L’UE met en garde les géants du numérique avant les élections allemandes
À l'approche des élections fédérales allemandes prévues le 23 février prochain, la Commission européenne sonne l'alerte. Elle vient en effet de convoquer les géants du numérique à un "stress test" le 31 janvier, dans le but d'évaluer leurs procédures internes de lutte contre la désinformation. TikTok, X (ex-Twitter), mais aussi Meta, Google, Microsoft ou encore Snapchat sont dans le viseur de Bruxelles. L'enjeu : s'assurer que ces plateformes, dont l'influence sur l'opinion publique n'est plus à démontrer, ne deviennent pas des vecteurs de propagation massive de fausses informations en cette période électorale sensible.
Le DSA, un règlement européen au cœur de la bataille
Adopté en 2022, le Digital Services Act (DSA) constitue le socle réglementaire sur lequel s'appuie la Commission pour imposer ce "stress test" aux acteurs du numérique. Ce texte novateur vise à responsabiliser les grandes plateformes en ligne quant aux contenus qu'elles diffusent et amplifient. Il les contraint notamment à mettre en place des processus pour identifier rapidement et retirer les contenus illégaux ou préjudiciables, parmi lesquels figurent en bonne place les fausses informations.
En activant ce levier réglementaire quelques semaines avant le scrutin allemand, l'exécutif européen envoie un message clair. Il entend bien veiller à ce que le DSA soit appliqué avec sérieux et célérité par les géants du Net, sans leur laisser le temps de trainer les pieds. L'expérience des précédents scrutins, notamment les élections européennes de 2024, a montré qu'une réaction rapide était indispensable pour endiguer la viralité des fake news.
Les réseaux sociaux sous pression
Parmi les entreprises ciblées par ce "stress test", les réseaux sociaux sont particulièrement attendus au tournant. Le rôle joué par Facebook dans la diffusion de fausses informations lors de la présidentielle américaine de 2016 ou le référendum sur le Brexit la même année a marqué les esprits. Depuis, Twitter, TikTok et consorts sont pointés du doigt à chaque échéance électorale majeure.
Pour autant, les efforts déployés ces dernières années par les plateformes pour modérer les contenus et couper les vivres aux "fermes à trolls" ne sont pas passés inaperçus. Sous la pression de l'opinion et des régulateurs, elles ont considérablement musclé leurs dispositifs anti-fake news, entre intelligence artificielle et modération humaine. Reste à savoir si ces garde-fous seront suffisants face à un éventuel raz-de-marée de désinformation.
Un test grandeur nature pour l'Europe
Au-delà du cas allemand, c'est la crédibilité de la régulation européenne des géants du numérique qui se joue dans les prochaines semaines. Premier véritable crash-test pour le DSA, ces élections constitueront un test grandeur nature quant à la capacité de l'UE à faire appliquer ses règles ambitieuses aux mastodontes de la Silicon Valley.
Le 'stress test' suit les scénarios potentiels où le DSA entre en jeu et vérifie avec les plateformes comment elles réagiraient face à ces scénarios spécifiques.
Thomas Regnier, porte-parole de la Commission européenne
Un enjeu d'autant plus crucial que 2024 rimera également avec élections européennes et présidentielle américaine. Deux scrutins majeurs lors desquels les tentatives de manipulation de l'opinion via les réseaux sociaux risquent de se multiplier. En jouant les gendarmes intransigeants dès maintenant, Bruxelles espère créer un précédent et poser les jalons d'une modération renforcée et harmonisée à l'échelle européenne.
Rendez-vous est pris le 31 janvier pour connaître les résultats de ce "stress test" grandeur nature. TikTok a d'ores et déjà confirmé sa participation, tandis que les réponses de Meta, Google, Twitter et les autres sont attendues avec impatience. Une chose est sûre : dans cette bataille cruciale pour la préservation des processus démocratiques, l'Europe a décidé de serrer la vis aux géants du numérique. À eux de prouver qu'ils sont à la hauteur des attentes.