BCE : Vers un taux de dépôt neutre au S1 2025 selon Rehn
La Banque centrale européenne (BCE) n'a pas fini d'ajuster sa politique monétaire pour lutter contre l'inflation. Selon Olli Rehn, gouverneur de la banque centrale finlandaise et membre du conseil des gouverneurs de la BCE, de nouvelles baisses des taux directeurs sont à prévoir dans les mois à venir. L'objectif : ramener le taux de dépôt, aujourd'hui à 3,25%, au niveau dit "neutre" qui ne stimule ni ne freine la croissance.
Une trajectoire claire pour les taux de la BCE
Lors d'une conférence à Londres ce mardi, Olli Rehn s'est montré confiant sur les prochaines décisions de la BCE en matière de taux d'intérêt :
La trajectoire concernant les modifications de taux est claire. Mais le rythme et l'ampleur des baisses de taux dépendront de l'évaluation globale que nous ferons à chaque réunion de trois facteurs : les perspectives d'inflation, la dynamique de l'inflation sous-jacente et la force de la transmission de la politique monétaire.
Olli Rehn, gouverneur de la banque centrale finlandaise
Autrement dit, si l'inflation continue de ralentir, si les prix hors énergie et alimentation restent sous contrôle et si l'impact des hausses de taux passées se fait sentir sur l'économie, la BCE poursuivra l'assouplissement monétaire entamé cet été. Un taux de dépôt neutre pourrait ainsi être atteint au printemps ou à l'été 2025 selon le banquier central finlandais.
Un taux neutre difficile à estimer
Reste à savoir à quel niveau se situe précisément ce fameux taux neutre. Sur ce point, Olli Rehn reconnaît la difficulté de calibrage, en l'absence de consensus entre les membres de la BCE. La banque de Finlande l'estime pour sa part entre 0,2% et 0,8% en termes réels, ce qui avec une inflation à 2% donnerait une fourchette de 2,2% à 2,8% pour le taux de dépôt nominal.
Un chiffre cohérent avec les anticipations du marché, qui voit le taux de dépôt descendre jusqu'à 2,5% environ en mars 2025. Mais attention prévient Olli Rehn, il ne s'agit là que d'une observation, pas d'un engagement de sa part ou de la BCE.
Les défis à relever pour la BCE
Au-delà de la question du taux neutre, les déclarations d'Olli Rehn mettent en lumière plusieurs enjeux cruciaux pour la politique monétaire de la BCE :
- Piloter les anticipations d'inflation malgré les incertitudes persistantes sur les prix de l'énergie et des matières premières.
- Éviter un dérapage des salaires qui pourrait nourrir une boucle prix-salaires et une inflation plus durable.
- Doser le resserrement monétaire pour ne pas casser la reprise post-Covid encore fragile, en particulier avec la crise énergétique.
Dans ce contexte, la communication de la BCE sera scrutée de près par les marchés lors de ses prochaines réunions. Toute indication sur le rythme et l'ampleur des futures baisses de taux sera déterminante. L'institution de Francfort devra trouver le bon équilibre entre fermeté contre l'inflation et soutien à l'économie. Un exercice d'équilibriste périlleux, comme le reconnaît Olli Rehn.
Quel impact sur l'économie européenne ?
Si les marchés saluent le virage accommodant amorcé par la BCE, beaucoup d'économistes s'inquiètent encore de l'impact du resserrement passé sur la croissance de la zone euro. Avec des taux remontés de -0,5% à 3,25% en moins d'un an, le choc est historique et ses effets se feront sentir progressivement.
La prudence reste donc de mise, d'autant que l'économie européenne fait face à de nombreux défis : crise énergétique, pénuries de main d'œuvre, tensions géopolitiques... Autant de facteurs qui pourraient compliquer la tâche de la BCE et ralentir le retour à un taux neutre. Les mois à venir seront décisifs pour évaluer la résilience de la reprise et la crédibilité de la trajectoire esquissée par Olli Rehn.
Une chose est sûre : malgré les progrès récents, la normalisation de la politique monétaire européenne est loin d'être achevée. La route vers le taux d'intérêt neutre sera encore longue et semée d'embûches pour la BCE et l'économie de la zone euro.