Fisker en faillite : la bataille pour ses actifs s’intensifie
Le dépôt de bilan du constructeur de véhicules électriques Fisker, intervenu il y a quelques jours à peine, a déclenché une véritable guerre pour le contrôle de ce qu'il reste de cette startup jadis si prometteuse. Au cœur de cette bataille : le mystérieux fonds d'investissement Heights Capital Management et ses liens étroits avec la société en déroute. Mais au final, qui tirera vraiment les ficelles de la restructuration de Fisker ?
Heights Capital, le créancier qui veut rafler la mise
Lorsque Fisker a contracté en 2023 un prêt de plus de 500 millions de dollars auprès de Heights Capital Management, filiale du géant financier Susquehanna, peu imaginaient que ce deal se transformerait en cheval de Troie. Suite à un défaut de paiement de Fisker fin 2023, Heights a obtenu une hypothèque de premier rang sur l'ensemble des actifs présents et futurs de la startup. Une manœuvre qui lui donne aujourd'hui un levier considérable pour déterminer le sort de Fisker.
Alex Lees, avocat représentant un groupe de créanciers non garantis, a dénoncé lors de la première audience de la procédure de faillite ce qu'il considère comme "un accord terrible pour Fisker et ses créanciers". Selon lui, la startup aurait dû se placer sous la protection de la loi bien plus tôt. Au lieu de ça, elle aurait passé les derniers mois à brader ses actifs au profit de Heights, en dehors de tout contrôle judiciaire.
Des accusations "totalement déplacées" pour Heights
Des allégations vigoureusement contestées par Scott Greissman, avocat de Heights Capital. Dénonçant des propos "conçus pour faire des titres dans les médias", il a rappelé que son client avait accepté d'étendre "un crédit énorme" à Fisker et qu'il était aujourd'hui le créancier le plus exposé, avec plus de 180 millions de dollars en jeu. Même la vente du stock restant de 4300 SUV Fisker Ocean ne suffirait selon lui à rembourser qu'une fraction de cette dette colossale.
D'autres actifs à valoriser ?
Si les véhicules en stock constituent le principal actif tangible de Fisker, d'autres éléments pourraient intéresser des repreneurs potentiels, comme ses équipements de production dernier cri :
- 180 robots d'assemblage
- Une ligne complète d'assemblage des soubassements
- Un atelier peinture ultra-moderne
Des outils high-tech qui pourraient aider Fisker à préserver une partie de sa valeur. Mais de nombreux doutes subsistent quant à la capacité de la société à attirer des investisseurs, alors que l'avenir même de la procédure de restructuration est incertain.
Même avec une vente de la flotte, le chapitre 11 pourrait ne pas être viable.
Scott Greissman, avocat de Heights Capital
Un dépôt de bilan tardif qui pose question
Au-delà de la fronde des créanciers, c'est le timing même du placement sous le régime des faillites (chapitre 11) qui interroge. Selon plusieurs observateurs, dont le cabinet du syndic américain, Fisker aurait dû franchir le pas bien plus tôt. Un constat partagé du bout des lèvres par l'avocat de Heights Capital lui-même, pour qui les différends auraient été "plus faciles à résoudre" si la procédure avait été enclenchée plus tôt. Le juge en charge de l'affaire a d'ailleurs salué le travail du syndic, contraint de se plonger en urgence dans cet épineux dossier.
La prochaine étape clé sera l'audience du 27 juin, qui devrait permettre d'y voir plus clair sur les projets de reprise des actifs de Fisker. La startup parviendra-t-elle à s'extirper de l'ornière et à préserver une partie de son héritage ? Les différentes parties prenantes, créanciers en tête, suivront cela de très près. Une chose est sûre : même en cas de sauvetage, l'image de la marque restera durablement ternie par ce bruyant naufrage industriel et financier.