Dessintey Révolutionne la Rééducation avec l’Effet Miroir
Et si un simple miroir pouvait redonner espoir à des milliers de personnes paralysées après un AVC ? Cette idée, née dans les années 90 aux États-Unis, a traversé l’Atlantique pour s’épanouir en France sous une forme high-tech et audacieuse. À Saint-Étienne, une medtech nommée Dessintey repousse les limites de la rééducation en industrialisant des machines basées sur l’effet miroir, une technique qui trompe le cerveau pour relancer ses connexions. Aujourd’hui, alors que l’entreprise double la taille de son usine et vise l’international, son histoire illustre parfaitement comment l’innovation peut transformer des vies.
Une Technologie au Service de la Santé
L’histoire de Dessintey commence avec une rencontre : celle d’un professeur de médecine, d’un thérapeute et d’un ingénieur visionnaire. Ensemble, ils ont transformé une découverte scientifique en une solution concrète pour les patients. Leur arme secrète ? La simulation visuelle intensive, ou Intensive Visual Simulation (IVS), qui utilise caméras, écrans et algorithmes pour recréer l’illusion du mouvement. Une idée simple, mais révolutionnaire.
L’Effet Miroir : Une Astuce Cérébrale
Tout commence avec une intuition du médecin américain Vilayanur Ramachandran dans les années 90. En plaçant un miroir entre les bras d’un amputé, il a montré que le cerveau pouvait être “dupé” en croyant que le membre manquant bougeait encore. En France, cette technique a été adaptée pour les victimes d’AVC souffrant d’hémiplégie, une paralysie partielle du corps. Chez Dessintey, on a poussé le concept plus loin en le numérisant.
Imaginez : un patient regarde un écran où son bras immobile semble s’animer grâce à une image réfléchie de son bras valide. Ce subterfuge visuel stimule les neurones, exploitant leur plasticité pour recréer des connexions perdues. Ce n’est pas de la magie, mais de la science appliquée avec précision.
Quand le cerveau voit un mouvement, même illusoire, il se remet en marche. C’est une porte ouverte vers la récupération.
– Nicolas Fournier, président de Dessintey
De l’Idée à l’Usine : Le Parcours de Dessintey
Fondée en 2017 à Saint-Étienne, Dessintey n’est plus une simple start-up. Avec une usine de 1200 m² inaugurée récemment, l’entreprise entre dans une phase industrielle ambitieuse. Ses deux produits phares, l’IVS 3 pour les bras et l’IVS 4 pour les jambes, ont déjà séduit 350 établissements, principalement en France. Mais l’objectif est clair : conquérir le monde.
Le succès ne s’est pas fait sans effort. Avec seulement 1 million d’euros levés en 2019 auprès d’investisseurs comme Turenne Capital, l’entreprise a misé sur une gestion rigoureuse et des ventes solides pour atteindre la rentabilité dès 2021. En 2024, son chiffre d’affaires a bondi de 60 %, atteignant 6,5 millions d’euros.
Une Solution Complémentaire, Pas Miraculeuse
Attention, Dessintey ne promet pas de miracles. Comme le souligne Nicolas Fournier, ses machines sont une “brique” dans le long parcours de rééducation. Elles s’adressent surtout aux 140 000 Français touchés chaque année par un AVC, offrant une aide précieuse là où les thérapies classiques atteignent leurs limites.
Leur force ? Une technologie accessible et intuitive, fabriquée localement avec des partenaires comme Image pour les plateaux ou Berlier pour la tôlerie. Seuls les écrans et l’électronique viennent d’Asie, un compromis pour rester compétitif.
Un Écosystème Local et Collaboratif
Dessintey n’a pas grandi seule. L’entreprise doit beaucoup à la métropole de Saint-Étienne et au cluster Noveka, qui réunit industriels et experts du médical. Ce réseau a permis de transformer une idée née au CHU de Saint-Étienne en une PME de 20 salariés, prête à s’imposer à l’échelle mondiale.
Le trio initial – Pascal Giraux, professeur en médecine, Davy Luneau, thérapeute, et Nicolas Fournier, ingénieur – incarne cette synergie entre science, soin et industrie. Une alliance rare, mais gagnante.
Vers l’International : Une Ambition Mesurée
En 2025, Dessintey voit grand. Après avoir consolidé sa place en France, elle s’attaque aux marchés étrangers. Pour cela, un comité scientifique européen a été formé, réunissant des professeurs prêts à promouvoir cette technologie. Mais l’entreprise reste prudente, préférant une croissance solide à une expansion précipitée.
Avec 5 millions d’euros investis depuis ses débuts, principalement autofinancés, Dessintey prouve qu’on peut innover sans diluer son identité. Les fondateurs, toujours majoritaires, gardent le contrôle de leur vision.
Pourquoi Ça Marche ? Les Clés du Succès
Le modèle de Dessintey repose sur plusieurs piliers. Voici ce qui fait sa force :
- Une technologie brevetée, fruit de recherches rigoureuses.
- Un ancrage local avec des fournisseurs de proximité.
- Une approche frugale, privilégiant la rentabilité aux levées de fonds massives.
Ces choix ont permis à l’entreprise de se démarquer dans un secteur ultra-concurrentiel, où les medtechs doivent jongler entre innovation et viabilité économique.
Les Défis à Venir
Si le bilan est impressionnant, les obstacles ne manquent pas. L’internationalisation exige des adaptations culturelles et réglementaires. De plus, convaincre les systèmes de santé étrangers de financer ces dispositifs sera un défi de taille. Enfin, la concurrence dans le domaine des neurosciences appliquées s’intensifie.
Pourtant, Dessintey a des atouts : une technologie unique, une équipe soudée et une réputation croissante. Reste à transformer l’essai à l’échelle mondiale.
Un Impact Humain Avant Tout
Au-delà des chiffres, ce qui frappe chez Dessintey, c’est son ambition humaine. Chaque machine installée représente une chance pour un patient de retrouver un peu d’autonomie. Dans un monde où la santé devient de plus en plus technologique, cette medtech rappelle que l’innovation n’a de sens que si elle sert les gens.
Alors, la prochaine fois que vous entendrez parler d’un miroir, pensez-y : il pourrait bien être la clé d’une révolution silencieuse dans les hôpitaux du monde entier.