La génération perdue de la tech canadienne

Dans un contexte où un paysage de financement difficile et une dépendance aux fonds publics pèsent sur l'écosystème des startups du Québec, de nombreux fondateurs et investisseurs en capital-risque se tournent vers le sud pour trouver leur équilibre. C'est ce qui ressort des panels et discussions qui ont eu lieu lors d'un enregistrement live du podcast Flagship d'Amiral Ventures à Montréal le 10 octobre dernier. Des données récentes sur l'état de l'écosystème des startups en phase de démarrage au Québec ont été présentées, soulignant les défis auxquels font face les jeunes pousses locales pour lever des fonds.

Un environnement de financement complexe pour les startups québécoises

Malgré un vivier de talents de qualité et des idées innovantes, les startups québécoises peinent à trouver les financements nécessaires pour passer à l'échelle supérieure. Comme l'explique Tom Birch de la Caisse de dépôt et placement du Québec, le marché local du capital-risque est encore relativement restreint par rapport à d'autres écosystèmes majeurs :

Les fonds disponibles au Québec pour les startups en phase d'amorçage restent limités comparé à ce qu'on peut voir dans la Silicon Valley ou à New York. Il y a encore du chemin à faire pour développer une base d'investisseurs locaux solides.

– Tom Birch, Caisse de dépôt et placement du Québec

Cette rareté des financements pousse de nombreux entrepreneurs à se tourner vers les investisseurs américains pour boucler leurs tours de table. Une tendance qui s'accentue face aux valorisations plus généreuses outre-frontière.

L'attrait des investisseurs américains

Pour les startups en quête de financement, l'expertise et les poches profondes des VC américains représentent une opportunité alléchante. Ces derniers sont souvent prêts à miser des sommes plus importantes sur des projets prometteurs, avec des valorisations supérieures à celles pratiquées au Canada.

Cependant, cette manne providentielle ne vient pas sans contreparties pour les fondateurs québécois. Accepter des fonds américains implique souvent une pression accrue sur la croissance et une perte de contrôle sur la gouvernance de l'entreprise. Sans compter un risque de "fuite des cerveaux" si ces investisseurs poussent à une relocalisation vers les USA.

Bâtir des ponts avec l'écosystème américain

Face à ce casse-tête, plusieurs voix s'élèvent pour prôner une approche plus équilibrée dans les relations avec les investisseurs d'outre-frontière. L'idée serait de tisser des liens plus étroits avec les VC américains, tout en préservant un ancrage fort au Québec.

Concrètement, cela passerait par un accompagnement renforcé des startups locales dans leur recherche de financement, en facilitant les mises en relation avec des fonds américains de confiance. Tout en parallèle d'un travail de fond pour consolider l'écosystème du capital-risque made in Québec.

Rassurer et fidéliser les talents locaux

Car la question du financement est indissociable de celle des ressources humaines. Dans un marché hyper compétitif, attirer et retenir les meilleurs profils est un défi de tous les instants pour les startups en pleine croissance.

Offrir un environnement stimulant, des perspectives d'évolution et un attachement au projet d'entreprise sont des facteurs clés pour éviter que ces talents ne soient happés par les sirènes de la Silicon Valley. Autant d'éléments qui supposent une certaine solidité financière et une vision à long terme de la part des fondateurs.

Perspectives pour la nouvelle génération tech au Canada

Au-delà des défis immédiats, se pose la question de l'avenir de toute une génération de startuppeurs canadiens. Dans un écosystème encore en construction, quel chemin emprunter pour ces jeunes entreprises innovantes ?

S'il n'y a pas de recette miracle, quelques pistes se dégagent au fil des échanges :

• Développer le réseautage et le partage d'expérience entre entrepreneurs
• Renforcer les programmes d'accompagnement et de soutien aux startups
• Œuvrer à l'essor d'un écosystème de financement local diversifié
• Créer plus de passerelles avec les réseaux d'investisseurs internationaux

Autant de chantiers qui nécessiteront la mobilisation de toutes les parties prenantes, des entrepreneurs aux investisseurs en passant par les pouvoirs publics. Avec l'espoir qu'en unissant les forces, le Québec et le Canada pourront bâtir un terreau fertile pour sa nouvelle génération de champions technologiques, sans les voir s'envoler vers d'autres cieux.

Car l'enjeu n'est pas seulement économique, il est aussi celui de notre souveraineté numérique et de notre capacité à peser dans la compétition mondiale de l'innovation. Un défi stimulant et porteur de sens pour tous ceux qui croient au potentiel de la scène tech canadienne.