La plasturgie européenne face aux défis de la compétitivité
Alors que l'Europe se veut un champion de la circularité des plastiques, cette ambition se heurte aujourd'hui à la perte de compétitivité de son industrie. Un paradoxe souligné par Plastics Europe dans son dernier rapport, à l'approche de négociations internationales cruciales sur la pollution plastique et l'adoption du règlement européen sur les emballages.
Une industrie européenne en perte de vitesse
Les chiffres publiés par Plastics Europe sont alarmants. En 2023, la production européenne de plastiques vierges a chuté de 8,3% par rapport à 2022, pour tomber à 54 millions de tonnes. Plus inquiétant encore, la production issue du recyclage a elle aussi reculé de 7,8%, une première. Résultat, la part de l'Europe dans la production mondiale n'est plus que de 12%, contre 28% il y a vingt ans.
Cette perte de compétitivité s'explique par la concurrence de régions où les normes environnementales sont moins strictes et les coûts énergétiques plus faibles, à l'image de l'Asie ou des États-Unis. Conséquence directe, les importations européennes de résines et produits finis en plastique ont explosé ces dernières années.
Des emplois et investissements menacés
Pour Plastics Europe, cette situation met en péril la viabilité de toute la chaîne de valeur européenne des plastiques, qui emploie plus de 1,5 million de personnes et a réalisé 365 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2023. Sans un cadre concurrentiel préservé, la transition de l'industrie vers plus de circularité sera compromise, prévient l'association.
La transition vers la circularité ne sera couronnée de succès que si les décideurs politiques mettent en place de toute urgence les conditions-cadres qui permettront de retrouver notre compétitivité.
Marco ten Bruggencate, président de Plastics Europe
L'Europe, première région en plastiques circulaires
Malgré ce contexte défavorable, l'Europe reste leader en matière de plastiques circulaires. Ceux-ci, incluant recyclage mécanique, chimique et bioplastiques, représentent désormais 14,8% de la production locale. Mais là encore, la croissance ralentit (+0,7% depuis 2022) et pourrait compromettre l'ambition de neutralité carbone en 2050.
Négociations internationales : un moment charnière
Ces mauvais chiffres tombent à un moment charnière pour l'avenir de la plasturgie mondiale et européenne. Du 25 au 30 novembre se tiendra en Corée du Sud la 5ème session de négociation en vue d'un traité international contre la pollution plastique. En parallèle, le règlement européen sur les emballages et déchets d'emballage doit être adopté prochainement.
Plastics Europe appelle à un accord "ambitieux et réalisable", valorisant les déchets plastiques et s'appuyant sur des financements publics et privés, notamment via la responsabilité élargie des producteurs. Tout en mettant en garde contre des mesures de réduction contraignantes réclamées par les ONG.
Quel avenir pour la plasturgie européenne ?
Entre green deal européen, pressions réglementaires croissantes, engagements volontaires et demandes sociétales, l'industrie européenne des plastiques se trouve à la croisée des chemins. Sa capacité à regagner en compétitivité tout en accélérant sa transition écologique sera déterminante pour son avenir. Et ce dans un contexte international complexe et fluctuant.
Une chose est sûre : la plasturgie européenne devra se réinventer pour conjuguer performance économique et environnementale. Un défi immense mais incontournable, dont dépendra la pérennité de toute une filière industrielle sur le Vieux Continent. Les prochains mois s'annoncent décisifs.