L’adaptation au changement climatique, parent pauvre des politiques publiques
Les catastrophes climatiques se multiplient aux quatre coins du globe, de l'Espagne à Mayotte en passant par l'Hexagone. Inondations, méga-feux, sécheresses, canicules... Ces phénomènes extrêmes, amenés à s'intensifier avec le réchauffement, auront indéniablement des conséquences majeures sur les activités humaines et industrielles. Pourtant, malgré l'urgence, l'adaptation au dérèglement climatique peine encore à émerger comme une priorité en France, que ce soit dans les politiques publiques ou au sein des entreprises.
Un troisième plan national d'adaptation peu ambitieux
Reporté à quatre reprises, le tant attendu 3ème Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC-3), présenté en octobre 2024 par l'ex-Premier ministre Michel Barnier, s'est révélé décevant. Certes, ses 51 mesures ont été bâties sur l'hypothèse d'une France à +4°C en 2100. Mais les moyens financiers et les contraintes font cruellement défaut :
- Aucun fonds dédié n'a été créé pour financer les actions, malgré les promesses
- Seules les grandes entreprises des transports et de l'énergie devront mener des études de vulnérabilité et proposer des plans d'adaptation
- Aucun objectif chiffré n'est fixé sur la résistance des infrastructures aux aléas climatiques
Un plan a minima donc, loin du « choc d'adaptation » espéré par les acteurs engagés sur le sujet. La consultation en ligne de la société civile, ouverte jusqu'à fin décembre, pourrait toutefois permettre de rehausser un peu le curseur. Affaire à suivre.
L'adaptation, angle mort des stratégies d'entreprises
Côté entreprises, l'heure n'est pas encore à la mobilisation générale. Selon une récente étude de Bpifrance, plus des deux tiers des patrons de PME et d'ETI ne considèrent pas l'adaptation au changement climatique comme un enjeu stratégique majeur. Plus de la moitié estime même que leur société n'est pas exposée aux risques climatiques !
Les dirigeants sous-estiment encore largement leur vulnérabilité face au dérèglement climatique.
Virginie Normand, Directrice RSE chez Bpifrance
Pourtant, de l'approvisionnement à la distribution en passant par la production, tous les maillons de la chaîne de valeur seront impactés. Certains grands groupes l'ont bien compris et planchent activement sur leur résilience, à l'instar de la SNCF ou EDF. Mais les PME et ETI, elles, accusent un net retard.
Adaptation et compétitivité, les deux faces d'une même pièce
Investir dès maintenant dans l'adaptation n'est pas qu'une question de gestion des risques. C'est aussi un levier de compétitivité et d'innovation pour les entreprises. Celles qui sauront développer des solutions adaptées au climat de demain disposeront d'un avantage concurrentiel certain.
Le marché est là : d'après la Commission Européenne, les besoins d'investissements pour l'adaptation au sein de l'UE s'élèvent à près de 250 milliards d'euros sur la période 2021-2030.
Vers une « culture de l'adaptation » ?
Pour accélérer la prise de conscience, tous les acteurs devront se mobiliser : pouvoirs publics, fédérations professionnelles, investisseurs, ONG... L'objectif : faire émerger une véritable « culture de l'adaptation » au sein du tissu économique français.
Sensibilisation, formations, outils d'autodiagnostic, partage de bonnes pratiques... Les leviers sont nombreux pour aider les dirigeants, en particulier de PME et d'ETI, à intégrer cet enjeu dans leur stratégie.
Face à l'ampleur de la tâche, une mobilisation générale s'impose. Le temps presse : à chaque dixième de degré gagné, c'est notre vulnérabilité collective qui s'accroît. L'adaptation n'est plus une option, mais une ardente obligation. Il est plus que temps de passer à la vitesse supérieure.