Forvia : vers un avenir radieux pour l’équipementier auto
Dans une interview exclusive accordée à notre rédaction, Patrick Koller, le directeur général sur le départ de l'équipementier automobile Forvia, revient sur son bilan à la tête du groupe et les transformations majeures opérées ces dernières années. L'occasion aussi d'évoquer les défis auxquels fait face le secteur automobile, entre surcapacités et restructurations nécessaires.
Un nouveau chapitre pour Forvia et son dirigeant
Après presque une décennie passée à diriger Faurecia, devenu Forvia suite à la fusion avec l'allemand Hella en 2022, Patrick Koller s'apprête à passer la main. Un départ mûrement réfléchi, comme il l'explique :
Cela fait presque dix ans que je suis à la tête de cette société. Nous avions convenu avec le Conseil d'administration qu'il fallait s'occuper de ma succession.
– Patrick Koller, DG de Forvia
Son successeur, Martin Fischer, un fin connaisseur de l'automobile ayant officié chez ZF, a fait l'unanimité. Patrick Koller se dit confiant dans sa capacité à poursuivre le développement de Forvia.
Une transformation en profondeur
Lors de son passage aux commandes, Patrick Koller a orchestré une véritable mue du groupe, recentré sur la technologie et l'électronique. Exit les activités traditionnelles jugées peu porteuses, focus mis sur les solutions d'avenir :
On a vendu toutes ces activités, y compris les activités de modules, et on a acheté de l'électronique, de la technologie. On l'a fait avec Hella, mais pas seulement.
Un virage technologique qui s'est accompagné d'un rééquilibrage géographique, avec un accent mis sur l'Asie et en particulier la Chine, marché clé en pleine croissance. Le portefeuille clients a aussi été élargi, pour mieux répartir les risques.
Les défis d'un marché automobile en souffrance
Si Forvia semble avoir résolu son "équation stratégique" dixit Patrick Koller, le secteur auto traverse une passe difficile. Surcapacités de production, restructurations... Les maux sont nombreux, surtout en Europe. L'équipementier a d'ailleurs annoncé en février 2024 un plan de 10 000 suppressions de postes.
Des ajustements douloureux mais nécessaires selon Patrick Koller, qui n'exclut pas des fermetures de sites en France, en fonction des décisions des clients constructeurs. Un redimensionnement vital pour adapter l'outil industriel aux réalités du marché.
Quel avenir pour la filière automobile européenne ?
Face à la concurrence exacerbée, notamment chinoise, faut-il instaurer en Europe des droits de douane sur le modèle américain pour protéger l'industrie locale ? Patrick Koller appelle à la prudence :
Quand on distord la compétition, on perd généralement en compétitivité. [...] Il faut faire attention. L'industrie européenne automobile a souffert. Elle doit se transformer peut-être encore davantage que dans d'autres régions.
Plutôt que le protectionnisme, il plaide pour des conditions de concurrence équitables, avec des règles de contenu local imposées aux acteurs étrangers souhaitant opérer en Europe. Une approche plus mesurée pour préserver la compétitivité de la filière.
Un nouveau rapport de force avec les constructeurs
Interrogé sur le départ brutal de Carlos Tavares de la direction de Stellantis, un client historique, Patrick Koller reste prudent. Mais il souligne l'interdépendance croissante entre équipementiers et constructeurs :
Ces temps où le constructeur pouvait peut-être imposer un certain nombre de choses sont révolus. [...] Plus l'innovation sera de notre côté, plus ce sera le cas.
Forvia entend bien capitaliser sur son avance technologique et sa vision globale du marché pour renforcer sa position face aux constructeurs. Un atout de poids pour appréhender la révolution de l'industrie automobile.
Au final, cet entretien avec Patrick Koller offre un éclairage passionnant sur les transformations à l'œuvre chez Forvia et plus largement dans le secteur automobile. Malgré les incertitudes et les défis, l'équipementier semble avoir trouvé sa voie pour s'imposer comme un acteur incontournable de la mobilité de demain.