
La BDC injecte près d’1 milliard $ dans les startups tech
Dans un contexte économique incertain, comment continuer à soutenir la croissance des startups technologiques au Canada ? C'est le défi que relève la Banque de développement du Canada (BDC) avec l'annonce de près d'1 milliard de dollars de nouveaux investissements ciblant les entreprises tech en phase avancée.
Deux fonds pour booster les startups tech en phase avancée
Via son bras armé BDC Capital, la banque publique d'investissement va déployer :
- 500 millions $ dans son Growth Venture Fund (GVF), qui pourra désormais investir directement et en co-investissement dans les startups tech.
- 450 millions $ dans son programme Growth Equity Partners (GEP), dédié aux prises de participation minoritaires.
L'objectif : permettre aux entrepreneurs de traverser la période d'incertitude actuelle (inflation, hausse des taux, pénurie de main d'œuvre, tensions commerciales...) en partageant les risques. Comme l'explique Geneviève Bouthillier, vice-présidente exécutive de BDC Capital :
« Ce que nous visons, c'est de partager les risques avec les entreprises pour qu'elles puissent poursuivre leur croissance. »
Geneviève Bouthillier, vice-présidente exécutive de BDC Capital
Combler le manque de financement en stade avancé
Ces investissements massifs visent à combler un manque de financement pour les startups technologiques en phase avancée au Canada. Un problème souligné dans le dernier rapport de BDC Capital sur le capital-risque :
- Les investissements dans les startups en stade avancé ont chuté de près de 50% en 2023 vs 2022.
- Le nombre de deals a reculé de 19% sur la même période.
Sans accès aux capitaux pour poursuivre leur développement, les startups canadiennes risquent de devoir se tourner vers des investisseurs étrangers. Un scénario que veut éviter BDC pour assurer la croissance de ces pépites technologiques au Canada. Le nouveau fonds GVF a d'ailleurs déjà été déployé dans la plateforme StackAdapt.
Une approche pas forcément partagée
Certains acteurs de l'écosystème tech canadien estiment cependant que les efforts de BDC devraient plutôt cibler les startups en phase d'amorçage et de démarrage. C'est le cas de Mark McQueen, ex-président d'Innovation Banking chez CIBC :
« Le plus gros problème se situe au niveau des startups en phase d'amorçage et de démarrage. Si le gouvernement doit faire un effort, c'est là qu'il devrait mettre son argent. »
Mark McQueen, ex-président d'Innovation Banking chez CIBC
Les chiffres semblent lui donner raison : si le financement global des startups canadiennes a été soutenu par quelques méga-deals en 2024, les investissements en amorçage sont en retrait. Sans compter la dette venture qui a atteint des records, signe que les startups en phase avancée arrivent à trouver des financements.
Mais pour BDC Capital, pas question d'abandonner les startups early-stage. La banque souligne rester "très active et impliquée" sur ce segment, avec notamment une enveloppe de 50 millions $ pour son fonds d'amorçage dédié (SVF) lancé en 2023.
Un changement de stratégie à risque pour BDC Capital ?
Ce virage vers l'investissement direct dans les startups en phase avancée n'est cependant pas sans risque pour BDC Capital. Sa stratégie pourrait en effet créer des frictions avec les autres fonds présents sur ce segment, dans un contexte de fundraising particulièrement tendu.
Avec seulement 500 millions $ levés par 5 fonds canadiens au 1er semestre 2024, l'année s'annonce comme la pire depuis 2014 en termes de collecte pour le capital-risque au Canada. L'arrivée de BDC Capital en investissement direct sur les deals en phase avancée pourrait donc intensifier la compétition.
D'autant que la banque publique affiche près de 60 fonds externes dans son portefeuille indirect, dont certains spin-outs comme Framework Venture Partners et Amplitude Ventures. Le nouveau mandat du GVF pourrait le mettre en concurrence frontale avec ces fonds sur certains deals.
Interrogée sur ce potentiel changement stratégique, Geneviève Bouthillier assure que BDC Capital reste focalisée sur les marchés directs ET indirects. Pas sûr cependant que cela suffise à lever les doutes, alors que BDC a dû déprécier son portefeuille de capital-risque de 220 millions $ dans son dernier rapport annuel...