Slate Auto : 150 000 Réservations pour son Pick-up Électrique Abordable

Imaginez un pick-up électrique vendu autour de 25 000 dollars, conçu dès le départ pour la batterie et non adapté d’un modèle thermique. Dans un marché où même les géants comme Ford jettent l’éponge sur leurs trucks 100 % électriques, une jeune pousse américaine fait sensation : Slate Auto vient de franchir la barre symbolique des 150 000 réservations remboursables. Un chiffre impressionnant qui interroge : simple effet d’annonce ou véritable appétit pour une offre vraiment différente ?

Une ascension fulgurante dans un secteur en pleine turbulence

Depuis sa sortie de l’ombre en mai 2025, Slate Auto ne cesse de faire grimper la curiosité. À peine sept mois plus tard, la barre des 150 000 réservations est atteinte. Ce n’est pas une mince affaire quand on sait que le marché des pick-ups électriques traverse l’une de ses phases les plus compliquées. Les ventes peinent, les annonces de fin de production se multiplient et les consommateurs semblent hésiter face aux prix encore élevés et aux infrastructures de recharge parfois limitées.

Pourtant, Slate Auto semble nager à contre-courant. La société vient de publier une vidéo Q&A avec sa PDG Chris Barman, dans laquelle elle répond directement aux interrogations des futurs clients. Pas d’autonomie Level 4 ou 5 à l’horizon, pas de promesses futuristes démesurées : l’entreprise mise sur la simplicité, la robustesse et surtout un prix agressif. Un positionnement qui semble porter ses fruits.

Un marché des trucks électriques en difficulté

Le timing est presque ironique. La veille de l’annonce des 150 000 réservations, Ford révélait l’arrêt de la production de son F-150 Lightning 100 % électrique. Le pionnier américain du segment, pourtant arrivé en premier sur le marché, n’a jamais réussi à dépasser quelques milliers d’unités par trimestre. Résultat : des pertes financières importantes et un virage stratégique vers une version hybride équipée d’un générateur thermique.

Chez Tesla, le Cybertruck continue de diviser. Malgré un design clivant et une communication massive, les volumes restent modestes. Même constat du côté de General Motors avec le Silverado EV : les carnets de commandes ne se remplissent pas aussi vite qu’espéré. Dans ce contexte morose, l’arrivée d’un nouvel acteur qui promet un véhicule à un tarif deux fois inférieur à la concurrence attire forcément l’attention.

Le Lightning n’était tout simplement pas rentable. Nous avons appris beaucoup, mais le marché n’est pas encore prêt pour un pick-up full électrique à ce prix.

– Porte-parole Ford, décembre 2025

Cette citation illustre bien le fossé qui sépare les ambitions initiales et la réalité économique. Slate Auto, en revanche, semble avoir intégré ces leçons dès la conception.

Un produit pensé pour être électrique de A à Z

L’un des principaux reproches faits aux pick-ups électriques actuels concerne leur origine : la plupart sont des adaptations de plateformes thermiques existantes. Batteries lourdes, moteurs électriques greffés, architecture non optimisée… le résultat est souvent un véhicule plus cher et moins efficient qu’espéré. Slate Auto a fait le choix inverse : tout est construit autour de la propulsion électrique.

Le design minimaliste, la réduction du nombre de pièces complexes, l’utilisation de matériaux intelligents : chaque détail vise à faire baisser les coûts de production tout en préservant une vraie capacité utilitaire. La promesse d’un prix final situé dans la fourchette des 25 000 à 30 000 dollars (selon les options) place ce futur modèle dans une catégorie presque inexistante aujourd’hui : celle du pick-up électrique réellement accessible.

Autre point fort mis en avant par la direction : la future usine de Varsovie, dans l’Indiana. Un site industriel en cours de rénovation qui devrait permettre de produire jusqu’à 150 000 unités par an une fois les chaînes lancées fin 2026. Si la demande suit, Slate pourrait rapidement devenir un acteur incontournable du segment.

Que répond la PDG aux futurs clients ?

Dans la récente vidéo Q&A, Chris Barman a balayé plusieurs interrogations récurrentes :

• Pas de conduite autonome prévue dans les premières versions ; l’accent est mis sur la fiabilité mécanique plutôt que sur les technologies coûteuses.
• Les sièges arrière optionnels sont bien compatibles avec les sièges-auto enfants, un détail rassurant pour les familles.
• La société reste focalisée sur le marché nord-américain dans un premier temps, avec une priorité claire : livrer les premiers clients fin 2026 comme promis.

Ces réponses directes et sans langue de bois contribuent à bâtir une relation de confiance avec une communauté de réservataires déjà très engagée.

Les défis qui attendent Slate Auto

Malgré cet enthousiasme, rien n’est encore gagné. Transformer 150 000 réservations en autant de livraisons reste l’un des plus grands défis de l’histoire récente de l’automobile électrique. De nombreux concurrents s’y sont cassé les dents : problèmes d’approvisionnement en batteries, retards industriels, inflation des coûts de matières premières… la liste des obstacles est longue.

De plus, Slate devra affronter l’arrivée probable de pick-ups électriques low-cost chez les constructeurs historiques. Ford a déjà annoncé travailler sur un modèle plus abordable pour 2027. Si ce projet voit le jour, la fenêtre d’opportunité pourrait se refermer rapidement pour les nouveaux entrants.

Enfin, la question du financement reste centrale. Même avec le soutien discret de Jeff Bezos, construire une usine, homologuer un véhicule et lancer la production à grande échelle nécessite des centaines de millions de dollars. Chaque trimestre supplémentaire sans revenus risque de peser lourd sur la trésorerie.

Un symbole d’espoir pour la mobilité électrique accessible ?

Si Slate Auto parvient à tenir ses engagements, elle pourrait bien redéfinir le segment des pick-ups électriques. En misant sur un prix bas, une conception optimisée et une communication transparente, la startup montre qu’il est possible de rendre la mobilité zéro émission désirable pour un public beaucoup plus large que les early adopters fortunés.

Dans un pays où le pick-up reste un symbole culturel fort, démocratiser sa version électrique pourrait accélérer la transition énergétique bien plus efficacement que des modèles à 80 000 dollars. À condition, bien sûr, que la machine industrielle suive.

Pour l’instant, les 150 000 réservations constituent un signal fort. Elles prouvent qu’une partie du public est prête à parier sur une nouvelle proposition, plus pragmatique, plus abordable. Reste à voir si Slate Auto saura transformer cet engouement en réalité sur les routes américaines d’ici fin 2026.

Le pari est audacieux, les obstacles nombreux, mais l’histoire de l’innovation automobile a déjà prouvé que les outsiders pouvaient parfois bousculer les géants. Slate Auto sera-t-elle le prochain ? Les prochains mois seront décisifs.