L’alliance entre Stellantis et Leapmotor pour conquérir l’Europe
L'industrie automobile est en pleine mutation avec l'essor des véhicules électriques et connectés. Dans ce contexte de transition, les alliances entre constructeurs se multiplient pour relever les défis technologiques et conquérir de nouveaux marchés. C'est le cas du partenariat noué récemment entre le groupe Stellantis et le constructeur chinois Leapmotor, qui pourrait bien redistribuer les cartes sur le marché européen.
Stellantis mise sur les véhicules Leapmotor pour percer en Chine et en Europe
Stellantis, né en 2021 de la fusion entre PSA et Fiat-Chrysler, est le 4ème constructeur automobile mondial. Mais le groupe franco-italo-américain est encore peu présent en Chine, premier marché automobile mondial, et doit accélérer sa transition vers l'électrique en Europe. Pour y remédier, Stellantis a acquis en 2022 une participation de 21% au capital de Leapmotor, un ambitieux constructeur chinois de voitures 100% électriques.
Créé en 2015, Leapmotor s'est rapidement imposé comme un acteur innovant et agile sur le bouillonnant marché chinois des véhicules électriques. La jeune pousse a vendu près de 150 000 véhicules en 2023 et vise le double cette année. Mais pour passer à la vitesse supérieure et s'étendre hors de Chine, Leapmotor avait besoin du soutien d'un grand constructeur mondial. C'est chose faite avec Stellantis.
Selon les termes de l'accord, Stellantis va commercialiser les modèles Leapmotor dans son réseau européen dès septembre 2024, d'abord dans 9 pays dont la France, puis à terme dans le monde entier. L'objectif est ambitieux : écouler 500 000 véhicules Leapmotor hors de Chine d'ici 2030. Les deux partenaires ont créé une co-entreprise dédiée, Leapmotor International, détenue à 51% par Stellantis.
Un deal gagnant-gagnant
Pour Stellantis, ce partenariat est l'occasion rêvée de proposer rapidement une gamme complète de véhicules électriques en Europe, en complément de ses propres modèles actuels (Peugeot e-208 et e-2008, Fiat 500e...) et à venir. Le groupe pourra aussi s'appuyer sur la R&D et les technologies avancées de Leapmotor en matière de batteries, de connectivité ou de conduite autonome.
Côté chinois, c'est un formidable accélérateur pour se faire une place sur le marché automobile européen, très différent de la Chine. En utilisant le vaste réseau commercial de Stellantis (qui vise 500 points de vente Leapmotor en 2026 dont 80 en France), la marque Leapmotor va pouvoir se faire connaître des clients européens exigeants, sans avoir à créer un coûteux réseau de distribution. Les modèles Leapmotor seront aussi mieux adaptés aux goûts et besoins locaux.
Nous sommes ravis de nous associer à Stellantis, un groupe leader en Europe, pour exporter notre savoir-faire technologique et offrir des véhicules au style distinctif et agréables à conduire aux consommateurs du monde entier.
Zhu Jiangming, fondateur et PDG de Leapmotor
Une concurrence féroce venue de Chine
Leapmotor n'est pas le premier constructeur chinois à s'attaquer au marché européen. Le géant BYD (Build Your Dreams), soutenu par Warren Buffet, y vend déjà ses modèles Han, Tang et Atto 3. Le groupe public SAIC y écoule ses SUV et utilitaires électriques sous la marque britannique MG. Et d'autres ambitieuses start-up technologiques comme Xpeng, Nio ou Aiways cherchent à séduire la clientèle européenne avec leurs modèles hyper-connectés.
Face à cette offensive chinoise, les constructeurs historiques européens n'ont d'autre choix que de nouer des partenariats pour acquérir des technologies, réduire les coûts et accélérer la mise sur le marché de nouveaux modèles électriques. Outre Stellantis avec Leapmotor, Renault a créé la co-entreprise Horse avec le chinois Geely, tandis que Volkswagen a lancé des modèles spécifiques pour la Chine. Une façon de transformer la menace chinoise en opportunité.
Vers une présence industrielle de Leapmotor en Europe ?
Pour l'heure, les modèles Leapmotor vendus en Europe seront importés de Chine. Mais à terme, si les volumes suivent, une production locale pourrait avoir du sens pour réduire les coûts logistiques et se rapprocher des clients. Carlos Tavares, le dirigeant de Stellantis, a déjà ouvert la porte à cette possibilité :
Si le succès commercial est au rendez-vous, nous envisagerons de produire les véhicules Leapmotor dans nos usines en Europe. Nous avons les capacités industrielles pour cela.
Carlos Tavares, CEO de Stellantis
Une telle décision serait une première pour un constructeur chinois et un symbole fort de son ancrage européen. Elle permettrait aussi de contourner de possibles hausses de droits de douane dans le contexte de tensions commerciales entre l'Europe et la Chine. Politiquement, une implantation chinoise pourrait cependant faire grincer quelques dents et nourrir les craintes d'une perte de souveraineté industrielle du vieux continent.
Quoi qu'il en soit, l'arrivée des modèles Leapmotor dans les concessions Stellantis sera un test grandeur nature de l'appétence des clients européens pour les voitures chinoises. Ce sera aussi un sacré défi pour les deux partenaires, entre adaptation culturelle et montée en puissance industrielle. Mais les jeux sont loin d'être faits sur le lucratif marché des véhicules électriques, et l'audacieux pari de l'alliance Stellantis Leapmotor pourrait être un coup de maître pour changer la donne. Réponse dès l'automne 2024 !