École d’ingénieurs EPF : une voie d’accès réservée aux femmes
Face à un taux de mixité qui stagne à 29% dans les écoles d'ingénieurs françaises, l'EPF de Cachan a décidé de prendre le taureau par les cornes. En septembre 2025, l'établissement lancera une voie de recrutement inédite, exclusivement réservée aux jeunes bachelières. Une initiative audacieuse visant à contourner les biais de genre et à attirer de nouveaux profils féminins vers les carrières d'ingénierie.
Un processus de sélection repensé pour plus de parité
Jusqu'à présent, l'EPF recrutait environ 450 étudiants post-bac via le concours Avenir, avec un taux de féminisation légèrement supérieur à la moyenne nationale. Pour franchir un cap et viser la parité d'ici 3 ans, l'école a imaginé un nouveau dispositif de sélection qualifié de "non-compétitif".
Concrètement, 50 places seront réservées aux jeunes femmes, recrutées sur la base de leur dossier scolaire, d'une épreuve de mise en situation collective et d'un entretien individuel. Exit les épreuves traditionnelles qui, selon les études, peuvent jouer contre certaines candidates en raison des stéréotypes de genre.
En s'adaptant aux biais que la société impose à certaines femmes, nous envoyons un message à ces jeunes filles, ainsi qu'à leurs parents et à leurs enseignants, qui sont les premiers prescripteurs.
Emmanuel Duflos, Directeur Général de l'EPF
Attirer de nouveaux profils féminins
L'objectif affiché est clair : il ne s'agit pas de recueillir des candidates qui se seraient de toute façon présentées via le concours Avenir, mais bien de toucher un nouveau vivier de talents féminins. Une fois intégrées, ces étudiantes bénéficieront d'un accompagnement renforcé :
- Modules sur l'insertion professionnelle
- Programme de mentorat dédié
- Sensibilisation aux enjeux de la mixité dans les métiers de l'ingénierie
Un projet en phase avec l'histoire de l'EPF
Si cette initiative détonne dans le paysage des grandes écoles, elle s'inscrit en réalité dans l'ADN de l'EPF. Fondé en 1925 sous le nom d'École Polytechnique Féminine, l'établissement était à l'origine exclusivement réservé aux femmes.
Devenue mixte en 1994, l'EPF a néanmoins conservé dans ses statuts la mission de "concourir à la formation supérieure des femmes dans les domaines scientifiques et techniques". Un héritage qui permet aujourd'hui à l'école de mettre en place un tel dispositif, juridiquement impossible dans un établissement public.
Un laboratoire pour étudier les leviers de la mixité
Au-delà du recrutement, l'EPF entend contribuer à la réflexion globale sur la féminisation des métiers de l'ingénierie. C'est tout l'objet du ParityLab, un laboratoire de recherche-action nouvellement créé en son sein.
Sa mission : étudier scientifiquement les facteurs favorisant l'orientation des jeunes femmes vers les filières technologiques et leur insertion professionnelle. De quoi nourrir les politiques de l'école, mais aussi partager les bonnes pratiques avec l'ensemble de l'écosystème.
Avec ce coup d'éclat, l'EPF espère créer un électrochoc et inciter d'autres établissements à repenser leurs processus de recrutement. Car pour transformer durablement la place des femmes dans les métiers d'ingénieurs, c'est toute la chaîne de formation qui doit se mobiliser. Les écoles, bien sûr, mais aussi les entreprises, les pouvoirs publics et la société dans son ensemble. Un défi ambitieux et plus que jamais d'actualité.