Le Naufrage De Fisker : L’Échec D’un Visionnaire De L’Automobile Électrique
L'industrie automobile est un secteur impitoyable où seuls les plus forts et les plus innovants survivent. Malgré des débuts prometteurs, le constructeur de véhicules électriques Fisker n'a pas réussi à tirer son épingle du jeu. Fondée en 2007 par le designer automobile Henrik Fisker, la startup californienne avait pour ambition de révolutionner le marché avec des modèles électriques premium et innovants. Mais après des années de promesses non tenues, de retards et de problèmes de qualité, Fisker s'est finalement effondré en 2023, laissant derrière lui des milliers d'employés sur le carreau et des investisseurs floués.
L'ascension fulgurante d'un visionnaire de l'automobile
Henrik Fisker n'est pas un inconnu dans le monde automobile. Ancien designer chez BMW et Aston Martin, il est notamment l'auteur des lignes de la BMW Z8 et de l'Aston Martin DB9. Fort de cette expérience, il décide de se lancer dans l'aventure entrepreneuriale en 2007 en fondant Fisker Automotive. Son objectif est clair : proposer des véhicules électriques haut de gamme au design unique, capables de rivaliser avec Tesla.
Le premier modèle de la marque, la Fisker Karma, est dévoilé en 2008. Cette berline de luxe est équipée d'un moteur électrique et d'un moteur essence qui sert de générateur, un concept hybride plug-in novateur pour l'époque. Avec ses lignes fluides et son intérieur raffiné utilisant des matériaux durables, la Karma séduit la presse spécialisée. Fisker réussit même à attirer des investisseurs de renom comme le fonds souverain du Qatar.
Une production semée d'embûches
Mais les choses se compliquent lorsque Fisker passe à la phase de production. Alors qu'il avait promis de commercialiser la Karma dès 2009, les premières livraisons ne débutent finalement qu'en 2011. Et les acheteurs déchantent rapidement en découvrant un véhicule truffé de défauts : problèmes de batterie, de système informatique, de finition... Henrik Fisker reconnaîtra plus tard avoir précipité le lancement, au détriment de la qualité.
Nous avons probablement mis la Karma sur le marché un an trop tôt. Nous aurions dû attendre d'avoir éliminé tous les problèmes.
– Henrik Fisker dans une interview à Forbes en 2013
Les ventes ne décollent pas et les coûts de production s'avèrent plus élevés que prévu, mettant Fisker dans une situation financière délicate. Pour ne rien arranger, l'entreprise perd son principal fournisseur de batteries, A123 Systems, qui fait faillite en 2012. Fisker doit rappeler la majorité des Karma produites.
Des projets fumeux et des promesses non tenues
Malgré ces revers, Henrik Fisker continue de faire de grandes promesses. Il annonce le développement de nouveaux modèles révolutionnaires : un SUV électrique, l'Ocean, une berline autonome, la Orbit, ou encore un pickup électrique, appelé Alaska. Mais aucun de ces projets ne verra le jour. Fisker peine à trouver de nouveaux investisseurs et ne dispose plus des fonds nécessaires pour mener à bien ses développements.
En interne, l'ambiance se dégrade. Selon d'anciens employés interrogés par le site The Verge, Henrik Fisker est un homme difficile, refusant d'écouter les mises en garde de ses équipes. Il est accusé de prioriser le design au détriment de l'ingénierie. Sa femme Geeta, qui occupe un rôle de dirigeante, est aussi pointée du doigt pour son management brutal.
Henrik est un designer extraordinaire, probablement l'un des meilleurs au monde. Mais il n'a aucune idée de comment produire une voiture à un coût abordable.
– Un ancien ingénieur de Fisker cité par The Verge
La chute et la faillite
Confronté à des pertes abyssales et des promesses non tenues, Fisker annonce son dépôt de bilan en novembre 2023. C'est un coup dur pour l'industrie automobile électrique, qui perd l'un de ses pionniers. Mais de nombreux observateurs estiment que cette faillite était prévisible, compte tenu de la gestion calamiteuse de l'entreprise.
Henrik Fisker a eu des tonnes d'idées, mais il n'a pas su créer une entreprise automobile viable. Trop de projets fumeux, pas assez de concret. Il a brûlé des centaines de millions de dollars en promesses non tenues, analyse un expert du secteur. Tesla a mis des années à devenir rentable, mais au moins ils ont livré des voitures qui fonctionnent.
L'aventure Fisker laisse un goût amer et de nombreuses questions en suspens. Comment une entreprise si prometteuse a-t-elle pu échouer à ce point ? Henrik Fisker pourra-t-il rebondir après ce naufrage ? Une chose est sûre : dans le monde impitoyable de l'automobile, il ne suffit pas d'être visionnaire, il faut aussi savoir tenir ses promesses et gérer sainement son entreprise. Un défi que Fisker n'a pas su relever.