L’éolien américain face au défi Trump : quel impact pour l’Europe ?
Alors que le futur président américain Donald Trump a récemment déclaré vouloir stopper net le développement de l'éolien aux États-Unis, les acteurs européens du secteur semblent pour l'instant relativement sereins. Si un tel coup de frein devait effectivement se produire outre-Atlantique, son impact resterait en effet plutôt circonscrit pour les entreprises du Vieux Continent, à en croire plusieurs d'entre elles.
Un marché éolien encore balbutiant aux USA
Il faut dire que malgré un fort potentiel, notamment en mer, le marché éolien américain reste encore assez peu développé comparé à l'Europe. Seuls 174 mégawatts (MW) de capacités offshore sont aujourd'hui en exploitation aux États-Unis, contre près de 1500 MW rien qu'en France. Et les projets en cours de développement ou de construction ne totalisent "que" 12 gigawatts (GW) outre-Atlantique, loin des 35 GW déjà installés au large des côtes européennes.
Dans ces conditions, difficile pour les acteurs du Vieux Continent de voir leur activité grandement menacée, même en cas de coup d'arrêt brutal. C'est notamment le cas pour le français Engie, qui ne compte que trois projets éoliens offshore aux États-Unis, tous encore en phase de développement. Comme l'expliquait début janvier sa directrice générale Catherine MacGregor :
Notre exposition aux États-Unis est limitée, et un éventuel moratoire sur l'éolien ne nous toucherait qu'à la marge. Mais ce serait dommage pour le pays, qui dispose de belles ressources dans ce domaine.
Catherine MacGregor, DG d'Engie
L'Europe, marché prioritaire pour les fabricants
Même son de cloche du côté des fabricants de turbines comme l'allemand Siemens Gamesa. Bien que l'entreprise soit en train de construire un parc éolien en mer aux États-Unis, "la vaste majorité de [ses] projets actuels d'éoliens offshore sont en Europe, où [ils connaissent] la plus importante demande", relativise un porte-parole. De quoi pouvoir amortir sans trop de difficultés un éventuel trou d'air américain.
D'autant que les acteurs de la filière ont déjà dû faire face à des vents contraires outre-Atlantique ces dernières années. Plombé par la hausse des coûts des matières premières liée au Covid-19, le marché éolien offshore américain avait ainsi connu de lourdes annulations en 2023, avec pas moins de 5,5 GW de contrats résiliés selon Bloomberg NEF, soit un quart des engagements ! De quoi préparer les entreprises européennes à un nouveau passage à vide.
Un risque financier à surveiller
Si l'activité des géants européens de l'éolien ne devrait donc pas trop souffrir d'un éventuel moratoire à la Trump, un impact sur le volet financier n'est cependant pas à exclure. Comme le souligne Mattias Vandenbulcke de France Renouvelables, ce type de déclaration hostile "a un impact direct sur les acteurs financiers, car il indique que la trajectoire de la Maison-Blanche ne sera pas de soutenir ce type d'infrastructure". Une tendance qui pourrait compliquer l'accès à la dette pour les développeurs, prévient-il.
Un risque déjà observé fin 2022 suite à l'élection de Donald Trump, lorsque plusieurs valeurs d'entreprises européennes des énergies renouvelables avaient dévissé en bourse. Les prochains mois nous diront si les acteurs de l'éolien, américains comme européens, parviendront cette fois-ci à garder le cap malgré les bourrasques trumpiennes. Une chose est sûre : au vu de l'urgence climatique, il serait dans l'intérêt de tous que le vent ne tourne pas durablement outre-Atlantique...