Fusion Honda-Nissan : Naissance d’un géant automobile
Qui l'eût cru ? Les éternels rivaux japonais Honda et Nissan ont annoncé ce lundi 23 décembre leur intention de fusionner d'ici août 2026 pour donner naissance à un nouveau mastodonte de l'automobile. Avec un chiffre d'affaires combiné de plus de 180 milliards d'euros et un objectif affiché de 18 milliards d'euros de bénéfices, cette union promet de rebattre les cartes sur l'échiquier mondial.
Pourquoi une telle alliance ?
Alors que l'industrie automobile traverse une période de profondes mutations, entre électrification accélérée, course à l'innovation technologique et concurrence exacerbée des acteurs chinois, les constructeurs historiques sont contraints de revoir leur stratégie. En unissant leurs forces, Honda et Nissan espèrent dégager d'importantes synergies, aussi bien en termes de R&D que d'achats ou de capacités de production.
Développement conjoint des technologies clés
Au coeur de ce mariage se trouve la volonté de mettre en commun les efforts de développement sur les technologies d'avenir, à commencer par les motorisations électriques. Les deux groupes avaient déjà noué un partenariat en mars dernier sur ce sujet, qu'ils entendent désormais approfondir. Batteries, systèmes de gestion de l'énergie, plateformes modulaires... Tous les leviers seront activés pour rattraper le retard sur les champions chinois comme BYD.
Cet accord n'est pas pragmatique : les synergies entre les entreprises sont difficiles à trouver. Il n'y a pratiquement aucune complémentarité entre elles.
Carlos Ghosn, ex-patron de Nissan
Optimisation des capacités industrielles
Autre axe majeur : la rationalisation de l'outil de production. Avec des usines présentes aux quatre coins du globe, Honda et Nissan disposent de solides bases pour optimiser leur empreinte industrielle. Spécialisation des sites par grandes zones géographiques, modernisation accélérée, économies d'échelle sur les achats... Les leviers d'amélioration de la performance sont nombreux et pourraient permettre d'importantes économies.
La nouvelle entité ambitionne ainsi de réduire ses coûts de production de près de 20% à l'horizon du plan. De quoi redonner de l'air à Nissan, englué dans les difficultés depuis de nombreux mois et contraint de sabrer dans ses effectifs.
Renault, le grand perdant ?
Si ce "mariage entre égaux" semble couler de source sur le papier, il n'en soulève pas moins des interrogations sur l'avenir de l'Alliance avec Renault. Déjà mal en point depuis l'éviction rocambolesque de Carlos Ghosn fin 2018, le constructeur français apparaît aujourd'hui comme le grand perdant de l'opération.
Nissan, dont il détient encore 15% du capital, lui échappe désormais totalement au profit d'un concurrent qui pèsera deux fois plus lourd que lui. Selon certaines sources, Renault envisagerait d'ailleurs de céder une partie de ses parts au taïwanais Foxconn. Histoire de renflouer quelque peu ses caisses, mais surtout d'acter une profonde refonte de sa stratégie asiatique.
Quels changements pour les clients ?
Au-delà des impacts financiers et industriels, cette fusion promet aussi son lot de nouveautés pour les clients et utilisateurs finaux. Avec un portefeuille de marques étoffé, couvrant un large spectre de segments et de cibles, le futur ensemble devrait être en mesure de proposer une offre à la fois plus cohérente et diversifiée.
Il faudra toutefois veiller à préserver l'identité et le positionnement de chacune des marques, un exercice d'équilibriste délicat s'il en est. Mais les exemples de Volkswagen ou Stellantis ont démontré qu'une bonne gestion de la « marque ombrelle » pouvait s'avérer payante.
L'électrification comme fil rouge
Autre conséquence directe pour les consommateurs : une accélération de l'électrification des gammes. Déjà bien engagés sur cette voie, Honda comme Nissan devraient profiter de leur alliance pour proposer une palette de modèles « zéro émission » à la fois plus étoffée et abordable.
De quoi répondre à une demande en forte hausse, notamment sur les marchés matures, tout en se conformant aux strictes normes réglementaires qui se profilent, en Europe comme en Chine. Un levier de conquête indispensable pour espérer rivaliser avec Tesla ou les ambitieux nouveaux entrants asiatiques.
Un nouveau géant est né
Avec cette fusion, c'est un véritable séisme qui s'annonce dans l'industrie automobile mondiale. Honda et Nissan ont beau jeu de mettre en avant les synergies et complémentarités de l'opération, il n'en demeure pas moins que celle-ci ressemble aussi à un mariage de raison dicté par les difficultés de Nissan.
Mais qu'importe les motifs de chacun, le résultat risque bien d'être le même : la naissance d'un nouveau mastodonte qui comptera désormais dans le Top 5 mondial au coude à coude avec General Motors et Hyundai-Kia. De quoi rebattre les cartes et intensifier un peu plus la concurrence sur un marché en pleine recomposition.
Reste désormais à concrétiser ce projet titanesque et à démontrer la pertinence de cette stratégie sur le long terme. Un défi de taille pour ces deux géants japonais qui devront réussir leur mue tout en préservant leurs atouts respectifs. L'avenir nous dira s'ils ont visé juste, mais une chose est sûre : l'automobile mondiale ne sera plus jamais comme avant !