Les Femmes Inventrices en France : Un Défi d’Équité
Imaginez un laboratoire bouillonnant d’idées, où des esprits brillants façonnent l’avenir. Maintenant, posez-vous cette question : combien de ces cerveaux innovants sont féminins ? Selon une étude récente de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi), les femmes ne représentent que 14 % des inventeurs dans les brevets déposés en France entre 2021 et 2023. Un chiffre qui interpelle, dans un pays où l’innovation est une fierté nationale. Ce déséquilibre ne se limite pas à une statistique : il reflète des barrières culturelles, structurelles et économiques qui freinent la participation des femmes à la création technologique.
Une Sous-représentation Criante dans l’Innovation
L’innovation, c’est l’art de transformer une idée en solution concrète. Mais en France, cet art reste largement dominé par les hommes. L’Inpi, dans son rapport publié le 5 mars 2025, dresse un tableau sans appel : sur plus de 35 000 demandes de brevets examinées, seules 4 % proviennent d’inventrices seules ou d’équipes exclusivement féminines. À l’opposé, les hommes, seuls ou en groupes homogènes, trustent 78 % des dépôts. Ce fossé n’est pas anodin : il amplifie les inégalités, notamment salariales, comme le souligne l’Inpi.
Les Entreprises Privées : Lanterne Rouge de la Parité
Quand on zoome sur le secteur privé, les chiffres ne s’améliorent guère. Les petites et moyennes entreprises (PME) affichent un maigre 9 % de femmes parmi leurs inventeurs brevetés. Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) font à peine mieux avec 8,8 %, tandis que les grands groupes atteignent péniblement 10,7 %. À titre de comparaison, les établissements publics et entreprises d’État se distinguent avec 16,1 % de femmes inventrices. Une différence notable, mais encore loin de la parité.
Et les équipes 100 % féminines ? Elles sont quasi inexistantes. Dans les PME, elles représentent 3,3 % des demandes, 3,2 % dans les ETI et 3,1 % dans les grands groupes. Même les structures publiques, malgré un effort louable avec 35 % d’équipes mixtes, plafonnent à 2,6 % d’inventrices seules. Ces chiffres révèlent une réalité : la mixité reste une exception, pas la norme.
C’est un facteur aggravant les inégalités salariales entre hommes et femmes.
– Institut national de la propriété industrielle (Inpi)
Des Disparités Selon les Secteurs Technologiques
Tous les domaines ne sont pas égaux face à cette sous-représentation. La chimie se démarque avec 28,3 % des brevets incluant au moins une femme. Mais ce n’est qu’une éclaircie dans un ciel bien sombre : l’électrotechnique chute à 8,1 % et la mécanique s’effondre à 6,3 %. Ces écarts ne sont pas anodins : ils traduisent des stéréotypes tenaces et un accès inégal aux filières techniques.
En creusant plus loin, certains sous-domaines sortent du lot. La biotechnologie, par exemple, brille avec 56 % d’équipes mixtes, suivie par les produits pharmaceutiques (54 %) et l’analyse des matériaux biologiques (47 %). À l’inverse, des secteurs comme les techniques audiovisuelles (91,8 % d’hommes), les éléments mécaniques (89,9 %) ou le génie civil (89 %) restent des bastions masculins presque impénétrables.
Pourquoi Cette Fracture Persiste-t-elle ?
Derrière ces chiffres, il y a des causes profondes. D’abord, l’accès aux études scientifiques reste genré. Les femmes, bien qu’en progression dans les filières STEM (Science, Technology, Engineering, Mathematics), sont encore minoritaires. Ensuite, les environnements de travail, souvent masculins, peuvent décourager les talents féminins. Enfin, le manque de modèles inspire peu les jeunes femmes à se lancer dans l’invention.
Pourtant, des initiatives existent. Certaines start-ups, notamment dans la biotech, misent sur la diversité pour booster leur créativité. Mais ces efforts restent isolés. L’Inpi le souligne : sans un changement systémique, la parité dans l’innovation restera un vœu pieux.
Biotechnologie : Une Lueur d’Espoir
Si un secteur donne de l’espoir, c’est bien la biotechnologie. Avec plus de la moitié de ses équipes mixtes, elle prouve que l’innovation peut rimer avec diversité. Pourquoi ce succès ? Les femmes y sont plus nombreuses à des postes de recherche, et les projets, souvent collaboratifs, favorisent les synergies. Résultat : des brevets qui reflètent une pluralité de regards.
Cela dit, même ici, les inventrices seules restent rares. La mixité progresse, mais elle ne remplace pas une vraie reconnaissance des talents féminins individuels. C’est un pas, pas une victoire.
Les Start-ups, Actrices du Changement ?
Les start-ups pourraient être le fer de lance d’une révolution. Agiles et ouvertes aux idées neuves, elles ont le potentiel pour bousculer les codes. Pourtant, les chiffres de l’Inpi montrent qu’elles ne font pas mieux que les grandes entreprises. Pourquoi ? Souvent, elles reproduisent les mêmes schémas : équipes majoritairement masculines et focus sur des secteurs techniques traditionnels.
Mais tout n’est pas perdu. Certaines jeunes pousses, notamment dans la santé et la biotech, intègrent la parité comme un atout stratégique. Elles attirent des talents diversifiés et déposent des brevets qui reflètent cette richesse. Un modèle à suivre ? Peut-être, si les investisseurs et les politiques suivent le mouvement.
Que Faire pour Rééquilibrer la Balance ?
Changer la donne demande des actions concrètes. Voici quelques pistes :
- Encourager les filles dans les filières scientifiques dès le plus jeune âge.
- Soutenir les inventrices avec des financements dédiés.
- Valoriser les modèles féminins dans l’innovation.
Les entreprises, elles, doivent revoir leurs pratiques. Recruter plus de femmes, promouvoir la mixité dans les équipes R&D et briser les plafonds de verre : autant de leviers pour avancer. L’État, enfin, pourrait jouer un rôle clé avec des incitations fiscales ou des quotas dans les dépôts de brevets publics.
Un Enjeu d’Avenir pour la France
L’innovation est le moteur de demain. Mais un moteur qui tourne à moitié de sa capacité est-il vraiment efficace ? En excluant les femmes, la France se prive de talents précieux. L’étude de l’Inpi n’est pas qu’un constat : c’est un appel à l’action. Start-ups, grands groupes, pouvoirs publics : tous ont un rôle à jouer.
Et si la prochaine grande invention française venait d’une femme ? Pour que cela arrive, il faut ouvrir les portes, aujourd’hui. Car, comme le dit si bien le slogan de l’Inpi : Demain se fabrique aujourd’hui.