Groq et Nvidia : Un Deal à 20 Milliards avec Racines Canadiennes
Imaginez un instant : une startup spécialisée dans l'intelligence artificielle conclut un partenariat d'une valeur astronomique avec le géant Nvidia. Et au milieu de cette transaction colossale, des investisseurs canadiens et des talents issus du pays se retrouvent sous les projecteurs. C'est exactement ce qui s'est passé avec Groq, une entreprise qui fait parler d'elle bien au-delà de la Silicon Valley.
Cette histoire illustre parfaitement à quel point l'écosystème technologique canadien s'est imposé sur la scène mondiale de l'IA. Derrière les chiffres impressionnants se cache une aventure entrepreneuriale où le Canada joue un rôle bien plus important qu'on ne l'imagine.
Le partenariat Groq-Nvidia : un tournant majeur dans l'IA
À la fin de l'année 2025, Nvidia a annoncé un accord spectaculaire avec Groq, la startup californienne spécialisée dans les processeurs dédiés à l'inférence d'intelligence artificielle. Officiellement présenté comme un partenariat de licence non exclusif, cet accord est évalué à environ 20 milliards de dollars américains.
Mais au-delà des apparences, nombreux sont ceux qui y voient une forme d'acquisition déguisée. Groq conserve son indépendance, mais plusieurs de ses cadres dirigeants rejoignent Nvidia, et l'entreprise cède une licence sur sa propriété intellectuelle. Un modèle hybride qui devient courant dans le secteur de l'IA.
Ce deal arrive à un moment où Nvidia domine largement le marché des puces pour l'intelligence artificielle. Avec une capitalisation boursière ayant frôlé les 5 000 milliards de dollars, le géant américain cherche à consolider sa position face à la concurrence et aux régulateurs antitrust.
Groq : des origines liées à Google à une valorisation explosive
Fondée en 2016 par d'anciens ingénieurs de Google, Groq s'est spécialisée dans les Language Processing Units (LPU), des puces conçues spécifiquement pour faire tourner les grands modèles de langage de manière ultra-rapide et efficace.
Contrairement aux GPU polyvalents de Nvidia, les LPU de Groq excellent dans l'inférence, c'est-à-dire l'exécution des modèles d'IA déjà entraînés. Cette spécialisation a permis à l'entreprise d'attirer l'attention des géants du cloud et des développeurs d'applications IA.
En septembre 2025, Groq était valorisée à près de 7 milliards de dollars. L'entreprise visait même un chiffre d'affaires de 500 millions pour l'année. Des chiffres impressionnants pour une société encore jeune.
Les investisseurs canadiens au cœur du succès
L'un des aspects les plus fascinants de cette opération reste la forte présence canadienne parmi les premiers soutiens de Groq. Dès les débuts, des fonds et entrepreneurs du pays ont cru dans le potentiel de cette technologie.
Chamath Palihapitiya, investisseur canadien-américain bien connu, a joué un rôle déterminant. À travers son fonds Social Capital, il a mené le tour de série A de 10 millions de dollars en 2017, puis participé à d'autres levées. Il a même siégé au conseil d'administration jusqu'en 2021.
Il y a une opportunité de construire une nouvelle pile technologique permettant à un large écosystème d'apprentissage automatique de propulser la plupart des applications logicielles.
– Extrait du mémo d'investissement de Chamath Palihapitiya, 2016
Autre acteur clé : Garage Capital, le fonds basé à Kitchener-Waterloo. Créé par les cofondateurs de Vidyard, Michael Litt, Mike McCauley et Devon Galloway, ce fonds pré-seed et seed a participé à plusieurs tours d'investissement dans Groq.
Mike McCauley, qui a connu le fondateur de Groq Jonathan Ross chez Google X, parle d'un retour exceptionnel pour son fonds. Sans dévoiler les chiffres exacts, il qualifie cette sortie de "résultat fabuleux" et du plus important en dollars pour Garage Capital.
Nous sommes simplement excités d'avoir fait partie de ce parcours, de voir Groq depuis ses débuts jusqu'à un dénouement aussi incroyable.
– Mike McCauley, Garage Capital
Cambium Capital, avec son managing partner Landon Downs à Vancouver, a également investi lors du tour de série B. Une présence canadienne diversifiée géographiquement et stratégiquement.
Une forte empreinte canadienne chez Groq
Au-delà des investisseurs, Groq compte une présence opérationnelle significative au Canada. L'entreprise emploie environ 90 personnes dans le pays, avec un bureau important à Toronto.
Plusieurs cadres canadiens ont occupé des postes clés. Adrian Mendes, diplômé de l'Université de Waterloo, a été directeur des opérations de 2018 à 2023. Sunny Madra, président de Groq et diplômé de l'Université d'Ottawa, rejoint Nvidia en tant que vice-président hardware.
Ces talents canadiens bénéficient directement de l'accord. Selon les informations disponibles, la grande majorité des employés de Groq reçoivent un paiement en cash pour leurs actions acquises, que ce soit en rejoignant Nvidia ou en restant chez Groq.
Groq et l'écosystème IA canadien
Groq n'a pas seulement bénéficié du Canada ; l'entreprise y a aussi contribué activement. En mai 2025, elle a signé un partenariat avec Bell pour fournir puces et technologie d'inférence dans la construction de six centres de données IA en Colombie-Britannique.
Cette collaboration illustre comment les technologies développées par Groq s'intègrent dans les infrastructures canadiennes. Elle renforce aussi la position du Canada comme hub important pour le déploiement de l'intelligence artificielle à grande échelle.
Dans un contexte où Nvidia domine largement les chaînes d'approvisionnement IA mondiales, y compris au Canada, ce partenariat prend une dimension stratégique supplémentaire.
Un modèle d'acquisition qui se généralise dans l'IA
Ce type d'accord "acqui-hire" avec licence IP devient une tendance dans le secteur. Les géants absorbent les talents et technologies clés tout en laissant une coquille indépendante, évitant parfois les scrutins réglementaires.
Nvidia a déjà adopté cette stratégie avec d'autres entreprises, comme l'acquisition de la startup canadienne CentML spécialisée dans l'optimisation IA. Des partenariats avec Telus ou des investissements massifs dans les universités canadiennes montrent l'intérêt croissant pour l'écosystème local.
Cette approche permet aux grands acteurs de consolider leur domination tout en offrant des sorties lucratives aux investisseurs précoces – comme ceux du Canada dans le cas de Groq.
- Accès rapide à des technologies de pointe
- Intégration de talents expérimentés
- Sorties financières attractives pour les investisseurs early-stage
- Contournement partiel des régulateurs antitrust
Ce que cela signifie pour l'écosystème startup canadien
L'histoire de Groq démontre que les investisseurs canadiens peuvent obtenir des retours exceptionnels en soutenant très tôt des projets ambitieux dans l'IA. Garage Capital, avec ses investissements répétés, montre qu'une approche patiente et convictionnelle peut payer.
Elle met aussi en lumière la qualité des talents formés dans les universités canadiennes, particulièrement à Waterloo et Ottawa, qui se retrouvent aux postes clés des startups mondiales de technologie.
Enfin, elle renforce l'attractivité du Canada comme terre d'accueil pour les entreprises tech étrangères souhaitant développer leurs activités en Amérique du Nord.
Dans un monde où l'IA redéfinit les équilibres économiques, ces connexions canadiennes avec les leaders mondiaux constituent un atout stratégique majeur. L'histoire de Groq n'est probablement que le début d'une série de succès similaires pour l'écosystème tech du pays.
Alors que 2025 s'achève sur cette note spectaculaire, une question demeure : quelles seront les prochaines startups canadiennes ou soutenues par le Canada à connaître une trajectoire aussi fulgurante ? L'avenir de l'intelligence artificielle semble plus que jamais passer, en partie, par le nord.