
Cohere : L’Hope AI du Canada Brille
Et si une seule entreprise pouvait porter l’espoir d’un pays tout entier dans la course mondiale à l’intelligence artificielle ? En août 2025, alors que le paysage du capital-risque canadien traverse une période sombre, une startup montréalaise fait la une : Cohere, une entreprise spécialisée dans l’IA pour les grandes entreprises, vient de lever 500 millions de dollars US. Cette nouvelle n’est pas seulement une réussite financière, elle est un symbole d’espoir pour un écosystème technologique canadien en quête de renouveau. Mais derrière ce triomphe, des questions cruciales émergent : Cohere peut-elle vraiment maintenir le Canada au sommet de l’innovation en IA face à une concurrence mondiale féroce ?
Cohere, un phare dans la tempête du financement
Le secteur technologique canadien vit des moments contrastés. D’un côté, les données récentes montrent une régression du financement par capital-risque, atteignant des niveaux comparables à ceux de la crise du COVID-19 en 2020. De l’autre, Cohere annonce une levée de fonds colossale, codirigée par des investisseurs canadiens comme Radical Ventures et Inovia Capital. Ce tour de table, qui valorise l’entreprise à 6,8 milliards de dollars, est une anomalie dans un paysage où les rondes de plus de 50 millions de dollars se font rares. Selon John Rikhtegar, directeur du capital chez RBCx, le nombre de ces méga-deals est en passe d’être le plus bas depuis 2015.
Cette levée de fonds permet au Canada de rester un acteur clé dans les tables de capitalisation de nos entreprises phares.
– John Rikhtegar, RBCx
Ce succès n’est pas seulement financier. Il met en lumière la capacité du Canada à produire des champions technologiques, même dans un climat économique difficile. Cohere, avec son focus sur l’IA pour les entreprises à forte exigence de sécurité, se distingue par une approche non-US-centric, attirant des clients internationaux soucieux de souveraineté numérique.
Une niche stratégique pour Cohere
Dans un monde dominé par des géants comme OpenAI ou Anthropic, Cohere a su se tailler une place unique. Contrairement à ses concurrents, qui ciblent souvent le grand public ou des applications généralistes, Cohere se concentre sur les grandes entreprises ayant des besoins spécifiques en matière de sécurité et de confidentialité. Cette stratégie a porté ses fruits, attirant des investisseurs comme les fonds de pension canadiens, un soutien rare pour une startup locale.
Zach Bratun-Glennon, de Gradient Ventures, explique que l’offre de Cohere, axée sur une IA souveraine, est un atout majeur. Alors que les tensions géopolitiques autour des données s’intensifient, les entreprises recherchent des solutions qui ne dépendent pas des infrastructures américaines. Cohere répond à ce besoin avec une technologie robuste et une vision claire.
L’offre souveraine de Cohere est un différenciateur clé dans un marché dominé par les géants américains.
– Zach Bratun-Glennon, Gradient Ventures
En parallèle, Cohere renforce son équipe dirigeante avec des nominations stratégiques. Joelle Pineau, ancienne cadre chez Meta, devient la première chief AI officer, tandis que Francois Chadwick, ex-Uber, prend le poste de CFO. Ces ajouts signalent une ambition : transformer Cohere en un leader mondial, tout en restant ancré au Canada.
Un écosystème sous pression
Malgré le succès de Cohere, le secteur technologique canadien fait face à des défis structurels. Le ministre de l’IA, Evan Solomon, parle d’un « moment de crise » pour le pays. La fuite des talents et des propriétés intellectuelles vers les États-Unis menace la souveraineté économique du Canada. Avec des entreprises comme Untether.AI et CentML rachetées, et Tenstorrent relocalisée aux États-Unis, Cohere semble être le dernier bastion de l’IA fondamentale au Canada.
Le financement en amorçage, bien que montrant des signes de reprise au Québec avec une augmentation de 31 % des investissements seed en 2025, reste fragile. Selon Olivier Quenneville, PDG de Réseau Capital, cette embellie est encourageante, mais il est trop tôt pour parler d’une tendance durable. Les jeunes pousses peinent à trouver des capitaux pour passer au stade suivant, ce qui limite l’émergence de nouveaux champions comme Cohere.
Les clés du succès de Cohere
Qu’est-ce qui fait de Cohere une exception ? Voici les principaux facteurs :
- Une vision claire : se concentrer sur les entreprises à forte exigence de sécurité.
- Un positionnement souverain : offrir une alternative aux solutions américaines.
- Un soutien local : des investisseurs canadiens comme Radical Ventures et Inovia Capital.
- Une équipe renforcée : des cadres expérimentés issus de Meta et Uber.
Ces éléments permettent à Cohere de rivaliser avec des géants mondiaux, malgré des ressources financières plus limitées. Cependant, le chemin reste semé d’embûches, notamment face à la concurrence des acteurs américains, qui dominent les rondes de financement tardives.
Les défis de l’écosystème canadien
Le succès de Cohere ne doit pas masquer les faiblesses structurelles du secteur. Le manque de financement en amorçage et pré-amorçage freine l’innovation. Les investisseurs canadiens, bien que présents dans des rondes comme celle de Cohere, peinent à rivaliser avec leurs homologues américains, qui dominent les investissements dans les stades avancés. Cette dépendance aux capitaux étrangers risque de marginaliser les VCs canadiens et de limiter leur présence dans les tables de capitalisation des futures licornes.
Pour contrer cette tendance, des initiatives comme Mitacs jouent un rôle crucial. En connectant les entreprises aux chercheurs et en offrant des financements pour l’innovation, Mitacs aide les startups à surmonter les obstacles financiers. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- 11 % d’augmentation de la productivité pour les entreprises soutenues par Mitacs.
- 9 % de croissance des revenus.
- 16 % d’augmentation des ventes, dépassant les moyennes nationales.
Ces résultats montrent qu’un soutien ciblé peut faire la différence. Mais sans une stratégie nationale pour retenir les talents et les capitaux, le Canada risque de perdre sa place dans la course à l’IA.
Un avenir incertain mais prometteur
Le parcours de Cohere illustre le potentiel du Canada à produire des leaders mondiaux en IA. Cependant, une seule entreprise ne peut porter tout un écosystème. Pour que d’autres Cohere émergent, le Canada doit investir massivement dans l’innovation, renforcer les financements en amorçage et pré-amorçage, et créer un environnement propice à la rétention des talents.
Le Québec, avec son rebond en amorçage, montre des signes encourageants. Mais comme le souligne Olivier Quenneville, il faut transformer cet élan en une tendance durable. Les gouvernements, les investisseurs et les entreprises doivent collaborer pour bâtir un écosystème résilient, capable de rivaliser avec les hubs technologiques mondiaux.
Le Canada est à un tournant critique. Nous devons agir vite pour sécuriser notre souveraineté économique dans l’IA.
– Evan Solomon, ministre de l’IA
En attendant, Cohere continue de tracer la voie, prouvant que le Canada peut jouer dans la cour des grands. Mais pour combien de temps ? La réponse dépend de la capacité du pays à transformer cet exploit en un mouvement plus large, capable de propulser d’autres startups vers les sommets.
Conclusion : un appel à l’action
L’histoire de Cohere est une source d’inspiration, mais aussi un avertissement. Le Canada a les talents, les idées et la détermination pour devenir un leader en intelligence artificielle. Pourtant, sans un soutien accru aux jeunes pousses et une stratégie nationale claire, le pays risque de voir ses pépites s’envoler vers d’autres cieux. Cohere est un phare, mais c’est à l’écosystème tout entier de s’allumer pour éclairer l’avenir.