L’App Store d’Apple Face à la Réglementation de l’UE
Le bras de fer entre Apple et l'Union Européenne sur les pratiques de l'App Store vient de franchir un nouveau cap. La Commission européenne a en effet signifié à la firme à la pomme que les règles régissant sa boutique d'applications enfreignaient les normes européennes en matière de concurrence. Une accusation lourde de conséquences, qui pourrait conduire à une amende salée et une remise en question du modèle d'Apple.
L'App Store, une "forteresse" contestée
Longtemps considéré comme une forteresse imprenable, symbole du succès et du contrôle d'Apple sur son écosystème, l'App Store se retrouve aujourd'hui dans l'œil du cyclone. Bruxelles reproche notamment à la marque californienne d'empêcher les développeurs de diriger les utilisateurs vers des offres concurrentes, en dehors de l'App Store. Une pratique jugée anti-concurentielle.
Margrethe Vestager, Commissaire européenne à la Concurrence, a ainsi déclaré :
En l'état, nous pensons que ces nouvelles conditions ne permettent pas aux développeurs d'applications de communiquer librement avec leurs utilisateurs finaux et de conclure des contrats avec eux.
- Margrethe Vestager, Commissaire européenne
Des frais jugés excessifs
Au-delà des restrictions imposées aux développeurs, la Commission pointe également du doigt les frais prélevés par Apple sur les transactions réalisées via l'App Store. Selon Bruxelles, ces commissions dépasseraient ce qui est "strictement nécessaire" pour la rémunération du service fourni par Apple aux éditeurs d'applications.
Pour rappel, Apple prélève une commission de 30% sur les achats réalisés dans les applications, un niveau jugé excessif par de nombreux développeurs et entreprises. Cette pratique est d'ailleurs au cœur d'un bras de fer judiciaire entre Apple et Epic Games, l'éditeur du jeu Fortnite.
Le Digital Markets Act, nouveau cadre réglementaire
Cette mise en demeure de la Commission européenne s'inscrit dans le cadre du Digital Markets Act (DMA), le nouveau règlement européen visant à lutter contre les abus de position dominante des géants du numérique. Apple est la première entreprise ciblée par Bruxelles depuis l'entrée en vigueur du DMA en mars dernier.
Une infraction à ce règlement peut conduire à une amende allant jusqu'à 10% du chiffre d'affaires annuel mondial de la société concernée. Une menace financière significative, même pour un mastodonte comme Apple dont les revenus ont atteint près de 400 milliards de dollars en 2022.
Quelles perspectives pour Apple et les développeurs ?
Face à l'offensive de Bruxelles, Apple assure avoir déjà apporté des changements ces derniers mois pour se conformer au DMA, en prenant en compte les retours des développeurs et de la Commission. La firme se dit convaincue que son plan est conforme à la loi. Mais cette assurance suffira-t-elle à convaincre les régulateurs européens ?
Pour les développeurs d'applications, une condamnation d'Apple et une évolution des règles de l'App Store pourraient ouvrir de nouvelles perspectives en termes de modèles économiques et de relation avec les utilisateurs. Beaucoup voient dans ce bras de fer l'opportunité de rééquilibrer un rapport de force jusqu'ici très favorable à Apple.
Reste à savoir si la firme de Tim Cook acceptera de lâcher du lest ou si elle choisira l'épreuve de force avec Bruxelles. Une chose est sûre : l'avenir de l'App Store, véritable poule aux œufs d'or pour Apple, est plus que jamais au cœur des enjeux stratégiques et réglementaires du numérique.