Guerre Commerciale : Réactions des Start-ups Canadiennes
Et si une simple décision politique pouvait bouleverser tout un écosystème entrepreneurial ? Le 4 mars 2025, les États-Unis ont mis fin à une trêve commerciale de 30 jours avec le Canada, imposant des taxes de 25 % sur presque tous les biens importés et de 10 % sur l’énergie. En réponse, le Canada a riposté avec des tarifs sur 30 milliards de dollars de produits américains, une mesure qui pourrait grimper jusqu’à 155 milliards après consultation. Ce bras de fer commercial a secoué le secteur technologique canadien, déjà sous pression. Mais loin de se résigner, les start-ups du pays réagissent avec audace et ingéniosité.
Une tempête tarifaire qui secoue l’innovation
Le secteur tech canadien, reconnu pour sa résilience et sa créativité, se retrouve aujourd’hui au cœur d’une bataille économique sans précédent. Les leaders de l’industrie, des PDG aux investisseurs, ont immédiatement pris la parole pour dénoncer cette escalade tout en proposant des solutions. Entre coûts en hausse, adaptations logistiques et appels à l’autonomie, les entrepreneurs canadiens oscillent entre défis colossaux et opportunités inattendues.
Une condamnation unanime des tariffs
La réaction des acteurs technologiques canadiens ne s’est pas fait attendre. Le *Technology Councils of North America* (TECNA), qui regroupe près de 60 organisations tech en Amérique du Nord, a souligné que ces taxes pénalisent autant les entreprises américaines que canadiennes. Des hubs comme Communitech, la BC Tech Association ou encore l’Association québécoise des technologies, tous membres de TECNA, partagent cet avis. Pour eux, l’augmentation des coûts opérationnels menace la compétitivité des deux côtés de la frontière.
« Pendant des décennies, notre stratégie commerciale reposait sur une stabilité avec les États-Unis. Cette hypothèse n’est plus valable. »
– Benjamin Bergen, président du Conseil des innovateurs canadiens
Benjamin Bergen, figure influente du *Council of Canadian Innovators* (CCI), pousse pour une réorientation stratégique. Il appelle à soutenir les entreprises locales et à les positionner comme des leaders dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Une vision ambitieuse qui pourrait transformer cette crise en levier de croissance.
Des coûts qui explosent pour les start-ups
Pour beaucoup de jeunes pousses, l’impact des tariffs est immédiat et brutal. Prenons l’exemple de **Healthybud**, une start-up montréalaise spécialisée dans l’alimentation canine haut de gamme. La veille de l’entrée en vigueur des taxes, son PDG, Kyle Feigenbaum, a dû débourser trois fois le prix habituel pour faire passer une cargaison de la Colombie-Britannique à la Californie avant la fermeture des frontières. Un surcoût difficile à absorber pour une entreprise en pleine croissance.
À Vancouver, Matt Bertulli, PDG de **Pela Case**, fabricant de coques de téléphone écologiques, déplore une double punition : les taxes américaines sur leurs exportations et les représailles canadiennes qui renchérissent leurs importations. Une équation complexe qui force ces entrepreneurs à choisir entre augmenter leurs prix ou rogner sur leurs marges.
Les retailers sous pression
Les détaillants, déjà fragilisés par les soubresauts économiques post-COVID, affrontent un nouveau coup dur. Dax Dasilva, PDG de **Lightspeed**, une plateforme de commerce et de points de vente, alerte sur les conséquences pour ce secteur. Après des années de ventes en dents de scie, les retailers espéraient une reprise. Les tariffs viennent anéantir ces espoirs, ajoutant une barrière supplémentaire à leur croissance.
Pour ces entreprises, chaque dollar compte. Les coûts supplémentaires risquent de se répercuter sur les consommateurs, au détriment de leur pouvoir d’achat et, par ricochet, des ventes des start-ups.
Des appels au soutien gouvernemental
Face à ce chaos, les entrepreneurs ne restent pas les bras croisés. Une enquête menée par *Startup Canada* auprès de 195 fondateurs révèle leurs attentes : 42 % réclament un **soutien financier** sous forme de subventions ou d’allégements fiscaux, 32 % veulent des informations claires sur les tariffs, et près d’un quart cherchent de l’aide pour diversifier leurs chaînes d’approvisionnement.
La Fédération canadienne des entreprises indépendantes va plus loin, exigeant du Premier ministre Justin Trudeau un rappel immédiat du Parlement. L’objectif ? S’assurer que chaque dollar collecté via les taxes soit redistribué aux entreprises touchées. Une demande relayée par des figures comme Arlene Dickinson, investisseuse et membre du Conseil Canada-États-Unis, qui promet des programmes d’aide imminents.
Adaptation et résilience : l’exemple de SRTX
Toutes les start-ups ne subissent pas les tariffs de la même manière. **SRTX**, basée à Montréal et connue pour ses collants Sheertex, a dû licencier temporairement 40 % de son personnel en prévision des taxes. Grâce à une clause de l’accord États-Unis-Mexique-Canada, l’entreprise a pivoté vers des matériaux sourcés aux États-Unis pour contourner des droits de douane pouvant atteindre 41 %. Une décision stratégique, mais coûteuse.
La PDG, Katherine Homuth, a aussi bénéficié d’un répit inattendu : la préservation temporaire de l’exemption *de minimis*, qui permet aux envois de moins de 800 $ d’entrer aux États-Unis sans frais. Une bouffée d’oxygène pour les ventes directes aux consommateurs, mais qui pourrait s’évanouir si les États-Unis changent leurs règles.
Un élan patriotique pour sauver la mise
Si les tariffs frappent fort, ils réveillent aussi un sentiment d’unité. Depuis les premières menaces américaines, les initiatives pour promouvoir les produits canadiens se multiplient. Des bases de données et applications mobiles, comme des scanners de produits locaux, voient le jour pour guider les consommateurs vers des achats patriotes.
**Tre’Dish**, une plateforme d’épicerie en ligne basée à Toronto, illustre ce mouvement. Son PDG, Peter Hwang, rapporte que 70 % des produits vendus sur son site sont désormais fabriqués au Canada, grâce à une vague d’inscriptions d’entreprises locales. De son côté, SRTX a vu Costco Canada commander en masse pour écouler des stocks initialement destinés aux États-Unis.
Vers une nouvelle ère pour la tech canadienne ?
Cette guerre commerciale, bien qu’imposante, pourrait marquer un tournant. En forçant les start-ups à repenser leurs modèles, elle ouvre la voie à une autonomie accrue. Réduire la dépendance aux États-Unis, diversifier les marchés, investir dans l’innovation locale : les idées fusent pour transformer ce revers en tremplin.
Pour y parvenir, le rôle du gouvernement sera crucial. Les entrepreneurs attendent des mesures concrètes, rapides et adaptées. Mais une chose est sûre : la résilience des start-ups canadiennes, forgée dans l’adversité, pourrait bien écrire le prochain chapitre de leur succès.
Et vous, pensez-vous que cette crise révélera le meilleur de l’innovation canadienne ? Les mois à venir seront décisifs.