Le GNL, une fausse bonne idée plus polluante que le charbon ?
Présenté comme un "combustible de transition" vers un monde bas-carbone, le gaz naturel liquéfié (GNL) bénéficie d'une image plus verte que le charbon et le pétrole. Mais selon une étude récente, son bilan carbone serait en réalité bien pire qu'on ne le pense. En cause : les importantes fuites de méthane lors de son extraction et de son transport. De quoi remettre en question son rôle d'énergie de transition...
Le paradoxe du GNL, entre image verte et réalité climatique
Le GNL possède de sérieux atouts face aux autres combustibles fossiles. Composé à 90% de méthane, il émet moins de CO2 et de polluants nocifs lors de sa combustion que le charbon ou le fuel lourd. Son transport par voie maritime lui permet aussi d'être acheminé dans le monde entier depuis les grands pays producteurs comme le Qatar, l'Australie ou les États-Unis.
Mais si l'on prend en compte l'ensemble de son cycle de vie, le bilan carbone du GNL apparaît nettement moins reluisant. C'est ce que montre l'étude du chercheur Robert Howarth, de l'université Cornell. Selon lui, sur une période de 20 ans, le GNL importé des États-Unis génère 36% de gaz à effet de serre de plus que le charbon. Un chiffre qui s'explique par les fuites massives de méthane, un puissant gaz à effet de serre, aux différents stades de sa chaîne de valeur.
Les fuites de méthane, le talon d'Achille de l'industrie du GNL
Pendant longtemps sous-estimées, les émissions de méthane liées à l'extraction du gaz sont aujourd'hui reconnues comme un sérieux problème climatique. Dans le Bassin permien au Texas, jusqu'à 2,8% du gaz s'échappe dans l'atmosphère lors de son extraction en tant que coproduit du pétrole. Un gaspillage dû au manque d'intérêt des industriels pour ce gaz bon marché.
À elle seule, la phase d'extraction compte pour près de la moitié de l'impact carbone du GNL américain selon Howarth. Le reste provient de sa combustion (environ un tiers), de sa liquéfaction et de son transport par navires méthaniers (15% au total).
Face à ce constat, l'industrie tente de réagir. Des pétroliers comme TotalEnergies ont fait du "zéro fuite de méthane" un objectif majeur. Capteurs, électrification, meilleures pratiques... Les pistes de progrès sont là, mais prennent du temps à se déployer. D'ici là, l'empreinte carbone du GNL reste très variable selon ses origines, comme le souligne l'ONG Reclaim Finance.
Bien choisir son GNL pour limiter son impact ?
Le GNL américain fuit ainsi 7 fois plus de méthane que celui des Émirats Arabes Unis. Un taux "honorable" d'1,25% pour le Qatar ne l'empêche pas d'être le plus gros émetteur au monde du fait de l'ampleur de sa production. Comment alors s'y retrouver dans ce grand écart ?
La future réglementation européenne devrait fixer des seuils maximums d'émissions mais il faudra attendre 2030 pour les voir s'appliquer aux importations. En attendant, c'est aux acheteurs de faire pression sur leurs fournisseurs pour adopter les meilleures pratiques, contrôler leurs fuites et certifier leur GNL.
Le GNL n'est pas une solution miracle pour le climat. Seule une réduction rapide de notre consommation d'énergie fossile et un virage résolu vers les renouvelables nous permettra de tenir les objectifs de l'Accord de Paris
Marie Toussaint, eurodéputée EELV
Un appel à la prudence et à la vigilance face aux promesses du "gaz propre" qui semble plus que jamais d'actualité. Le GNL peut certes jouer un rôle de commodité d'appoint pour répondre aux tensions d'approvisionnement mais ne peut constituer une solution durable sans un sérieux nettoyage de sa chaîne de valeur.