Alice Leprévost : Souder pour Briller dans le Nucléaire
Imaginez une jeune femme, bac en poche, hésitant sur son avenir, poussée vers des métiers dits « féminins » comme la coiffure, mais qui, par un coup du destin, découvre une passion incandescente pour la soudure nucléaire. C’est l’histoire d’Alice Leprévost, une soudeuse de 30 ans chez Orano Temis, dans le Cotentin, qui a su transformer un choix audacieux en une carrière brillante. Son parcours, récompensé par le Trophée des Femmes de l’Industrie 2025 dans la catégorie Femme au début prometteur, est une ode à la détermination et à l’émancipation par le travail manuel. Mais comment une ancienne secrétaire médicale est-elle devenue une figure inspirante du nucléaire ?
De l’Hésitation à la Flamme de la Soudure
Il y a dix ans, rien ne prédestinait Alice Leprévost à manier le chalumeau avec une précision chirurgicale. Après un baccalauréat, elle se retrouve orientée vers une formation de secrétaire médicale, un choix par défaut qui ne correspond pas à son envie de métiers manuels. « On me poussait vers des filières très stéréotypées, mais je voulais autre chose, quelque chose de concret », confie-t-elle. C’est en tombant sur un article évoquant la pénurie de soudeurs dans sa région qu’elle décide, sur un coup de tête, de se lancer dans une formation en soudure en 2019.
Ce saut dans l’inconnu marque le début d’une transformation. Chez Orano, elle trouve un environnement exigeant mais stimulant, où chaque soudure est un défi technique. Travaillant sur des matériaux comme l’Inox, l’Inconel ou le Zircaloy, elle fabrique des pièces essentielles pour l’usine de La Hague, dédiée au traitement des combustibles nucléaires usés. Ce métier, loin des clichés, lui offre un terrain pour s’affirmer et briller.
Un Métier Technique, une Quête d’Excellence
La soudure nucléaire n’est pas un métier ordinaire. Chaque geste compte, chaque pièce doit répondre à des normes draconiennes. Alice, de nature réservée, y voit une opportunité de prouver sa valeur. « Dans un atelier majoritairement masculin, il fallait montrer que j’avais ma place », explique-t-elle. Elle se fixe un objectif : devenir la meilleure. Cette ambition la pousse à perfectionner sa technique, à maîtriser des procédés complexes et à gagner la confiance de ses collègues.
« Ce métier m’a changée. J’ai découvert une passion qui m’a donné confiance en moi. »
– Alice Leprévost, soudeuse chez Orano Temis
Sa quête d’excellence ne s’arrête pas à l’atelier. En dehors de ses heures de travail, Alice explore sa créativité en réalisant des œuvres mêlant métal et bois flotté. Cette double vie illustre sa capacité à transformer une contrainte technique en une forme d’art, une démarche qui inspire ses collègues et les jeunes générations.
Le Nucléaire, un Pilier de la Transition Écologique
Travailler dans le nucléaire, c’est aussi contribuer à une énergie faible en carbone, un atout majeur dans la lutte contre le changement climatique. Alice en est consciente et défend cette filière souvent mal comprise. « Le nucléaire est une solution concrète pour réduire les émissions de CO2 », souligne-t-elle. Elle complète cette vision par des gestes simples au quotidien : tri des déchets, consommation raisonnée, achat local. Pour elle, chaque action compte.
Voici quelques chiffres qui illustrent l’impact du nucléaire dans la transition énergétique :
- Le nucléaire représente environ 70 % de l’électricité bas carbone en France.
- Une centrale nucléaire émet environ 12 g de CO2 par kWh, contre 800 g pour le charbon.
- La filière nucléaire française emploie plus de 220 000 personnes, dont une part croissante de femmes.
Ces données montrent que le secteur, souvent perçu comme technique et fermé, est en réalité un moteur d’innovation et d’emploi, où des profils comme celui d’Alice trouvent leur place.
Inspirer les Nouvelles Générations
Alice ne se contente pas de souder des pièces ; elle veut souder des vocations. En partageant son parcours, elle espère encourager d’autres femmes à rejoindre des métiers techniques. « Ces métiers sont accessibles à tous, il suffit d’avoir la passion et la persévérance », affirme-t-elle. Son histoire résonne dans un contexte où l’industrie française manque cruellement de soudeurs : on estime un besoin de 10 000 soudeurs supplémentaires d’ici 2030 pour répondre aux besoins des secteurs nucléaire, aéronautique et naval.
Pour attirer ces talents, Alice propose des solutions concrètes :
- Renforcer les campagnes de sensibilisation dans les écoles.
- Proposer des formations courtes et accessibles, comme celle qu’elle a suivie.
- Valoriser les parcours féminins dans l’industrie pour briser les stéréotypes.
Son engagement ne passe pas inaperçu. Lors de la cérémonie des Trophées des Femmes de l’Industrie 2025, organisée par L’Usine Nouvelle, Alice a été saluée pour son parcours fulgurant et son rôle de modèle. Elle incarne une nouvelle génération de professionnels qui allient technicité, passion et responsabilité écologique.
Un Avenir à Forger
À 30 ans, Alice Leprévost ne compte pas s’arrêter là. Elle ambitionne de transmettre son savoir, peut-être en formant de jeunes soudeuses, et de continuer à repousser les limites de son métier. « Je veux montrer que la soudure, c’est plus qu’un travail, c’est une façon de s’exprimer », dit-elle avec conviction. Son histoire est une invitation à oser, à se réinventer et à embrasser des carrières qui sortent des sentiers battus.
« La soudure m’a appris à me dépasser. C’est un métier où chaque jour est une nouvelle épreuve, mais aussi une nouvelle victoire. »
– Alice Leprévost, soudeuse chez Orano Temis
Dans un monde où l’industrie se réinvente pour répondre aux défis écologiques et sociaux, des profils comme celui d’Alice sont précieux. Ils rappellent que l’innovation ne vient pas seulement des technologies, mais aussi des parcours humains qui redéfinissent les métiers de demain. Alors, qui sera la prochaine à prendre le chalumeau pour façonner l’avenir ?