Daikin et Arkema face à la justice pour pollution aux PFAS

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août 7, 2024

Daikin et Arkema face à la justice pour pollution aux PFAS

Quelle est la responsabilité des géants de la chimie Daikin et Arkema dans la pollution de l'eau potable aux PFAS, les tristement célèbres "polluants éternels", dans la métropole de Lyon ? C'est la question à laquelle devra répondre une expertise judiciaire ordonnée le 2 août par le tribunal de Lyon, suite à une action en justice intentée en mai par la Métropole de Lyon, la régie Eau publique du Grand Lyon et le syndicat mixte d'eau potable Rhône-Sud. Une "décision historique" selon l'écologiste Bruno Bernard, président de la Métropole.

Des rejets toxiques pointés du doigt

Les deux usines chimiques visées, situées à Pierre-Bénite au sud de Lyon, sont accusées d'utiliser et de rejeter dans l'environnement des PFAS (per et polyfluoroalkylés), une famille de plus de 4700 composés utilisés notamment pour leurs propriétés antiadhésives et imperméabilisantes, mais dont la toxicité et la persistance dans l'environnement inquiètent.

Des taux préoccupants de PFAS ont en effet été détectés dans l'eau du robinet de plusieurs communes de l'agglomération lyonnaise ces dernières années, nécessitant la mise en place de coûteux traitements pour assurer la potabilité de l'eau distribuée aux habitants.

Le principe "pollueur-payeur" en question

Avec cette action en justice, les collectivités entendent faire appliquer le principe "pollueur-payeur" et mettre les industriels face à leurs responsabilités. "Le coût des solutions pour traiter la pollution aux polluants éternels va être supporté par les usagers si le principe pollueur-payeur ne s'applique pas. La responsabilité financière des industriels doit être engagée", insiste Guy Martinet, président du Syndicat mixte d'eau potable Rhône Sud.

L'enjeu financier est de taille : entre 5 et 10 millions d'euros selon les premières estimations pour mettre en place les traitements nécessaires. Une facture que les collectivités refusent de laisser aux contribuables.

La mobilisation de la science doit permettre à des experts indépendants de se prononcer sur les responsabilités exactes d'Arkema et de Daikin comme sur les préjudices subis par nos collectivités.

Bruno Bernard, président écologiste de la Métropole de Lyon

Les industriels contestent

Du côté des deux géants de la chimie mis en cause, on conteste toute responsabilité. Contactés, Arkema et Daikin n'ont pas souhaité réagir à la décision de justice, se bornant à indiquer qu'ils « collaboreront avec les experts nommés » et qu'ils respectent « la réglementation en vigueur ».

Les industriels de la Vallée de la chimie lyonnaise font valoir les efforts déjà réalisés ces dernières années pour réduire leurs rejets de PFAS. Ils mettent aussi en avant leur rôle économique localement et dénoncent « une stigmatisation » de leur activité.

D'autres actions contre les PFAS

Au-delà de cette action lyonnaise, la pression s'accroît sur les PFAS, présents dans de nombreux produits du quotidien (emballages alimentaires, textiles déperlants, ustensiles de cuisine en Téflon...) et dont les effets sanitaires préoccupent. Plusieurs actions en justice ont été lancées en Europe et aux États-Unis pour en interdire certains usages.

  • L'Union européenne prévoit d'interdire 4700 composés de la famille des PFAS en 2025.
  • 8 PFAS sont déjà interdits en Europe depuis 2020.
  • Les PFAS sont qualifiés de "menace globale" par l'ONU depuis mars 2022.

À Lyon, de nouvelles actions contre les PFAS ont été lancées en parallèle de la procédure judiciaire. En juin, saisie par des riverains et associations, la justice a suspendu un projet d'extension du site Daikin à Pierre-Bénite, demandant des garanties environnementales supplémentaires.

L'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal de Lyon, qui devra être réalisée d'ici fin 2025, apportera un éclairage bienvenu sur le rôle exact des industriels dans cette pollution invisible mais persistante. Elle pourrait aussi faire jurisprudence sur l'application du principe "pollueur-payeur" face à ces polluants d'un genre nouveau. Une véritable épée de Damoclès financière et réputationnelle pour les industriels concernés.

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