
Appel des dirigeants tech canadiens pour un retour du Parlement
Face à la tempête économique qui menace le Canada, des dirigeants de l'écosystème tech montent au créneau. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre Justin Trudeau, plus d'une centaine de PDG et investisseurs du secteur technologique pressent le gouvernement de rappeler « immédiatement » le Parlement pour affronter « l'incertitude » générée par les menaces de tarifs douaniers américains.
Le gratin de la tech canadienne sonne l'alarme
Parmi les signataires de cette lettre coup de poing, on retrouve des figures de proue de l'écosystème tech canadien comme Fred Lalonde de Hopper, Joanna Griffiths de Knix, Max Lytvyn de Grammarly, John Bianchini de Hatch ou encore Andrew Graham de Borrowell. Plusieurs investisseurs de renom ont également apposé leur paraphe, à l'instar de Sophie Forest de Brightspark Ventures, David Nault de Luge Capital ou Allen Lau de Two Small Fish Ventures.
Pour ces leaders, la situation est on ne peut plus claire et urgente. « Le Canada traverse une période de turbulences et d'incertitude », martèlent-ils. Et d'enfoncer le clou : « Nous avons besoin d'un gouvernement fort, légitime et robuste, soutenu par un Parlement qui siège et fonctionne, pour traiter ces questions très graves, complexes et délicates. »
La prorogation du Parlement, un choix « irresponsable » ?
En toile de fond, la décision controversée de Justin Trudeau de proroger le Parlement jusqu'au 24 mars, dans la foulée de l'annonce de sa démission imminente. Une pause de deux mois en pleine tempête économique qui passe mal auprès du gratin technologique canadien. « Pouvez-vous imaginer, si votre entreprise était confrontée à une crise existentielle, envoyer une partie clé de votre équipe en congé prolongé ? », s'insurge Andrew Graham de Borrowell. « On vous traiterait d'irresponsable, à juste titre. »
Un spectre de « conséquences économiques désastreuses »
Au cœur des préoccupations des signataires, le spectre de représailles douanières massives brandies par l'administration Trump. Après un sursis négocié de 30 jours, le président américain a de nouveau dégainé lundi, annonçant des taxes additionnelles de 25% sur les importations canadiennes d'acier et d'aluminium dès le 12 mars. Des tarifs qui s'ajouteraient aux taxes de 25% sur la quasi-totalité des produits canadiens et de 10% sur l'énergie canadienne déjà annoncées par la Maison Blanche début février, en réponse à la « taxe numérique » canadienne.
La lettre des dirigeants tech met en garde contre « les conséquences économiques désastreuses et autres » pour les Canadiens si ces taxes venaient à être imposées. D'où l'urgence d'un Parlement en ordre de marche, seul à même de faire passer les lois nécessaires pour amortir le choc.
Des startups canadiennes en première ligne
Pour l'écosystème tech, l'enjeu est de taille. Nombre de startups canadiennes, à l'image de Hopper, Knix ou Grammarly, réalisent une part conséquente de leur chiffre d'affaires aux États-Unis. Des tarifs douaniers élevés pourraient sérieusement entamer leurs marges et freiner leur développement, voire mettre en péril leur business model.
Nous traversons l'une des plus grandes crises de notre époque, l'avenir de notre pays est en jeu, et tout ce que nous disons, c'est "remettez-vous au travail".
John Ruffolo, Maverix Private Equity
Autre motif d'inquiétude, l'impact de cette crise douanière sur l'attractivité du Canada et sa capacité à attirer les talents et capitaux étrangers. Dans un secteur ultra-concurrentiel, où la guerre des talents fait rage, toute perte de compétitivité pourrait s'avérer préjudiciable. D'où l'appel pressant à une réponse gouvernementale ferme et coordonnée.
L'opposition aussi monte au créneau
La missive des capitaines de la tech fait écho aux critiques de l'opposition. Tant les conservateurs de Pierre Poilievre que les néo-démocrates de Jagmeet Singh plaident pour une reprise rapide des travaux parlementaires. Mettre fin à la prorogation déboucherait probablement sur un vote de défiance, susceptible de précipiter des élections fédérales anticipées.
Le gouvernement Trudeau, affaibli et privé de majorité absolue, joue gros dans cette partie de poker menteur avec l'administration Trump. Mais pour les dirigeants tech signataires, la priorité est ailleurs. « L'avenir de notre pays est en jeu », résume John Ruffolo de Maverix Private Equity. Un sentiment d'urgence nationale qui transcende les clivages politiques.