Fermeture de Plastivaloire : Crise ou Opportunité ?

Imaginez une petite ville française où le bruit des machines s’arrête soudainement, laissant place à un silence pesant. À Mamers, dans la Sarthe, ce scénario est devenu réalité avec l’annonce de la fermeture de l’usine Plastivaloire, un sous-traitant clé de l’industrie automobile. Cette décision, qui menace 94 emplois, soulève des questions cruciales : comment une région industrielle peut-elle rebondir face à une telle crise ? Cet article explore les causes de cette fermeture, ses impacts, et les opportunités qu’elle pourrait paradoxalement ouvrir.

Une Crise Automobile aux Répercussions Locales

La filière automobile française traverse une tempête sans précédent. Entre la transition vers les véhicules électriques, la concurrence internationale croissante et l’augmentation des coûts des matières premières, les sous-traitants comme Plastivaloire sont en première ligne. L’usine de Mamers, spécialisée dans la fabrication de pièces plastiques injectées, illustre parfaitement les défis auxquels est confrontée l’industrie. Avec 80 % de sa production dédiée à l’automobile, le site est particulièrement vulnérable aux fluctuations du marché.

En 2023-2024, Plastivaloire a enregistré une baisse de son chiffre d’affaires de 7 %, atteignant 703,5 millions d’euros. Cette décroissance, bien que ralentie au deuxième trimestre 2024-2025 (-3 % à 183,8 millions d’euros), reflète un secteur en difficulté. La perte nette de 43,1 millions d’euros, aggravée par la cession d’une filiale allemande, a conduit le groupe à prendre des mesures drastiques, dont la fermeture de Mamers.

Nous savions que les sous-traitants automobiles faisaient face à des perturbations, mais une telle décision est un choc.

– Frédéric Beauchef, maire de Mamers

Les Raisons d’une Fermeture Brutale

Pourquoi fermer une usine comme celle de Mamers ? Plusieurs facteurs convergent. Tout d’abord, la transition électrique bouleverse les besoins en composants automobiles. Les pièces plastiques traditionnelles, comme celles produites à Mamers, sont moins demandées dans les véhicules électriques, qui requièrent des technologies différentes. Ensuite, la hausse des coûts de l’énergie et des matières premières a réduit les marges de l’entreprise, rendant le site non rentable à l’horizon 2026.

Enfin, la concurrence, notamment chinoise, exerce une pression énorme. Entre 2006 et 2021, l’industrie automobile française a perdu 40 % de ses emplois, passant de 289 000 à 175 000 postes. Cette dynamique s’est accélérée en 2024, avec des fermetures en cascade dans la Sarthe, comme celle de Valeo à La Suze-sur-Sarthe ou le plan de sauvegarde de l’emploi chez NTN.

L’Impact Humain : 94 Salariés dans l’Incertitude

Pour les 94 salariés de l’usine Ouest Injection à Mamers, l’annonce de la fermeture, faite le 12 mai 2025, a été un choc. Beaucoup ont appris la nouvelle directement à leur poste de travail, sans préparation. Le transfert de l’activité vers l’usine de Sablé-sur-Sarthe, à 100 kilomètres, n’offre qu’une solution partielle : seuls 18 postes y sont proposés, laissant la majorité des employés face à un avenir incertain.

Le maire de Mamers, Frédéric Beauchef, a exprimé son désarroi face à cette décision, tout en soulignant l’urgence d’accompagner les salariés. La recherche d’un repreneur, imposée par la loi Florange de 2014, est en cours, mais les perspectives sont minces dans un secteur automobile en crise. Le site de 14 000 m², considéré en bon état, pourrait néanmoins attirer des acteurs d’autres industries.

C’est un gâchis. Les salariés sont sous le choc, mais nous devons trouver des solutions.

– Représentant syndical, Plastivaloire Mamers

Une Région Industrielle en Mutation

La Sarthe, historiquement liée à l’automobile, subit de plein fouet cette crise. Outre Plastivaloire, d’autres acteurs majeurs comme Valeo, NTN, et BeLink Solutions ont réduit leurs activités ou fermé des sites. Cette vague de fermetures reflète une transformation profonde de l’industrie automobile, poussée par la décarbonation et l’émergence de nouvelles technologies.

Pourtant, cette crise pourrait être une opportunité. La Sarthe dispose de trois sites industriels clés en main, et le maire de Mamers ambitionne de faire du site Plastivaloire un quatrième. Des entreprises spécialisées dans la mobilité verte ou les technologies avancées pourraient s’intéresser à ces infrastructures pour développer des projets innovants.

Les Défis de la Transition Électrique

La transition vers les véhicules électriques est au cœur des bouleversements actuels. Si elle représente une avancée pour la décarbonation, elle pose des défis majeurs pour les sous-traitants traditionnels. Les pièces plastiques injectées, comme celles produites par Plastivaloire, sont moins utilisées dans les véhicules électriques, qui privilégient des matériaux légers et des composants électroniques complexes.

Pour rester compétitifs, les acteurs de l’industrie doivent investir dans la recherche et le développement. Plastivaloire, par exemple, pourrait réorienter une partie de ses activités vers des secteurs comme la santé ou l’énergie verte, où la demande pour des pièces plastiques techniques reste forte. Cependant, cela nécessite des investissements importants et une vision stratégique à long terme.

Vers une Réindustrialisation Innovante ?

Face à cette crise, la réindustrialisation apparaît comme une solution prometteuse. Le site de Mamers, avec ses 14 000 m², pourrait attirer des startups ou des entreprises innovantes. Par exemple, des acteurs de la mobilité durable, comme ceux développant des batteries ou des systèmes de recyclage, pourraient trouver un intérêt à s’installer dans la région.

Le gouvernement français, via des initiatives comme Choose France, encourage les investissements dans des secteurs stratégiques. La Sarthe pourrait tirer parti de ces programmes pour revitaliser son tissu industriel. Voici quelques pistes pour l’avenir :

• Reconversion des salariés vers des métiers de la transition énergétique.
• Investissements dans des technologies de pointe, comme les composites légers.
• Partenariats avec des startups pour développer des solutions innovantes.

Un Appel à l’Action Collective

La fermeture de l’usine Plastivaloire à Mamers n’est pas une fatalité. Elle doit être vue comme un signal d’alarme pour repenser l’industrie automobile française. Les acteurs locaux, les entreprises et le gouvernement doivent collaborer pour accompagner les salariés et transformer cette crise en opportunité. La loi Florange, qui impose la recherche d’un repreneur, est un premier pas, mais il faut aller plus loin.

Des initiatives comme la création de clusters industriels ou l’attraction de startups technologiques pourraient redynamiser la région. Les salariés, quant à eux, méritent un accompagnement renforcé, avec des formations adaptées aux métiers de demain.

Conclusion : Un Tournant à Saisir

La fermeture de l’usine Plastivaloire à Mamers est un coup dur, mais elle peut aussi être un catalyseur pour le changement. En misant sur l’innovation et la réindustrialisation, la Sarthe a l’opportunité de se réinventer. Les 94 salariés touchés par cette décision méritent des solutions concrètes, et l’industrie automobile française doit relever le défi de la transition écologique. Le futur se construit aujourd’hui : à nous de le façonner avec audace.