Renault et Geely : Une Alliance Stratégique Innovante
Et si l’avenir de l’automobile ne reposait plus sur des alliances figées, mais sur une mosaïque de partenariats agiles et ciblés ? C’est le pari que semble faire Renault, le géant français, en tissant des liens inédits avec le chinois Geely. Loin des grandes fusions ou des collaborations exclusives, ce choix intrigue et fascine. Annoncé le 17 février 2025, leur accord au Brésil pourrait bien redéfinir la manière dont les constructeurs s’adaptent à un secteur en pleine mutation.
Renault Réinvente sa Stratégie : Plus de Flexibilité, Moins de Dépendance
Depuis l’arrivée de **Luca de Meo** à sa tête en 2021, Renault n’a cessé de surprendre. Exit les schémas traditionnels, place à une approche pragmatique qui mise sur la diversité des alliés. Le constructeur français, autrefois uni dans une alliance étroite avec Nissan, préfère désormais multiplier les collaborations pour rester compétitif face aux géants mondiaux.
Un Tournant Historique avec Geely au Brésil
Le dernier coup d’éclat ? Une coopération stratégique avec Geely, officialisée en février 2025, pour produire des véhicules dans l’usine Ayrton Senna, située à São José dos Pinhais, au Paraná. Ce n’est pas une simple cohabitation : Geely prend une participation dans la filiale locale de Renault, marquant une étape clé dans leur relation. Cette usine, déjà emblématique, devient le théâtre d’une ambition partagée.
Mais ce partenariat ne se limite pas à une poignée de main symbolique. Il ouvre la porte à des synergies plus vastes : plateformes communes, échanges technologiques, voire participations croisées. Une question plane toutefois : jusqu’où ira cette collaboration ?
« Nous voulons un écosystème ouvert pour garantir notre croissance future. »
– Luca de Meo, PDG de Renault
Pourquoi Renault Change de Cap ?
Pour comprendre ce virage, il faut remonter à 2020. Après l’éviction de Carlos Ghosn et une crise financière sans précédent, Renault a dû se réinventer. Le plan « Renaulution » est né dans ce contexte, avec une idée forte : limiter les risques en diversifiant les partenaires plutôt qu’en misant tout sur un seul, comme ce fut le cas avec Nissan.
Le paysage automobile a aussi changé. Entre électrification, coûts prohibitifs des batteries et concurrence chinoise féroce, s’enfermer dans une alliance rigide serait un pari risqué. Renault opte donc pour une stratégie **modulaire**, où chaque collaboration répond à un besoin précis.
Une Philosophie Pragmatique : Collaborer sans S’enfermer
Renault ne se contente pas de Geely. Le groupe s’entoure d’acteurs majeurs comme Qualcomm pour les puces ou Google pour les systèmes d’infodivertissement. Cette approche, moins verticale et plus opportuniste, tranche avec celle de concurrents comme Stellantis, qui investissent massivement dans leurs propres infrastructures.
Dans le domaine des batteries, par exemple, Renault évite les usines géantes au profit de partenariats multiples avec LG, Verkor ou CATL. Résultat ? Une flexibilité accrue et des risques mieux maîtrisés, tant sur le plan industriel que financier.
- Réduction des coûts fixes grâce à des alliances ciblées.
- Optimisation des usines existantes, comme au Brésil.
- Partage des innovations sans dépendance excessive.
Horse Powertrain : Quand Geely Devient un Allié Clé
Un autre exemple frappant de cette stratégie est la création de **Horse Powertrain**, une entité conjointe avec Geely et Aramco en 2024. Dédiée aux moteurs thermiques et hybrides, cette coentreprise ne se limite pas à ses fondateurs : elle vise à fournir d’autres constructeurs, transformant une activité en déclin en levier de croissance.
Avec 17 usines et 5 centres techniques, Horse Powertrain illustre une ambition : rester un acteur incontournable, même dans un monde qui s’électrifie. Geely y trouve son compte, renforçant sa présence hors de Chine, tandis que Renault sécurise ses volumes de production.
Nissan : Une Alliance Redéfinie
Et Nissan dans tout ça ? L’alliance historique n’est pas morte, mais elle a mué. Désormais, elle se concentre sur des projets concrets : en Europe, Nissan produira sa prochaine Micra à Douai, dans une usine Renault. Mitsubishi suit le mouvement avec un SUV assemblé au même endroit. Ces collaborations régionales prouvent que l’entente franco-japonaise reste pertinente, mais sous une forme allégée.
Ce pragmatisme séduit. Nissan et Mitsubishi ont même investi dans **Ampere**, la branche électrique de Renault, chargée de développer des architectures logicielles avancées. Une manière de mutualiser les efforts sans fusionner complètement.
Propriété Intellectuelle : Le Nerf de la Guerre
Un point distingue Renault : sa volonté de conserver la **propriété intellectuelle** dans chaque partenariat. En octobre 2024, Luca de Meo soulignait : « Nous réduisons les coûts et les risques, tout en gardant le contrôle de nos innovations. » Une recette qui semble porter ses fruits, tant sur le plan industriel que boursier.
Pour les investisseurs, cette stratégie crée de la valeur. En un an, Ampere a convaincu par sa capacité à innover sans engloutir des milliards dans des projets incertains.
Un Modèle d’Avenir pour l’Automobile ?
Renault n’est pas un cas isolé. En 2023, AlixPartners recensait 249 partenariats automobiles mondiaux, contre 195 en 2022. Cette accélération traduit une réalité : face à des investissements colossaux (batteries, logiciels, électrification), les constructeurs doivent s’unir pour survivre.
Bank of America le confirme : « Le besoin d’échelle n’a jamais été aussi crucial. » Les fusions avortées, comme celle entre Nissan et Honda, renforcent cette tendance. À terme, les alliances modulaires pourraient devenir la norme.
Les Défis à Relever
Mais cette stratégie n’est pas sans risques. Adrien Brasey, analyste chez AlphaValue, prévient : « Renault doit éviter de se disperser. Les partenariats doivent servir une croissance cohérente. » Avec 2,3 millions de véhicules vendus en 2024, le groupe reste un acteur moyen face aux mastodontes comme Toyota ou Volkswagen.
Autre enjeu : maintenir une identité forte. En multipliant les collaborations, Renault pourrait diluer sa marque. Pourtant, pour l’instant, le marché applaudit cette agilité.
Vers une Nouvelle Ère de Mobilité
En s’alliant à Geely, Renault ne se contente pas de produire au Brésil. Il pose les jalons d’une mobilité plus durable et connectée. Cette approche, mêlant pragmatisme et audace, pourrait inspirer d’autres acteurs. Dans un secteur où l’innovation est reine, Renault prouve qu’on peut rester petit, mais penser grand.
Et vous, que pensez-vous de ce virage ? L’avenir de l’automobile passera-t-il par ces alliances multiples, ou une consolidation massive reste-t-elle inévitable ? Une chose est sûre : Renault écrit un nouveau chapitre, et il est loin d’être terminé.