Le phénomène des mèmes de Kamala Harris décrypté

C'était un monde différent il y a quelques semaines. Avant que le président Biden n'annonce qu'il ne se représenterait pas et soutienne Kamala Harris, son actuelle vice-présidente. Avant que sa campagne ne batte des records de levée de fonds. Avant que des professeurs d'université ne prévoient d'enseigner les mèmes de Kamala en classe.

L'ascension fulgurante des mèmes Kamala

Tout a débuté avec des vidéos montages loufoques réalisées par des internautes, surfant sur la vague des "fan cam" populaires auprès des fans de K-Pop. On y voit Kamala Harris rire aux éclats, vanter son amour des diagrammes de Venn ou encore affirmer "vous pensez être tombé d'un cocotier ?". Le tout sur fond de musique de Charli XCX.

Ces mèmes ont rapidement fait le tour de la toile et sont devenus leur propre langage pour exprimer un soutien, souvent ironique, à la candidature de Harris. Des gens arborent désormais des émojis de noix de coco et de palmiers sur leurs profils, référence à une étrange anecdote de la vice-présidente sur sa mère.

Un phénomène générationnel et culturel

D'après les experts, plusieurs facteurs expliquent cet engouement viral qui transcende les clivages politiques habituels :

• L'aspiration à une présidence plus jeune et diverse, à l'image de l'électorat "Gen Z"
• La personnalité atypique et les phrases incongrues de Kamala Harris
• L'influence de la pop culture, notamment via la chanteuse Charli XCX qui a apporté sa caution

Il y avait quelque chose de si séduisant à l'idée d'une présidence Harris, avoir quelqu'un qui n'a pas un million d'années au pouvoir.

Ryan Long, créateur d'un des premiers mèmes sur Kamala Harris

Une campagne entre deux eaux

Si ce soutien viral est une aubaine, l'équipe de campagne doit rester prudente dans l'utilisation de ces mèmes selon les spécialistes. Le risque ? Casser leur aspect organique et spontané.

Certains y voient aussi un moyen d'évacuer les débats de fond sur le programme et le passé de procureure de la candidate. Une ambiguïté entretenue entre soutien sincère et second degré, reflet du paysage politique actuel.

Mèmes politiques : un pouvoir grandissant

Si le phénomène n'est pas nouveau, les mèmes ont pris une place prépondérante dans les campagnes électorales à l'ère des réseaux sociaux. Ils permettent de mobiliser et fédérer les électeurs, surtout les plus jeunes.

Mais attention à l'effet boomerang. En 2004, le candidat Howard Dean avait vu sa campagne dérailler à cause des moqueries sur son cri de ralliement jugé ridicule. Plus récemment, Joe Biden a tenté de surfer sans grand succès sur le mème "Dark Brandon" le dépeignant en leader impitoyable.

Nul doute que ces mèmes, dans leur apparente absurdité, sont révélateurs des enjeux de pouvoir, d'image et de communication de la politique contemporaine. L'ironie comme symptôme d'un certain malaise et désenchantement, mais aussi comme moyen cathartique d'exprimer ses espoirs. Kamala Harris, reine des mèmes 2024 malgré elle ?