Brevo Devient Licorne avec 583M$ Levés
Imaginez une entreprise française qui, partie d'un simple outil d'emailing pour petites structures, se retrouve aujourd'hui valorisée à plus d'un milliard de dollars et prête à affronter les titans américains du CRM. C'est l'histoire de Brevo, cette startup parisienne qui vient de franchir un cap décisif. Son ambition ? Devenir un leader mondial capable de rivaliser avec Salesforce ou HubSpot sur leur propre terrain.
Brevo entre dans le club très fermé des licornes françaises
Le 3 décembre 2025, la nouvelle a fait l'effet d'une bombe dans l'écosystème tech européen. Brevo, anciennement connue sous le nom de Sendinblue, annonce une levée de fonds massive de 500 millions d'euros, soit environ 583 millions de dollars. Cette opération propulse officiellement l'entreprise au statut de licorne, ces startups valorisées à plus d'un milliard de dollars.
Ce n'est pas une mince affaire dans un contexte où les financements se font plus rares et plus sélectifs. Brevo démontre ainsi une trajectoire exceptionnelle, passant d'un outil spécialisé à une plateforme complète de gestion de la relation client.
Fondée en 2012, l'entreprise a su évoluer avec les besoins du marché. Ce qui commencé comme une solution d'email marketing accessible aux petites entreprises s'est transformé en un véritable suite CRM tout-en-un. Aujourd'hui, plus de 600 000 clients font confiance à Brevo, des indépendants jusqu'aux grands groupes comme Carrefour, eBay ou H&M.
Une croissance fulgurante qui dépasse les objectifs
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Brevo a rejoint le club des centaures – ces entreprises générant plus de 100 millions de dollars de revenus annuels récurrents – dès 2023. Mais l'entreprise a fait encore mieux : elle a atteint son objectif de 200 millions d'euros d'ARR dès 2025, avec plusieurs mois d'avance.
Le PDG, Armand Thiberge, ne cache pas ses ambitions. Il vise désormais le milliard d'euros de chiffre d'affaires d'ici 2030. Un objectif audacieux quand on sait que Salesforce vise, lui, plus de 41 milliards de dollars pour 2026. Pourtant, Brevo affiche déjà une marge EBITDA à deux chiffres, signe d'une santé financière solide.
« C’est 50 % du marché mondial, donc ça devrait représenter 50 % de nos revenus. »
– Armand Thiberge, CEO de Brevo, à propos du marché américain
Actuellement, les États-Unis ne représentent que 15 % des revenus de Brevo, aux côtés de la France et de l'Allemagne comme marchés principaux. L'entreprise prévoit d'investir plus de 100 millions d'euros pour accélérer sa conquête outre-Atlantique.
Une stratégie axée sur le produit et l'innovation
Contrairement à certaines approches européennes qui misent sur la souveraineté numérique, Brevo joue la carte de l'excellence produit pure. Pour Armand Thiberge, la bataille se gagne sur la qualité et la facilité d'utilisation, pas sur des arguments réglementaires.
L'entreprise cible à la fois les très petites entreprises et le mid-market, une combinaison qui pourrait sembler contradictoire mais qui s'avère payante. Brevo propose une plateforme unifiée qui couvre tous les besoins de communication et de gestion client.
Parmi les fonctionnalités phares :
- Automatisation marketing avancée
- Gestion CRM complète
- Communication multicanale : email, SMS, WhatsApp, live chat, push notifications
- Appels intégrés pour les équipes commerciales
- Gestion des données clients centralisée
Cette offre tout-en-un permet à Brevo de se différencier de concurrents spécialisés comme Mailchimp pour l'emailing ou des acteurs plus haut de gamme.
L'intelligence artificielle au cœur de la roadmap
Comme beaucoup d'acteurs SaaS aujourd'hui, Brevo mise gros sur l'IA. L'entreprise a déjà annoncé un investissement de 50 millions d'euros sur cinq ans dédié à l'intelligence artificielle. Ces fonds serviront à développer des fonctionnalités natives mais aussi à intégrer les meilleures solutions externes.
L'IA vient booster l'ensemble de la plateforme : personnalisation des campagnes, prédiction du comportement client, automatisation intelligente des workflows. Dans un marché où la concurrence est féroce, ces avancées pourraient faire la différence.
Brevo n'hésite pas non plus à utiliser la croissance externe pour accélérer son développement technologique. Avec déjà 11 acquisitions à son actif, l'entreprise prévoit que 45 % de sa croissance vers le milliard d'euros proviendra d'opérations de M&A.
Un tour de table prestigieux et international
La levée de fonds a été menée par deux nouveaux investisseurs de poids : General Atlantic et Oakley Capital, qui prennent chacun 25 % du capital. Bpifrance et Bridgepoint conservent ensemble 24 %, tandis que la direction et les employés restent le premier actionnaire avec 26 %.
Partech, l'investisseur historique de la Série A, a quant à lui réalisé une sortie complète. Ce nouveau tour de table reflète parfaitement l'ambition globale de Brevo : un actionnariat international pour soutenir une expansion mondiale.
Avec désormais plus de 1 000 employés, Brevo dispose des moyens humains et financiers pour exécuter sa vision. La combinaison de fonds propres et de dette précédemment levée offre une flexibilité précieuse dans un environnement économique incertain.
Pourquoi Brevo pourrait réussir là où d'autres ont échoué
Le marché du CRM est dominé par quelques géants américains. Pourtant, plusieurs facteurs jouent en faveur de Brevo. Tout d'abord, sa base européenne solide lui offre une position unique pour servir les entreprises soucieuses de conformité RGPD.
Ensuite, son positionnement prix/performance attire à la fois les PME et les structures plus importantes cherchant des alternatives moins coûteuses aux solutions américaines. Enfin, sa capacité d'exécution prouvée – passer de 0 à 200 millions d'euros d'ARR en quelques années – démontre une équipe capable de tenir ses promesses.
Le défi sera de maintenir cette agilité tout en grossissant. Concilier les besoins des très petites entreprises avec ceux du mid-market demande une finesse produit rare. Mais jusqu'à présent, Brevo a su relever tous les challenges.
Ce que cette levée signifie pour l'écosystème tech français
Au-delà de Brevo, cette opération est une excellente nouvelle pour toute la French Tech. Elle démontre que des entreprises européennes peuvent atteindre le statut de licorne dans des secteurs très concurrentiels dominés par les Américains.
Elle valide aussi le modèle des champions nationaux capables de s'exporter massivement. Avec cette visibilité accrue, Brevo pourrait inspirer une nouvelle génération d'entrepreneurs français à voir plus grand, plus international.
Enfin, elle rappelle que la patience paie. Treize ans après sa création, Brevo récolte les fruits d'une stratégie cohérente et d'une exécution sans faille. Dans un monde où beaucoup cherchent la croissance à tout prix, l'approche mesurée mais ambitieuse de son fondateur fait figure d'exemple.
L'histoire de Brevo est encore en cours d'écriture. Mais avec ces nouveaux moyens, elle a toutes les cartes en main pour devenir le premier véritable champion européen du CRM. Une aventure à suivre de très près dans les années à venir.