La croissance explosive d’une communauté d’entrepreneurs autochtones en tech
Il n'y a pas si longtemps, être un entrepreneur autochtone dans le secteur technologique pouvait s'avérer une expérience très solitaire. C'est du moins le constat qu'avait fait Ryan St. Germaine, un entrepreneur en série et fondateur de startups d'origine métisse de Colombie-Britannique. Las de chercher en vain des pairs partageant ses origines lors d'événements tech, il a décidé de prendre les choses en main. En partant d'une simple question - "Où sont les acteurs autochtones de la tech ?" - il a réussi en quelques années à fédérer une communauté vibrante de plus de 340 entrepreneurs, dirigeants et professionnels autochtones du numérique.
Des rencontres informelles à une organisation structurée
Tout a commencé pendant la pandémie, lorsqu'un noyau initial d'entrepreneurs et de professionnels autochtones a commencé à se retrouver de manière informelle sur Slack. Au fil des mois et du bouche-à-oreille, le groupe s'est étoffé jusqu'à compter des centaines de membres répartis à travers les États-Unis et le Canada. Le 21 juin 2024, lors de la Journée nationale des peuples autochtones, cette communauté s'est officiellement constituée en association à but non lucratif baptisée Indigenous Tech Circle.
Aujourd'hui, le Cercle propose à ses membres de multiples opportunités d'échanges et de réseautage : des rencontres mensuelles, des ateliers, des séances d'introduction hebdomadaires pour les nouveaux adhérents, ainsi que des équipes sur mesure rassemblant des personnes travaillant dans des entreprises similaires ou des fondateurs à des stades de croissance comparables.
Un lieu d'appartenance et d'entraide
Au-delà des événements, l'Indigenous Tech Circle offre à ses membres un précieux sentiment de communauté et d'appartenance. Comme l'explique Ryan St. Germaine, beaucoup avaient du mal à se sentir pleinement eux-mêmes dans les environnements professionnels classiques.
Dans notre Cercle, les entrepreneurs et professionnels autochtones peuvent se retrouver dans un cadre bienveillant, collaborer et réfléchir ensemble à la façon de faire avancer les choses d'une manière qui ait du sens pour nous. Pouvoir simplement être soi-même dans cet espace partagé, c'est incroyable.
– Ryan St. Germaine, fondateur de l'Indigenous Tech Circle
Le fondateur évoque notamment le parcours d'un développeur originaire du Montana qui, faute d'interlocuteurs, en était réduit à discuter de technologie avec ChatGPT. "Maintenant, il peut échanger avec nous", se réjouit Ryan St Germaine.
Briser les barrières et les biais systémiques
Si la création de cette communauté s'avérait indispensable, c'est que les talents autochtones restent encore largement sous-représentés dans l'écosystème tech. D'après une étude de l'Université métropolitaine de Toronto, seulement 2,2% de l'ensemble de la main-d'œuvre technologique canadienne est d'origine autochtone. Du côté des startups, à peine 0,004% du capital-risque est investi dans des entreprises dirigées par des autochtones selon BDC Capital.
Pour Ryan St. Germaine, ces disparités découlent principalement des biais et des barrières systémiques auxquels se heurtent les peuples autochtones. "Il y a eu du racisme systémique par le passé, et il serait ridicule de prétendre le contraire", déclare-t-il. "Le problème, c'est qu'il y a une méfiance générale réciproque entre les institutions et les communautés autochtones, alimentée par des préjugés tenaces dans le système."
Il est cependant convaincu que la meilleure façon d'abattre ces barrières est de miser sur l'entrepreneuriat et de placer davantage d'autochtones à des postes d'influence.
En nous impliquant dans de formidables entreprises technologiques et en occupant des positions de pouvoir, je pense que nous créerons un véritable changement systémique.
– Ryan St. Germaine, fondateur de l'Indigenous Tech Circle
Une visibilité et une portée croissantes
Au-delà du soutien apporté à ses membres, l'Indigenous Tech Circle oeuvre à rendre plus visibles les réussites et le potentiel des entrepreneurs autochtones en tech. Une démarche également vectrice d'inspiration pour les jeunes générations.
- Le Cercle répertorie sur son site les startups technologiques fondées et dirigées par des autochtones.
- L'association est régulièrement mise en avant dans les médias spécialisés et intervient lors de grands événements du secteur.
- Elle développe des partenariats avec de grandes entreprises technologiques, des investisseurs et des institutions.
Le message porté par l'Indigenous Tech Circle est on ne peut plus clair et déterminé :
J'ai démontré de manière irréfutable que c'est faux de dire qu'il n'y a pas d'autochtones dans la tech. Nous sommes là. Nous réussissons. Nous avons réussi, et nous avons besoin d'aide pour créer la flamme.
– Ryan St. Germaine, fondateur de l'Indigenous Tech Circle
Une flamme bien partie pour éclairer la voie à de plus en plus d'entrepreneurs et de professionnels autochtones dans les années à venir, et, qui sait, inspirer à son tour la création de communautés du même type pour d'autres groupes sous-représentés dans la tech. Le cercle vertueux est en marche.