Les Banques Européennes Face aux Défis de la Concurrence Américaine
Alors que les banques européennes peinent à retrouver leur niveau de rentabilité d'avant la crise financière de 2008, elles doivent désormais se préparer à affronter une concurrence accrue de leurs homologues américaines. En effet, la réélection de Donald Trump laisse présager une nouvelle ère de déréglementation financière outre-Atlantique, ce qui pourrait créer un terrain de jeu déséquilibré entre les deux continents.
Une rentabilité en berne pour les banques européennes
Depuis la crise des subprimes, les établissements bancaires européens ont dû composer avec un environnement économique morose et des taux d'intérêt historiquement bas. Selon la Banque centrale européenne (BCE), leur rendement des capitaux propres plafonne autour de 5%, contre 10% pour leurs concurrents américains.
Plusieurs facteurs expliquent cet écart :
- Des revenus de commissions plus élevés aux États-Unis
- Un héritage de prêts non performants en Europe
- Une réglementation plus stricte avec les accords de Bâle III
Le spectre d'une déréglementation à l'américaine
La victoire de Donald Trump fait craindre un retour en arrière sur certains pans de la loi Dodd-Frank adoptée après la crise pour mieux encadrer le secteur bancaire. Le président américain pourrait ainsi revenir sur les exigences accrues en matière de fonds propres ou assouplir les tests de résistance (stress tests).
Si les banques américaines reçoivent le soutien politique attendu, elles pourraient augmenter les volumes de prêts et optimiser le capital d'une manière que les banques européennes ne peuvent tout simplement pas égaler à l'heure actuelle.
– David Materazzi, dirigeant de la plateforme Galileo FX
Vers une uniformisation des règles du jeu ?
Face à cette menace, les banques européennes comptent bien faire entendre leur voix. Certains responsables politiques, en Suisse et au Royaume-Uni, ont déjà évoqué le sujet pour appeler à trouver un équilibre entre compétitivité et stabilité financière.
Une vague de déréglementation américaine pourrait ainsi servir de levier aux lobbyistes européens pour pousser à un assouplissement de ce côté-ci de l'Atlantique. Et leur permettre de lutter à armes égales dans la course aux commissions et aux profits.
Le risque d'une consolidation à marche forcée
Autre effet collatéral attendu : une accélération des fusions-acquisitions aux États-Unis, avec une autorité de la concurrence moins regardante. Cela pourrait donner un avantage compétitif aux mastodontes américains, mieux armés pour financer les grands projets.
A contrario, les banques européennes risquent de rencontrer plus d'obstacles réglementaires dans leur quête de taille critique. Le décalage réglementaire entre les deux zones pourrait ainsi favoriser la constitution de nouveaux champions nationaux outre-Atlantique.
En quête de relais de croissance
Pour ne pas se laisser distancer, les banques du Vieux Continent devront redoubler d'inventivité et dénicher de nouveaux gisements de revenus. Certaines misent déjà sur la banque en ligne ou les fintechs pour réduire leurs coûts et capter une clientèle plus jeune.
D'autres lorgnent vers l'international et les pays émergents, où la dynamique de rattrapage économique offre des perspectives de croissance alléchantes. C'est le cas de Banco Santander qui réalise désormais 40% de ses profits en Amérique latine.
Avec des marges sous pression en Europe, il est crucial pour nos banques de se tourner vers d'autres zones géographiques porteuses. L'enjeu est d'équilibrer le couple risque-rendement, en sécurisant des positions dans les pays prometteurs.
– Jesus Aguado, analyste chez Barclays
L'innovation comme clé du rebond
Mais la clé de la réussite résidera surtout dans la capacité des banques européennes à innover et se transformer, pour coller aux nouveaux usages de leurs clients. Cela passe par des investissements massifs dans la digitalisation de leurs outils et procédures.
Les plus agiles sauront tirer leur épingle du jeu en développant de nouveaux services à haute valeur ajoutée. Au-delà du simple crédit, elles devront proposer un vrai accompagnement dans les moments clés de la vie : projets immobiliers, entrepreneuriaux ou de transmission.
Dans ce domaine, certaines ont pris une longueur d'avance à l'image de BNP Paribas et sa néobanque digitale Nickel. Ou encore le Crédit Agricole et sa stratégie de "banque universelle de proximité multicanale". De quoi redonner espoir aux banques européennes face aux vents contraires de la réglementation et de la concurrence mondialisée.