Metropolis acquiert Oosto pour 125 M$ et booste sa computer vision
Quand une licorne de la tech met la main sur une pépite controversée de l'IA, cela fait des étincelles. C'est ce qui vient de se produire avec le rachat de la start-up new-yorkaise Oosto, spécialiste de la reconnaissance faciale, par Metropolis. Cette scale-up valorisée près de 5 milliards de dollars est en pleine ascension dans le domaine de la computer vision appliquée aux parkings. Mais que compte faire Metropolis de la technologie pointée du doigt d'Oosto ?
Oosto, un parcours semé d'embûches
Fondée en 2015 sous le nom d'AnyVision, la jeune pousse Oosto a connu un démarrage fulgurant. Sa solution d'analyse vidéo basée sur l'intelligence artificielle séduit rapidement de gros clients. Mais le succès a un prix. En 2019, une enquête révèle qu'AnyVision aide le gouvernement israélien à pister les Palestiniens en Cisjordanie. Microsoft, qui avait investi 74 millions de dollars, retire ses billes. Les critiques sur le non-respect de la vie privée pleuvent.
En 2021, AnyVision lève tout de même 235 millions auprès d'investisseurs de renom comme Bosch et Qualcomm. La start-up en profite pour se renommer Oosto et recentrer son activité sur la reconnaissance faciale pour les entreprises. Malgré des partenariats avec des universités comme Carnegie Mellon, la mayonnaise ne prend pas. Oosto subit des vagues de licenciements et des annulations de contrats. Une sortie de crise s'impose.
Une technologie à double tranchant
Le savoir-faire d'Oosto repose sur une combinaison de caméras intelligentes et d'algorithmes d'IA poussés. Le système est capable d'identifier et de suivre des individus en temps réel, même dans une foule. Un outil puissant, qui soulève de sérieuses questions éthiques :
- Qu'en est-il du consentement des personnes filmées et "marquées" ?
- Comment s'assurer que la technologie ne serve pas à des fins de surveillance de masse ?
- Quelles garanties sur la sécurité et la confidentialité des données récoltées ?
La reconnaissance faciale est un outil à manier avec d'extrêmes précautions. Son usage est très encadré en Europe, avec l'obligation d'obtenir le consentement explicite des personnes. Aux États-Unis en revanche, peu de garde-fous existent pour l'instant, laissant le champ libre aux dérives potentielles.
L'atout Oosto pour doper la computer vision de Metropolis
Avec cette acquisition à 125 millions de dollars, bien en-deçà des sommes levées par Oosto, Metropolis s'offre une technologie de pointe pour améliorer sa plateforme de "vision par ordinateur" dans les parkings. Le groupe développe des solutions pour automatiser le paiement du stationnement et fluidifier l'expérience utilisateur.
La vision par ordinateur va révolutionner la façon dont les gens se garent et dont les parkings sont gérés. En intégrant la technologie d'Oosto, nous allons pouvoir aller encore plus loin.
Alex Israël, PDG et co-fondateur de Metropolis
Concrètement, les algorithmes de reconnaissance faciale pourraient permettre aux clients abonnés d'accéder automatiquement au parking, sans même sortir leur badge ou leur mobile. De quoi générer un gain de temps appréciable. Mais attention à ne pas tomber dans le "surveillance capitalism"...
Quid de la protection des données ?
Si l'ajout de la reconnaissance faciale peut sembler alléchant pour Metropolis, il faudra se montrer vigilant sur la protection de la vie privée des utilisateurs. Le risque de voir ses moindres faits et gestes scrutés par un algorithme n'est pas de nature à rassurer. Surtout quand celui-ci garde en mémoire les images de votre visage pendant plusieurs jours.
Pour éthique soit l'usage de la technologie d'Oosto, Metropolis devra mettre en place des garde-fous solides :
- Recueillir le consentement explicite des clients pour l'analyse de leur visage
- Proposer des alternatives pour ceux qui ne souhaitent pas être "reconnus"
- Limiter strictement la durée de conservation des données biométriques
- Sécuriser l'accès aux images et les chiffrer
- Auditer régulièrement les pratiques pour vérifier leur conformité
Un programme ambitieux, qui demandera de la rigueur et de la transparence. Car c'est la confiance des clients qui est en jeu. À l'heure où les géants de la tech sont dans le viseur des régulateurs sur la protection des données personnelles, Metropolis n'a pas intérêt à se mettre à dos l'opinion publique avec un usage dévoyé de la reconnaissance faciale.
Cap sur une levée de fonds record ?
Malgré ces défis, Metropolis semble en pleine bourre. La scale-up s'apprêterait à boucler un tour de table de plusieurs centaines de millions de dollars, pour porter sa valorisation à près de 5 milliards. De quoi voir venir sereinement et poursuivre sa stratégie de croissance externe.
Si elle parvient à utiliser avec parcimonie et discernement la technologie d'Oosto, tout en rassurant sur ses pratiques éthiques, Metropolis disposera d'un avantage compétitif certain. Mais gare à ne pas se "brûler les ailes" en jouant avec le feu de la reconnaissance faciale. L'avenir nous dira si ce pari à 125 millions de dollars était pertinent ou non.