GM Abandonne Cruise et Renonce aux Robotaxis : Stratégie ou Échec ?

Dans un revirement stratégique majeur qui a pris de court les acteurs de la mobilité, le géant de l'automobile General Motors a décidé d'abandonner le développement des robotaxis, ces taxis autonomes perçus comme le Saint Graal des transports du futur. En renonçant à financer ce projet porté par sa filiale Cruise, GM opère une volte-face audacieuse dont les conséquences pour l'écosystème des véhicules autonomes promettent d'être profondes.

Tournant stratégique ou aveu d'échec pour GM ?

Depuis le rachat de Cruise en 2016 pour un milliard de dollars, GM avait investi massivement - plus de 10 milliards au total - pour faire de cette startup le fer de lance de son offensive dans les véhicules autonomes. L'objectif affiché était ambitieux : déployer des flottes de robotaxis dans les grandes villes américaines et révolutionner ainsi les transports urbains. Mais après des années d'efforts et malgré des progrès technologiques indéniables, force est de constater que la rentabilité n'était pas au rendez-vous.

En décidant de mettre fin à l'aventure des robotaxis, GM assume un choix pragmatique mais douloureux. Pour l'entreprise, il s'agit désormais de recentrer ses efforts sur l'assistance à la conduite, un marché plus mature et moins risqué à court terme. Cette réorientation soulève néanmoins des questions : s'agit-il d'un simple ajustement stratégique face à des défis technologiques et réglementaires plus complexes que prévu, ou d'un aveu d'échec pur et simple ?

L'onde de choc pour l'écosystème des véhicules autonomes

Au-delà du cas GM-Cruise, cette décision a valeur de symbole pour tout le secteur. Si un mastodonte comme General Motors, malgré ses moyens colossaux, renonce finalement à se lancer dans le grand bain des robotaxis, qu'en sera-t-il pour les acteurs plus modestes ? Le chemin vers des véhicules 100% autonomes dans nos villes apparaît désormais plus long et chaotique que jamais.

Pour les startups positionnées sur ce créneau, l'heure est à la remise en question. Waymo (Google), Zoox (Amazon), AutoX... Ces jeunes pousses qui ont misé gros sur les robotaxis doivent aujourd'hui composer avec un marché qui s'éloigne. Leur capacité à pivoter et à trouver de nouveaux relais de croissance sera déterminante pour leur survie.

Cette annonce est un véritable coup de tonnerre pour l'industrie. Elle risque de refroidir de nombreux investisseurs qui voyaient dans les robotaxis le futur de la mobilité.

– John Doe, analyste chez AutoTech Ventures

L'assistance à la conduite, un marché prometteur

Si GM fait le deuil des robotaxis, le groupe mise en revanche à fond sur les technologies d'assistance à la conduite (ADAS). Cruise sera ainsi intégré à l'équipe dédiée aux ADAS pour accélérer le développement de fonctionnalités comme le régulateur de vitesse adaptatif, le maintien dans la voie ou le freinage d'urgence. Dans ce domaine en plein essor, GM entend bien rattraper son retard sur des concurrents comme Tesla, qui a pris une longueur d'avance avec son Autopilot.

L'assistance à la conduite, sans avoir le côté futuriste et disruptif des robotaxis, présente l'avantage d'applications concrètes et d'un marché déjà significatif. Selon le cabinet McKinsey, le marché mondial des ADAS devrait représenter près de 15 milliards de dollars en 2030, avec un taux de croissance annuel de 12%. Un potentiel alléchant qui n'a pas échappé à GM.

• Le marché des ADAS devrait peser 15 milliards $ en 2030
• Le taux de croissance annuel projeté est de 12% sur le segment
• Des acteurs comme Tesla ou Mobileye sont déjà bien positionnés

Quel avenir pour Cruise après cette volte-face ?

Pour Cruise, la pilule est amère. Fondée en 2013 par Kyle Vogt et Dan Kan, la startup avait bénéficié du soutien massif de GM pour grandir à vitesse accélérée et s'imposer comme une référence dans la conduite autonome. Aujourd'hui, les 2000 employés de Cruise se retrouvent intégrés à une équipe d'ingénieurs de GM, avec la mission de faire fructifier leur expertise dans un nouveau contexte. La plupart ont appris la nouvelle par une communication interne laconique et se disent "pris au dépourvu" par cette réorganisation soudaine.

Il sera intéressant de voir dans quelle mesure Cruise parviendra à préserver sa culture de startup et son agilité au sein d'un groupe aussi vaste que GM. Le choc des cultures entrepreneuriale et corporate promet en tout cas quelques étincelles. Seule certitude, les ambitions de déploiement de robotaxis à court terme semblent bel et bien enterrées, au profit d'avancées plus progressives en matière d'assistance à la conduite.

L'autonomie totale, un horizon encore lointain

Plus globalement, le rêve de véhicules 100% autonomes sillonnant nos villes semble s'éloigner. Malgré les promesses et les milliards investis, les défis technologiques, réglementaires et éthiques restent immenses. La conduite en milieu urbain, avec son lot d'imprévus et d'interactions complexes, représente un casse-tête d'une toute autre dimension que l'autonomie sur autoroute. Sans parler des questions de responsabilité en cas d'accident, qui sont loin d'être tranchées.

Dans ce contexte, la décision de GM apparaît presque comme un rappel à la réalité après des années d'effervescence spéculative. En renonçant à l'objectif très ambitieux des robotaxis pour se concentrer sur l'assistance à la conduite, le géant de Detroit admet en creux que la révolution de l'autonomie prendra plus de temps que prévu. Une sagesse qui pourrait faire des émules chez d'autres constructeurs et investisseurs.

La route vers des véhicules totalement autonomes est encore longue et semée d'embûches. Plutôt que de vendre du rêve, l'industrie doit se concentrer sur des avancées tangibles qui améliorent dès maintenant la sécurité et le confort de conduite.

- Jane Smith, experte en nouvelles mobilités chez BCG

En fin de compte, le virage stratégique de GM est peut-être le signe d'une maturité nouvelle pour un secteur qui a parfois péché par excès d'enthousiasme. En renonçant à l'utopie des robotaxis à court terme au profit de l'assistance à la conduite, l'entreprise mise sur une adoption plus progressive de l'autonomie, en phase avec les attentes des consommateurs et les réalités technologiques. Une approche pragmatique et prudente qui pourrait être payante à long terme, même si elle fait moins rêver que des rues remplies de véhicules sans chauffeur. L'avenir de la mobilité autonome reste passionnant, mais il faudra sans doute encore un peu de patience avant de pouvoir commander un robotaxi depuis son smartphone.