L’ascension fulgurante et la chute fracassante de Fisker
Quand Henrik Fisker a fondé sa startup automobile éponyme, il avait de grandes ambitions pour conquérir le marché des véhicules électriques avec son SUV Ocean. Mais à peine un an après le lancement de ce modèle phare en 2023, l'entreprise a été rattrapée par une série de problèmes qui ont précipité sa chute.
L'Ocean, vaisseau amiral de Fisker qui prend l'eau
Au cœur des déboires de Fisker se trouve son premier véhicule, le SUV Ocean. Très attendu, il a malheureusement été rongé par de multiples soucis logiciels et mécaniques peu après sa sortie :
- Pertes soudaines de puissance et problèmes de freinage
- Capteurs de présence conducteur défaillants
- Clés qui bloquent les utilisateurs à l'intérieur ou à l'extérieur du véhicule
- Capots qui s'ouvrent brutalement à haute vitesse
Ces dysfonctionnements ont donné lieu à plus de 100 signalements et poussé l'agence américaine de sécurité routière (NHTSA) à ouvrir pas moins de 4 enquêtes sur l'Ocean en quelques mois. Une situation inédite.
Des objectifs de production jamais atteints
Au-delà de la fiabilité, c'est aussi le rythme de production de l'Ocean qui a posé problème. Fisker a dû revoir ses prévisions à la baisse à plusieurs reprises :
- Moins de 1100 exemplaires au T2 2023 au lieu des 1400-1700 prévus
- Seulement 10 000 véhicules visés sur l'ensemble de 2023, contre 40 000 un an plus tôt
En cause : des problèmes d'approvisionnement et une montée en cadence laborieuse. Loin des 300 livraisons quotidiennes espérées, Fisker n'en réalisait souvent qu'une ou deux douzaines début 2024.
Des licenciements en cascade
Pour réduire ses coûts et tenir le coup, Fisker a procédé à des licenciements massifs. Une première vague de 15% des effectifs fin février 2024, puis plusieurs centaines de postes supprimés en avril et mai. Jusqu'à ne garder qu'environ 150 employés.
Nous devons prendre des décisions difficiles pour préserver nos liquidités.
Henrik Fisker, fondateur et CEO
La crise de trésorerie
Car c'est bien le nerf de la guerre qui est venu à manquer. Mi-mars, Fisker annonçait :
- N'avoir plus que 121 millions de dollars de cash, dont 32 bloqués
- Faire face à 182 millions de dollars de factures impayées
- Douter de sa capacité à poursuivre ses activités
Un plan de sauvetage a été tenté avec l'émission de 340 millions d'obligations convertibles et des discussions avec un grand constructeur, probablement Nissan. Mais ce dernier s'est retiré fin mars, compromettant le financement.
Derniers soubresauts avant le dépôt de bilan
Acculé, Fisker a stoppé sa production pendant 6 semaines début avril. La Bourse de New York a suspendu la cotation du titre fin mars. La startup a aussi cessé de rémunérer des sous-traitants stratégiques comme le bureau d'études ayant développé ses 2 prochains modèles, la compacte Pear et le pick-up Alaska.
Sans repreneur ni nouveau financement, Fisker a déposé le bilan le 18 juin. La société déclare entre 500 millions et 1 milliard de dollars d'actifs et de 100 à 500 millions de dollars de dettes. Elle entend poursuivre une activité minimale pour préserver les programmes clients et payer certains fournisseurs, dans l'espoir de trouver un acquéreur pour ses actifs. Une fin amère pour celui qui ambitionnait de bousculer Tesla.