GazelEnergie relance sa centrale biomasse de Provence grâce à une aide de 800 M€
Après plus d'un an d'arrêt et d'intenses négociations avec l'État, la centrale biomasse de Provence à Gardanne, exploitée par GazelEnergie, va pouvoir redémarrer. Le ministère de l'énergie a en effet annoncé mardi un nouveau contrat d'achat d'électricité sur 8 ans, assorti d'une aide publique de 800 millions d'euros. De quoi redonner un souffle à cette installation industrielle contestée.
Un site emblématique mais fragile
Mise en service en 2018 sur le site d'une ancienne centrale à charbon, l'unité biomasse de 150 MW avait été présentée comme un projet phare de transition énergétique pour la région. Las, son activité a été pour le moins chaotique depuis :
- Importants conflits sociaux suite à l'arrêt du charbon
- Dénonciation par GazelEnergie de son contrat d'achat d'électricité en 2022
- Arrêt de la production depuis décembre 2023
Les 95 salariés directs et 550 employés de sous-traitants retenaient donc leur souffle quant à l'issue des âpres discussions entre l'énergéticien tchèque et le gouvernement français. C'est chose faite avec cet accord trouvé in extremis.
Les détails de l'accord
Pour éviter une fermeture définitive, l'État a donc consenti un effort conséquent. Sur 8 ans (potentiellement prolongeable à 10), le tarif de rachat de l'électricité issue de la biomasse atteindra 250 à 260 €/MWh. Des conditions nettement revues à la hausse par rapport au précédent contrat, mais jugées indispensables par GazelEnergie pour assurer la rentabilité de la centrale.
Toutefois, le volume de production sera limité à 4000 heures par an, contre 8000 auparavant. De quoi réduire la consommation annuelle de biomasse de la centrale à 450 000 tonnes. Soit un revenu garanti d'environ 1,2 milliard d'euros sur la période pour GazelEnergie, dont 800 millions d'aides publiques.
Un soulagement pour les salariés et la filière bois
Côté syndicats, on se félicite de cet accord qui vient « sécuriser l'ensemble des emplois liés à l'activité biomasse » et annule la procédure de chômage partiel. Au-delà des salariés de la centrale elle-même, ce sont aussi les nombreux emplois indirects dans la filière bois locale qui semblent pérennisés, notamment via l'approvisionnement depuis le port de Fos-sur-Mer.
La CGT espère désormais pouvoir avancer sur son projet de production de biométhane par pyrogazéification pour redynamiser le site. De son côté, GazelEnergie envisage l'implantation d'un supercalculateur dédié à l'IA ou d'une usine de recyclage chimique des vêtements.
Des questions environnementales en suspens
Malgré cette bouffée d'air économique, la centrale reste sous le feu des critiques environnementales. Son autorisation d'exploitation a d'ailleurs été annulée en mars 2023 par le Conseil d'État, qui réclamait une étude d'impact plus complète. Le site fonctionne depuis lors grâce à un arrêté dérogatoire temporaire.
Les opposants dénoncent notamment le bilan carbone de la biomasse importée, en grande partie depuis l'étranger, ainsi que les risques de déforestation et de conflits d'usage engendrés par de tels prélèvements. Des points sur lesquels GazelEnergie devra apporter des réponses convaincantes dans les mois à venir, tout en menant à bien ses projets de reconversion.
La centrale biomasse de Provence n'a donc pas fini de faire parler d'elle. Soumise à une vigilance accrue sur ses pratiques d'approvisionnement, elle va devoir démontrer qu'une production d'énergie renouvelable à grande échelle peut être compatible avec les impératifs de protection des forêts et de la biodiversité. Un défi de taille, à la hauteur des enjeux de la transition énergétique.
Une chose est sûre : cette « seconde chance » accordée au site de Gardanne sera scrutée de près. Par les salariés et leurs familles, qui voient leur avenir s'éclaircir. Par les acteurs de la filière bois, en quête de nouveaux débouchés durables. Mais aussi par les citoyens et les défenseurs de l'environnement, qui attendent des preuves tangibles de la responsabilité écologique des grands projets industriels. Rendez-vous dans quelques mois pour un premier bilan.