La Silicon Valley étouffe les inquiétudes sur l’IA en 2024
En 2024, alors que les avertissements sur les risques existentiels de l'intelligence artificielle se multipliaient, la Silicon Valley a choisi d'imposer sa vision optimiste de l'IA, une vision bénéfique pour ses propres intérêts financiers. Malgré les appels de plus de 1000 experts et dirigeants technologiques pour mettre en pause le développement de l'IA le temps d'en maîtriser les risques, les géants de la tech et les startups ont accéléré leurs investissements dans ce domaine comme jamais auparavant.
L'IA, entre risques existentiels et profits astronomiques
Les "prophètes de malheur" de l'IA, comme ils sont surnommés, n'ont eu de cesse de tirer la sonnette d'alarme : des systèmes d'IA avancés pourraient échapper à tout contrôle humain, prendre des décisions mettant en danger des vies, ou être utilisés par les puissants pour opprimer les masses. En 2023, il semblait qu'une prise de conscience s'amorçait avec les mises en garde d'Elon Musk, les lettres ouvertes de scientifiques, le décret de Biden... Mais la Silicon Valley a vite repris le contrôle du narratif.
Car pour les entrepreneurs de la tech, les risques liés à l'IA sont secondaires comparés aux opportunités de profits. Comme l'a martelé Marc Andreessen dans un long essai, l'IA ne détruira pas le monde mais le sauvera. À condition de laisser les entreprises et startups la développer aussi vite que possible, avec peu de barrières réglementaires. Cette idéologie du "move fast and break things" a déjà causé bien des dégâts avec les technologies précédentes, mais qu'importe pour la Silicon Valley si cela permet à ses licornes d'engranger des milliards.
L'échec retentissant du projet de loi SB 1047 sur la sécurité de l'IA
Le combat législatif autour du projet de loi californien SB 1047 illustre bien comment la Silicon Valley a torpillé les tentatives de réguler l'IA en 2024. Ce texte, soutenu par des pointures comme Geoffrey Hinton et Yoshua Bengio, visait à prévenir les scénarios catastrophes liés à une IA incontrôlable. Mais les géants de la tech et les capital-risqueurs ont déployé une intense campagne de lobbying, criant à l'entrave à l'innovation et agitant le spectre de la concurrence chinoise. Au final, malgré un vote favorable au parlement, le gouverneur Newsom a mis son veto, cédant aux sirènes de la tech.
L'idée que des systèmes intelligents vont développer leurs propres buts et asservir l'humanité est ridicule. Il y a plein de façons de construire une technologie de manière dangereuse, mais tant qu'il y a un moyen de bien faire, c'est tout ce dont on a besoin.
Yann LeCun, scientifique en chef de l'IA chez Meta
Cette déclaration de Yann LeCun résume bien l'état d'esprit dominant dans la Silicon Valley. Tant pis si certaines implémentations de l'IA s'avèrent néfastes, l'essentiel est de continuer à innover à tout va. Certains n'hésitent pas à traiter les "prophètes de malheur" de l'IA de délirants et d'anti-technologies.
Se préparer aux nouveaux risques de l'IA en 2025
Malgré l'échec du SB 1047, les partisans d'une IA plus sûre ne baissent pas les bras. Ils préparent déjà de nouveaux projets de loi pour 2025, espérant une prise de conscience croissante des risques à long terme. Mais la partie s'annonce ardue face à l'influence tentaculaire des géants de la tech. Et pendant ce temps, de nouveaux dangers bien réels émergent, comme le suicide d'un ado de 14 ans après avoir conversé avec un chatbot de Character.AI, une startup financée par le fonds a16z farouchement opposé à toute régulation.
- L'IA promet des avancées extraordinaires mais pose aussi des risques existentiels pour l'humanité
- En 2024, la Silicon Valley a étouffé les appels à réguler l'IA pour favoriser l'innovation à tout prix
- Malgré l'émergence de dangers concrets, la tech s'oppose farouchement à un encadrement de l'IA
L'avenir nous dira si la vision court-termiste et la quête effrénée de profits de la Silicon Valley nous mèneront à une IA bénéfique pour l'humanité ou au contraire à la catastrophe tant redoutée. Une chose est sûre : en 2024, les sirènes de la tech ont réussi à endormir nos inquiétudes légitimes. Réussiront-elles à le faire éternellement ?