La fin d’une épopée pour la startup française Epicery
Malgré un démarrage prometteur et une croissance fulgurante pendant la pandémie, l'aventure se termine pour Epicery. Cette startup française, qui a révolutionné la livraison de produits d'épicerie fine locaux pendant près d'une décennie, vient d'annoncer la cessation de ses activités. Un crève-cœur pour ses fondateurs et ses équipes, mais aussi un nouveau signal d'alarme pour le secteur de la livraison alimentaire.
Epicery, pionnière de la livraison d'épicerie fine locale
Lancée en 2016, Epicery s'est rapidement imposée comme la référence de la livraison de produits d'épicerie haut de gamme issus de commerces de proximité. Avec un réseau de plus de 1100 épiceries partenaires, principalement à Paris et Lyon, la startup permettait à ses 25 000 clients récurrents de se faire livrer les meilleurs produits locaux en un clic, moyennant une commission de 25%.
Je suis très fier d'avoir introduit les épiceries locales au e-commerce ces 10 dernières années, et je suis confiant qu'elles continueront à développer leurs ventes en ligne dans les années à venir.
– Édouard Morhange, co-fondateur et CEO d'Epicery
Un modèle bouleversé par la crise sanitaire
Ironiquement, c'est pendant les confinements liés au Covid-19 qu'Epicery a connu ses plus belles heures. Avec la fermeture des commerces et restaurants, la demande pour la livraison de produits alimentaires a explosé. Un effet d'aubaine qui a permis à la startup de réaliser jusqu'à 20% du chiffre d'affaires de certains commerces partenaires.
Surfant sur cette vague, Epicery a attiré l'attention de Geopost, filiale de La Poste, qui est devenu son actionnaire majoritaire fin 2021. Mais ce coup de boost n'a été que de courte durée. Avec la réouverture progressive de l'économie et le retour à une consommation plus directe, les ventes d'Epicery ont commencé à s'éroder.
Victime collatérale de l'inflation et de la concurrence
La flambée des prix des produits alimentaires n'a rien arrangé. Face à une inflation galopante, de nombreux consommateurs ont dû revoir leur budget courses et se tourner vers des alternatives moins onéreuses que l'épicerie fine. Un coup dur pour Epicery, dont la rentabilité était déjà fragile.
Malgré des coupes dans son maillage (abandon de certaines villes), la startup affichait en 2023 un Ebitda négatif de -4,69 millions d'euros pour un chiffre d'affaires de seulement 2,57 millions. Difficile dans ces conditions de rivaliser avec les mastodontes de la livraison express comme Uber Eats ou Deliveroo, sans parler des acteurs éphémères mais agressifs du quick commerce (Gorillas, Flink, Cajoo...)
Un créneau de niche complexe à pérenniser
Pour Elsa Hermal, co-fondatrice d'Epicery, cette issue n'est pas une fatalité mais illustre la complexité du secteur :
Les entreprises de logistique sont compliquées et difficiles en termes de métriques, mais cela ne veut pas dire que cela ne peut pas être fait.
– Elsa Hermal, co-fondatrice d'Epicery
De son côté, le groupe La Poste assume sa décision et invoque "une analyse approfondie des performances financières et opérationnelles de sa filiale". Le contexte de marché et la perte de synergies (revente de Stuart) auront eu raison de cette aventure entrepreneuriale.
L'héritage d'Epicery pour les commerces locaux
Au-delà de son échec économique, Epicery laisse derrière elle un bel héritage : celui d'avoir initié de nombreux petits commerces à la vente en ligne et au potentiel du digital. Comme le souligne Édouard Morhange, ses équipes ont "introduit les épiceries locales au e-commerce" et ouvert la voie à de nouveaux modes de consommation.
Alors que la crise fragilise de nombreux commerces de proximité, cette expérience pourrait s'avérer précieuse pour diversifier leurs canaux de vente et capter une nouvelle clientèle. La fin d'Epicery n'est peut-être que le début d'une nouvelle ère pour le commerce alimentaire local.