L’avenir de la bioéconomie en question après Metabolic Explorer
Alors que le groupe Avril s'apprête à reprendre l'usine Metex Nøøvistago d'Amiens, fleuron de la production de lysine par voie de fermentation en Europe, l'avenir des activités de R&D de Metabolic Explorer apparaît plus incertain que jamais. Cette offre de reprise, déposée conjointement avec le fonds SPI de Bpifrance, prévoit de sauvegarder le site industriel et une trentaine de postes liés à la R&D. Mais qu'adviendra-t-il du cœur de métier de Metex, la biotechnologie ?
La R&D, grande oubliée du feuilleton Metabolic Explorer
Société de biotechnologie industrielle, Metabolic Explorer avait pour ambition de produire des molécules biosourcées grâce à des procédés de fermentation innovants, afin d'aider l'industrie chimique à réduire sa dépendance aux ressources fossiles. Outre son unité de lysine à Amiens, l'entreprise disposait de deux plateformes de R&D à Saint-Beauzire (Puy-de-Dôme) et Carling Saint-Avold (Moselle).
La première, Metex Altanøøv, devait développer une nouvelle technologie par an, tandis que la seconde, Metex Nøøvista, produisait à l'échelle industrielle de l'acide butyrique et du 1,3-propanediol, deux produits phares de Metabolic Explorer. Mais aujourd'hui, seuls 30 postes sur 80 seraient repris à Saint-Beauzire, et l'unité de Carling fait l'objet d'une offre de reprise par Maash, qui prévoit de changer une partie des productions.
Si plus de 300 postes et des installations industrielles sont en passe d'être sauvés, que restera-t-il de la technologie de Metabolic Explorer ?
– Françoise de Vaugelas, Formule Verte
Un projet ambitieux de décarbonation de la chimie
L'acquisition du site d'Amiens en 2021 devait permettre à Metabolic Explorer d'accélérer l'industrialisation de ses procédés biotechnologiques. Le groupe prévoyait ainsi de faire passer la part des produits de spécialité de 20% à 60% sur ce site en 2022-2023, notamment grâce à la production d'acide glycolique.
Ce projet ambitieux de montée en gamme et de décarbonation du secteur de la chimie semble aujourd'hui plus compromis que jamais. Avec une R&D amputée et recentrée sur les besoins de l'usine d'Amiens, Metabolic Explorer risque de perdre une grande partie de son savoir-faire en biotechnologie industrielle.
Quel avenir pour la bioéconomie française ?
Au-delà du cas de Metabolic Explorer, c'est toute la filière de la bioéconomie française qui pourrait pâtir de ce recentrage sur la production. Les startups et PME de biotechnologie industrielle ont besoin d'un écosystème de recherche dynamique pour se développer et attirer des investissements.
Sans une politique volontariste de soutien à l'innovation dans ce domaine, la France risque de prendre du retard sur ses voisins européens et de manquer le virage de la décarbonation de l'industrie chimique. Les pouvoirs publics sauront-ils entendre cet avertissement et donner un nouvel élan à la bioéconomie nationale ?
- La reprise des actifs de Metabolic Explorer laisse sa R&D en suspens
- Le savoir-faire biotechnologique de l'entreprise apparaît menacé
- Un recentrage qui pourrait pénaliser toute la bioéconomie française