Les pâtes made in France, nouvel atout de la souveraineté alimentaire

Qui n'a jamais rêvé de déguster un plat de pâtes 100% français, de la semence de blé dur jusqu'à l'assiette ? C'est le pari des industriels tricolores comme Panzani et Alpina Savoie, bien décidés à relocaliser la production de cet aliment incontournable. Car si la France est le 2e consommateur de pâtes en Europe, elle a vu sa production nationale s'effriter au profit de l'Italie et de l'Espagne ces dernières années.

Un plan souveraineté pour redorer le blé dur français

Face à ce constat, le gouvernement a lancé en début d'année un plan souveraineté pour la filière blé dur, doté de 43 millions d'euros. Objectif : sécuriser l'approvisionnement en renforçant les liens entre agriculteurs et transformateurs. Des contrats pluriannuels avec des prix garantis sont ainsi proposés aux producteurs pour les inciter à réensemencer leurs champs en blé dur.

Si nous prolongeons les courbes, nous allons vers un risque de pénurie.

Albert Mathieu, PDG de Panzani

Car la production nationale a chuté à 1,3 million de tonnes en 2023 contre 2,5 en 2010, fragilisant toute la chaîne. "Un incident climatique comme cette année crée une situation de tension, alors qu'environ 600 000 tonnes sont utilisées par l'ensemble des pastiers et semouliers français", souligne Albert Mathieu, président du syndicat professionnel SIFPAF.

Remobiliser la recherche variétale pour plus de qualité

Au-delà des surfaces, c'est aussi la qualité du blé dur français qui est en jeu. Les industriels réclament des variétés adaptées à leurs exigences : teneur en protéines, couleur, résistance... Un défi pour la recherche variétale, quelque peu délaissée ces dernières années suite au déclin de la filière. Désormais, les semenciers comme RAGT et Florimond Desprez sont priés de remettre les bouchées doubles.

Le déclin des surfaces a entraîné un lâcher prise de la recherche privée. Aujourd'hui, seuls 2 acteurs font de la recherche variétale en blé dur.

Claude Tabel, Intercéréales

Reconquérir les parts de marché face aux marques de distributeurs

Car l'enjeu est aussi de proposer des pâtes premium pour regagner les parts de marché perdues, notamment face aux marques de distributeurs qui trustent 40% des rayons. Souvent fabriquées à l'étranger avec des blés d'origines diverses, celles-ci tirent les prix vers le bas. Un défi de taille pour les marques françaises qui peinent à rester compétitives malgré l'argument du made in France.

Il y a trente ans, les pâtes françaises pesaient deux tiers de notre marché national. La baisse est liée à la concurrence italienne, mais aussi espagnole via les MDD.

Nicolas Guize, Alpina Savoie

L'objectif fixé est ambitieux : regagner 10 points de parts de marché d'ici 2030. Cela passera par plus de transparence sur l'origine du blé et la qualité des ingrédients. Panzani prévoit ainsi de lancer une gamme 100% française avec un blé traçable du champ à l'usine. Un moyen de capter les consommateurs en quête de sens et de souveraineté alimentaire.

• 35% des pâtes consommées en France produites localement en 2023
• Objectif de 45% de parts de marché pour les pâtes françaises en 2030
• 43 millions d'euros débloqués pour le plan de souveraineté blé dur

La partie est loin d'être gagnée pour les industriels tricolores, qui devront convaincre distributeurs et consommateurs de mettre la main au portefeuille. Mais ce pari sur le made in France pourrait bien porter ses fruits, à l'heure où la souveraineté alimentaire s'impose dans le débat public. Du champ à l'assiette, le blé dur français a de beaux jours devant lui.