Vivendi Fait Appel : La Bataille Pour TIM Se Poursuit
Le feuilleton Vivendi-TIM n'en finit plus de rebondir. Dans un nouveau coup de théâtre, le géant français des médias a annoncé faire appel de la décision du tribunal de Milan qui avait validé fin 2023 la cession du réseau fixe de Telecom Italia. Un énième épisode dans la longue bataille qui oppose Vivendi, premier actionnaire de l'opérateur italien, à la direction de TIM et au gouvernement transalpin.
La cession controversée du réseau fixe de TIM
Pour comprendre les enjeux de ce bras de fer, il faut remonter à 2023. Le conseil d'administration de TIM, sous pression du gouvernement italien, approuve le 21 décembre le projet de scission et vente de son réseau fixe à la société publique CDP. Une opération à 20 milliards d'euros destinée à réduire la dette abyssale de l'opérateur. Mais Vivendi, qui détient 24% des parts, s'y oppose farouchement estimant le prix très sous-évalué.
Le groupe français engage alors un recours en justice pour faire annuler la décision, arguant que la vente d'un actif stratégique de cette ampleur aurait dû être soumise au vote des actionnaires. Peine perdue, le tribunal de Milan rejette sa requête fin décembre 2023, sans se prononcer sur le fond. Vivendi accuse le coup mais ne désarme pas et annonce aussitôt faire appel.
Une procédure sur la forme mais pas sur le fond
Dans son communiqué, Vivendi précise que le tribunal a jugé sa demande "irrecevable pour défaut d'intérêt à agir" et non sur le fond du dossier. Autrement dit, les magistrats estiment que Vivendi, en tant qu'actionnaire minoritaire, n'avait pas qualité pour attaquer la décision du conseil d'administration. Ils ne se sont donc pas prononcés sur le caractère litigieux ou non de l'opération.
Une subtilité juridique qui permet à Vivendi de ne pas perdre la face et de maintenir la pression. Le groupe "continue de considérer que la cession du réseau de TIM aurait dû faire l'objet d'un vote en assemblée générale des actionnaires", martèle-t-il dans son communiqué. La bataille judiciaire est donc loin d'être terminée.
Des conséquences majeures pour l'avenir de TIM
Au-delà des arguties juridiques, l'enjeu est de taille pour Telecom Italia. La vente de son réseau cuivre et fibre, hérité de l'ancien monopole public, doit lui permettre de renflouer ses caisses et d'investir dans la 5G et les services du futur. Un virage stratégique crucial alors que la concurrence fait rage sur le marché italien avec l'arrivée de l'français Iliad.
Mais sans son réseau, que restera-t-il de TIM ? Le risque est de voir l'opérateur devenir une coquille vide, un simple fournisseur de services dépendant des infrastructures de CDP. C'est tout l'avenir du groupe qui est en jeu, tiraillé entre les ambitions de l'État italien qui rêve d'un réseau unifié et les intérêts financiers de ses actionnaires privés, au premier rang desquels Vivendi.
Une situation inextricable
Après des années de conflit, aucune issue ne semble en vue. Vivendi, déterminé à défendre ses intérêts, multiplie les actions en justice pour tenter de bloquer le démantèlement de TIM. Quitte à plonger l'opérateur dans l'incertitude et compromettre sa capacité à investir et se développer. Une stratégie qui exaspère le gouvernement italien et une partie des autres actionnaires.
De son côté, la direction de TIM assure que la cession du réseau est vitale pour assurer la pérennité du groupe, lourdement endetté et mis sous pression par une concurrence féroce. Elle accuse Vivendi de faire passer ses intérêts financiers avant l'avenir industriel de l'opérateur. Un dialogue de sourds qui tourne au bras de fer juridique et politique.
Cette situation paraît totalement inextricable. Aucun actionnaire ne veut lâcher du lest, aucun compromis ne semble possible. C'est une véritable impasse pour Telecom Italia.
Analyse un expert du secteur télécoms
Quelles perspectives pour dénouer la crise ?
Alors que l'avenir de Telecom Italia est plus que jamais incertain, les spéculations vont bon train sur les scénarios possibles pour sortir de l'ornière. Certains évoquent un possible deal entre Vivendi et CDP pour trouver un terrain d'entente sur la valorisation du réseau. D'autres misent sur une médiation politique au plus haut niveau entre Paris et Rome.
Une chose est sûre, le temps presse pour TIM qui voit chaque jour sa situation se dégrader. La bataille judiciaire et médiatique que se livrent ses actionnaires a de lourdes conséquences opérationnelles et financières. Les investissements sont gelés, des plans sociaux se profilent, les abonnés désertent… Sans une issue rapide, c'est la survie même de l'opérateur historique italien qui pourrait être menacée.
L'appel de Vivendi contre la décision de justice sur la vente du réseau n'est donc qu'une énième péripétie dans ce interminable feuilleton politico-financier. Mais il illustre l'extrême tension qui règne entre les différentes parties prenantes, consumées dans une guerre d'usure sans merci. L'avenir de Telecom Italia, ex-fleuron national devenu l'enjeu de luttes capitalistiques, en est aujourd'hui l'otage. Aux pouvoirs publics et dirigeants de TIM de trouver une issue, sous peine de voir l'opérateur sombrer.
