
Le Canada, puissance discrète du jeu vidéo mondial
Qui aurait cru que derrière l'image de grand nord sauvage, le Canada cachait un écosystème florissant de création de jeux vidéo ? De Montréal à Vancouver en passant par Edmonton, l'industrie du gaming fait rayonner le pays à l'international. Elle a généré pas moins de 5,1 milliards de dollars de PIB en 2024, dont 88% à l'export. De quoi en faire un atout clé pour diversifier l'économie canadienne.
Mass Effect, Assassin's Creed, mais aussi les pépites indés Celeste et Cuphead...Saviez-vous que certains des plus grands succès du jeu vidéo mondial sont Made in Canada ? L'exemple le plus frappant est sans doute Balatro, nommé jeu de l'année et vendu à plus de 5 millions d'exemplaires.
Le jeu vidéo canadien, une industrie aux multiples facettes
Selon un récent rapport de l'Association Canadienne du Logiciel de Divertissement (ALD), la force de l'industrie du jeu vidéo au Canada réside dans sa diversité :
Une partie de la magie de l'industrie du jeu vidéo ici, c'est qu'elle ne se résume pas à une seule chose.
Paul Fogolin, président de l'ALD
De fait, le secteur compte aussi bien :
- De grands studios détenues par des géants mondiaux comme Ubisoft Montréal ou Bioware Edmonton.
- Une scène indépendante créative et audacieuse, à l'origine de titres originaux.
- De nombreuses entreprises spécialisées dans le développement d'outils et de technologies pour le jeu vidéo.
Des talents reconnus internationalement
Le savoir-faire des créateurs de jeu vidéo canadiens est mondialement réputé. Comme l'explique David Anfossi, dirigeant d'Eidos Montréal :
Nous avons la chance d'avoir des talents exceptionnels au Canada, formés dans d'excellentes écoles. Leur expertise technique et surtout leur créativité sont très recherchées.
David Anfossi, directeur du studio Eidos Montréal
De nombreux développeurs étrangers font ainsi appel à des équipes canadiennes pour certaines phases clés de leurs projets, comme la conception des personnages ou l'animation des cinématiques. Un gage de qualité pour les productions d'ici.
Des aides publiques essentielles
Autre atout de taille pour le secteur : le soutien des pouvoirs publics via des crédits d'impôts et des programmes de financement. Ces aides permettent aux studios de réduire leurs coûts de production et de prendre plus de risques créatifs.
Selon l'ALD, chaque dollar investi par l'État génère en moyenne 17$ de retombées économiques. Un effet de levier crucial pour la compétitivité du jeu vidéo canadien face aux autres pôles mondiaux comme les États-Unis ou le Japon.
L'enjeu clé de la propriété intellectuelle
Revers de la médaille, une grande partie des franchises à succès créées au Canada appartiennent à des éditeurs étrangers. C'est le cas de séries comme Assassin's Creed, FIFA ou Mass Effect, dont les droits sont détenus respectivement par les français Ubisoft, les américains Electronic Arts et Bioware.
Pour l'ALD, l'un des principaux défis pour l'industrie est donc de développer davantage de propriétés intellectuelles contrôlées par des intérêts canadiens. Objectif : capter plus de valeur et renforcer le positionnement du pays dans la chaîne de valeur mondiale du gaming.
Surmonter les défis de l'industrie
Malgré son dynamisme, le secteur du jeu vidéo canadien fait face à plusieurs enjeux importants :
- La pénurie de talents, dans un contexte de croissance rapide et de concurrence internationale féroce pour attirer les meilleurs profils.
- La dépendance aux mega-productions et grands éditeurs, qui concentrent une part croissante des revenus mais sont aussi de plus en plus risqués.
- Des pratiques de crunch (périodes de travail très intenses avant la sortie d'un jeu) et de licenciements encore trop fréquentes, sources de burn-out.
Pour relever ces défis, l'ALD recommande d'investir massivement dans la formation, de soutenir la création originale et d'améliorer les conditions de travail. Mais au-delà, il en va aussi de la capacité du Canada à peser dans une industrie culturelle mondiale en plein essor.
Miser sur l'avenir du jeu vidéo
Avec ses 5,1 milliards de contribution au PIB, le jeu vidéo pèse certes encore peu face aux secteurs clés de l'économie canadienne. Mais il affiche un potentiel de croissance très important pour les années à venir, porté par des tendances de fond comme l'essor de l'e-sport, du jeu sur mobile, du cloud gaming ou encore des univers virtuels immersifs (métavers).
En misant plus fortement sur cette filière d'excellence, créatrice d'emplois et à haute valeur ajoutée, le Canada se donnerait les moyens de préparer l'économie de demain. Et de transformer son statut de puissance discrète du jeu vidéo en position de leader assumé sur l'échiquier international. Le gouvernement semble l'avoir compris en faisant du secteur l'une de ses priorités. Aux studios de continuer à faire rêver des millions de joueurs aux quatre coins du monde !