par Atos, qui prévoit également la cession de ses activités stratégiques, dont celles dédiées aux supercalculateurs pour la dissuasion nucléaire. Des discussions sont en cours avec l'État à ce sujet.

Alten, un repreneur aux dents longues dans le nucléaire

Si l'État a un temps envisagé de mettre la main sur Worldgrid, c'est finalement Alten qui a raflé la mise. L'ingénieriste, bien implanté dans l'aéronautique et la défense, cherche en effet à muscler ses positions dans le nucléaire, un marché porteur avec la relance de la filière française.

Worldgrid viendra ainsi renforcer les compétences d'Alten dans l'ingénierie des systèmes et des logiciels pour les centrales. Le groupe pourra s'appuyer sur le savoir-faire et les équipes de sa nouvelle acquisition pour accélérer sur ce segment hautement technique.

Un deal scruté de près par la filière

Au-delà des enjeux propres à Atos et Alten, cette transaction est scrutée par l'ensemble de l'écosystème nucléaire français. En changeant de mains, Worldgrid pourrait en effet modifier les équilibres et les rapports de force dans la filière.

Certains acteurs craignent notamment de voir émerger un nouveau mastodonte avec le rapprochement des activités d'Alten et de Worldgrid. À l'inverse, d'autres y voient l'opportunité de faire émerger un champion national dans l'ingénierie nucléaire, à même de rayonner à l'international.

Une chose est sûre : avec la relance du nucléaire français et les gigantesques chantiers prévus, de la prolongation du parc existant à la construction de nouveaux EPR, le marché s'annonce plus que jamais porteur et concurrentiel. Dans ce contexte, la cession de Worldgrid pourrait être le premier acte d'une vaste recomposition du secteur. Affaire à suivre...