Exosonic : l’essor et le déclin d’une startup supersonique
Tel un météore filant à vitesse supersonique, la jeune pousse californienne Exosonic a connu une brève mais intense trajectoire. Fondée en 2019 avec l'ambition de raviver le transport civil supersonique, elle tire aujourd'hui sa révérence, asphyxiée par le manque de financement. Sa chute illustre le grand tri en cours dans l'aérospatial d'avant-garde.
Exosonic, un envol prometteur
L'histoire d'Exosonic commence comme un conte de fées de la Silicon Valley. Fondée par l'ingénieur aérospatial Norris Tie, fort d'une expérience chez Northrop Grumman et Lockheed Martin, la startup se donne pour mission de faire renaître le transport supersonique civil, orphelin depuis le retrait du Concorde. Un pari audacieux, mais crédible au vu du parcours de son fondateur.
Les débuts sont encourageants. Exosonic lève 6,5 millions de dollars et décroche des contrats avec l'US Air Force pour développer des drones d'entraînement supersoniques. La startup prévoit même de construire toute une gamme d'appareils supersoniques :
- Horizon, un avion de ligne supersonique
- Revenant, un drone supersonique
- Trident, une version réduite du Revenant
En avril 2024, un prototype subsonique prend même son envol, marquant une étape clé. Tout semble sourire à Exosonic. Mais, cinq ans après sa création, le ciel s'assombrit brusquement.
Le mur du financement
Malgré des débuts en fanfare, Exosonic peine à lever les fonds nécessaires à la poursuite de ses opérations. Le développement d'avions supersoniques est un gouffre financier, nécessitant des centaines de millions, voire des milliards de dollars avant de générer le moindre revenu.
Faute de nouveaux investisseurs prêts à miser sur cette technologie de rupture, la startup doit se résoudre à mettre la clé sous la porte. Son parc de propriété intellectuelle est mis en vente, dans l'espoir de trouver preneur.
Pour ceux qui continuent la course, comme Boom Supersonic, Hermeus, Destinus, Venus Aerospace, Spectre Aerospace et d'autres, nous vous souhaitons le meilleur dans vos projets super/hypersoniques. Nous vous encouragerons depuis les tribunes.
Déclaration d'Exosonic
Le grand tri de l'aérospatial innovant
La disparition d'Exosonic n'est pas un cas isolé. L'aérospatial innovant traverse une phase de consolidation intense, rappelant la bulle Internet du début des années 2000. Les startups fleurissent comme des champignons, attirées par les promesses de technologies de rupture comme l'électrique, l'hydrogène, l'autonomie ou le supersonique.
Mais le passage du powerpoint au prototype, puis à la production de masse, est semé d'embûches. Seules les mieux financées et gérées survivront. Récemment, le constructeur de taxis volants électriques Lilium et le motoriste hypersonique Reaction Engines ont ainsi dû jeter l'éponge.
Ce tri sélectif n'est pas une mauvaise nouvelle en soi. Il permettra de concentrer les ressources sur les acteurs les plus solides et crédibles. Mais il rappelle que si l'innovation aérospatiale fait toujours rêver, sa concrétisation reste un chemin long, coûteux et risqué, réservé aux investisseurs les plus patients et aventureux.
Quel avenir pour le supersonique civil ?
Le créneau visé par Exosonic, celui du transport supersonique civil, soulève des interrogations. Existe-t-il un marché suffisant pour rentabiliser le développement d'avions volant à Mach 1,5 ou 2 ? Certes, une poignée de milliardaires et de cadres pressés sont prêts à payer le prix fort pour traverser l'Atlantique en un temps record. Mais de là à remplir des appareils de plusieurs centaines de sièges...
De plus, le spectre de la nuisance sonore et de l'impact environnemental plane sur ces projets. Les avancées technologiques permettront-elles de concevoir des avions supersoniques discrets et sobres ? Rien n'est moins sûr. Le pari reste donc très audacieux. Le supersonique a peut-être plus d'avenir dans le domaine militaire, où les contraintes économiques et écologiques sont secondaires.
Quoi qu'il en soit, la courte épopée d'Exosonic aura marqué les esprits et fait avancer la réflexion sur l'avenir du transport aérien à très grande vitesse. Son héritage servira peut-être à d'autres pour aller plus loin et plus haut, en s'affranchissant du mur du son... et des investisseurs. L'avenir nous le dira.