Robotaxis Uber-WeRide Sans Chauffeur à Abu Dhabi

Vous êtes à Abu Dhabi, il fait nuit, les lumières du circuit de Yas Island scintillent au loin. Vous ouvrez l’application Uber, vous commandez une course… et quelques minutes plus tard, une berline flambant neuve s’arrête devant vous. La portière s’ouvre toute seule. Il n’y a personne au volant. Bienvenue dans le futur, et il est déjà là.

Le 25 novembre 2025, Uber et la startup chinoise WeRide ont franché un cap historique : leur service de robotaxis à Abu Dhabi est officiellement devenu 100 % sans chauffeur. Plus de safety driver, plus de volant qui tourne tout seul sous la surveillance d’un humain. Juste vous, la route et une intelligence artificielle qui maîtrise parfaitement les rues de la capitale émiratie.

Abu Dhabi, nouveau laboratoire mondial de la voiture autonome

Pourquoi Abu Dhabi ? La réponse tient en trois mots : régulation favorable, infrastructures modernes et ambition démesurée. Les Émirats Arabes Unis ont accordé à WeRide, dès octobre 2025, le premier permis fédéral du pays pour opérer des robotaxis commerciaux totalement autonomes. Un feu vert qui a permis de passer immédiatement à l’action.

Le déploiement commence modestement – ou presque – sur Yas Island, ce quartier touristique ultra-moderne qui accueille chaque année le Grand Prix de Formule 1. Mais l’objectif est clair : étendre rapidement le service au centre-ville d’Abu Dhabi, puis à Dubaï et bien au-delà.

« Le lancement entièrement autonome d’aujourd’hui à Abu Dhabi représente une étape historique dans les transports, la première implantation de véhicules autonomes sans chauffeur hors des États-Unis ou de la Chine. »

– Sarfraz Maredia, responsable mobilité autonome chez Uber

Comment ça marche concrètement ?

Pour le passager, l’expérience reste familière… en surface. Vous réservez comme d’habitude un UberX ou Uber Comfort. L’algorithme peut alors vous attribuer un véhicule WeRide. Si vous voulez être sûr de tomber sur un robotaxi, une option « Autonome » a été ajoutée dans l’application.

À bord, plus de siège conducteur occupé. L’habitacle est épuré, les écrans diffusent des informations sur le trajet et, bien sûr, la traditionnelle musique d’attente Uber a été conservée – histoire de ne pas trop dépayser les clients.

• Pas de volant qui bouge tout seul (il est souvent escamotable)
• Portières et coffre qui s’ouvrent automatiquement
• Support client dédié en cas de problème (bouton d’urgence bien visible)
• Caméras 360° et lidars discrets mais omniprésents

WeRide, l’outsider chinois qui monte en puissance

Derrière cette petite révolution se cache WeRide, une entreprise fondée en 2017 à Guangzhou qui a su se faire une place parmi les géants. Moins médiatisée que Waymo ou Cruise aux États-Unis, ou que Baidu en Chine, elle n’en est pas moins redoutablement efficace.

La société a déjà déployé plus de 150 robotaxis dans la région Moyen-Orient et compte bien passer à plusieurs milliers dans les années à venir. Son partenariat stratégique avec Uber, noué il y a deux ans, lui donne une visibilité mondiale que peu de concurrents possèdent.

Et ce n’est pas un partenariat isolé. Uber a signé ces dernières années avec une vingtaine de constructeurs et de startups autonomes : Waymo, May Mobility, Pony.ai, Momenta, Lucid-Nuro… Une stratégie de « plateforme ouverte » qui contraste avec l’approche fermée de Tesla ou Cruise.

Pourquoi cette stratégie change tout

Dara Khosrowshahi, le PDG d’Uber, l’a répété lors de la dernière présentation des résultats : l’entreprise veut être présente dans au moins dix villes avec des véhicules autonomes d’ici fin 2026. Abu Dhabi n’est qu’un début. Austin avec Waymo, Phoenix, San Francisco… et bientôt Atlanta, Dallas, et plusieurs capitales européennes.

En misant sur plusieurs technologies plutôt qu’une seule, Uber limite les risques. Si un partenaire rencontre des difficultés (comme Cruise après son accident en 2023), les autres prennent le relais. C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui.

Et la sécurité dans tout ça ?

C’est la question que tout le monde se pose. WeRide revendique plus d’un million de kilomètres parcourus en mode totalement autonome à Abu Dhabi sans incident majeur. Les véhicules sont équipés de redondances multiples : plusieurs lidars, radars, caméras, et même un système de freinage d’urgence indépendant.

Le climat désertique, les routes larges et bien entretenues, ainsi que la conduite globalement disciplinée des Émirats jouent aussi en faveur de la sécurité. Ce n’est pas un hasard si les premiers déploiements commerciaux massifs hors USA/Chine ont lieu ici plutôt qu’à Paris ou Mumbai.

Vers une nouvelle ère de la mobilité urbaine

Ce qui se passe à Abu Dhabi n’est pas un simple gadget technologique. C’est l’annonce d’une transformation profonde de nos villes. Des flottes de robotaxis pourraient, à terme :

• Réduire drastiquement le nombre de voitures personnelles
• Libérer des dizaines de milliers de places de parking
• Baisser le coût du transport (un robotaxi coûte moins cher à faire rouler qu’un chauffeur)
• Diminuer les émissions si les flottes passent à l’électrique (ce qui est déjà le cas chez WeRide)

Dans le Golfe, où la voiture individuelle règne encore en maître, l’arrivée des robotaxis pourrait accélérer la transition vers des modèles de mobilité partagée. Et si demain votre voiture dormait dans un parking robotisé à la périphérie pendant que vous vous déplacez en flotte autonome ?

Les prochains chapitres

Uber et WeRide parlent déjà d’une expansion à quinze villes en Europe et au Moyen-Orient. Dubaï est dans le viseur pour 2026. Des discussions avancées auraient lieu avec l’Arabie Saoudite dans le cadre du projet Neom.

En parallèle, la concurrence s’organise. Tesla promet toujours ses Robotaxi pour « l’année prochaine », Waymo étend ses zones à Los Angeles et Austin, et les constructeurs traditionnels (Volkswagen avec Mobileye, Stellantis avec Waymo) préparent leurs propres flottes.

Mais aujourd’hui, c’est bien à Abu Dhabi que l’histoire s’écrit. Une ville qui, il y a vingt ans, n’était encore que dunes et projets fous, devient le premier endroit au monde où n’importe qui peut héler un taxi sans chauffeur, simplement en levant le pouce… ou plutôt en ouvrant son application.

Le futur de la mobilité ne se passe plus seulement dans la Silicon Valley ou à Shenzhen. Il a aussi pris ses quartiers sous le soleil du Golfe.